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Judicial review - Me Mohamed : «Un couteau à double tranchant»

Me Yousuf Mohamed. Me Yousuf Mohamed.

Le recours à une révision judiciaire est évoqué comme moyen de revoir les conclusions du rapport de l’ancien juge Paul Lam Shang Leen. Deux Senior Counsels abordent les limites de cette procédure.

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La contestation s’organise, trois jours après que le rapport de la commission d’enquête sur la drogue a été rendu public. Si les noms d’une dizaine d’hommes de loi sont cités dans ce rapport, certains, à l’instar de Me Roubina Jadoo-Jaunbocus, annonce déjà un recours à une révision judiciaire (Judicial Review). Me Sanjeev Teeluckdharry, lui, s’est ravisé quant à un recours à cette action.

Deux Seniors Counsels, Mes Antoine Domingue et Yousuf Mohamed, abordent cette procédure et ses implications.

Comment se présentera cette procédure de révision judiciaire et quel impact pour le rapport de la commission d’enquête Paul Lam Shang Leen ?

« Il faut d’abord faire la distinction entre le rapport d’une commission d’enquête et un jugement de la cour. Le rapport d’une commission d’enquête n’a pas d’effets juridiques. À la différence d’un jugement qui peut être suivi d’une condamnation. On ne peut prendre les conclusions d’un rapport d’une commission d’enquête et les considérer comme une vérité biblique », lâche Me Antoine Domingue.

Pour Me Yousuf Mohamed, « les conclusions d’une commission d’enquête peuvent être contestées si la partie concernée prouve qu’il y a eu mauvaise appréciation des preuves devant la commission. Et si elle établit qu’il y a eu erreur de droit dans la procédure ou que les conclusions ne sont pas raisonnables ». L’avocat ajoute que la Cour suprême peut alors ordonner que les extraits du rapport jugés offensants à l’égard d’une personne, en soient retirés. « Toutefois, le recours à une révision judiciaire en la circonstance est un couteau à double tranchant. Si la partie concernée perd en fin de compte, la Cour suprême risque de confirmer les conclusions accablantes contre elle », soutient le Seniors Counsel.

Il ajoute que les membres d’une commission d’enquête jouissent d’une immunité face à des poursuites au civil, « sauf si on peut établir une mauvaise foi de la part des personnes ayant présidé les travaux ».

Les deux Seniors Counsels sont catégoriques sur un point : aucune preuve fournie devant une commission d’enquête ne peut constituer de preuves dans une poursuite au pénal. « Il faut une enquête séparée » concluent-ils.


« Unsollicited visits » : Ce qu’ils en pensent

Mes Yousuf Mohamed et Antoine Domingue ont abordé un autre sujet litigieux. Un chapitre intitulé « Unsollicited visits » a été évoqué dans le rapport Lam Shang Leen. Cela concerne les visites des avocats en prison et qui n’ont pas été sollicitées par les détenus.

« Il faut faire la part des choses. Souvent, c’est la famille des détenus qui appelle les avocats et leur demande de défendre un proche. Peut-on évoquer des unsollicited visits ? » interroge Me Antoine Domingue. Pourquoi ne pas demander à un détenu d’adresser une lettre à un avocat pour lui réclamer un entretien en prison ? « Les choses se compliquent lorsque le détenu ne sait pas écrire. Même si des officiers sont chargés de veiller au bien-être des détenus, rappelons que la conversation entre un avocat et son client est confidentielle », précise Me Domingue. « Le détenu qui écrit, selon la procédure établie, ne peut espérer que la correspondance soit confidentielle. » Pour Me Yousuf Mohamed, cette procédure de visite en prison est déjà assez stricte. « D’abord, il faut prendre rendez-vous (par écrit) 48 heures avant l’entretien. Je subis une fouille corporelle à chaque visite en prison, je ne peux emmener mon portable au parloir. Et il y a pire comme humiliation : Je dois régulièrement attendre 30 minutes dans l’enceinte de la prison de Grande-Rivière-Nord-Ouest avant d’accéder à mon client », conclut Me Yousuf Mohamed.


Les précédents

Le cas Raj Dayal

L’ancien ministre de l’Environnement et ancien commissaire de police avait remporté une victoire partielle devant la Cour suprême, le 16 octobre 2002. Ariranga Pillay , chef juge à l’époque, et Vidya Narayen, juge à la retraite, ont souligné que la commission d’enquête présidée par l’ancien chef juge Bernard Sik Yuen, concernant Raj Dayal, a outrepassé ses pouvoirs dans un passage de son rapport en abordant une affaire de repas gratuits. La commission d’enquête, instaurée en octobre 1997 par le président de la République, devait essentiellement enquêter sur les contrats alloués par le département de la police. Quoi qu’il en soit, la Cour suprême devait conclure que Raj Dayal n’a été que partiellement victorieux (dans son recours). Des poursuites au pénal contre Raj Dayal devaient être rayées sur un point de droit. La décision a été confirmée en appel.

Le cas Rama Valayden

Rama Valayden est l’un de ceux qui ont pu obtenir la révision des extraits du rapport d’une commission d’enquête. Il faut remonter à un verdict de la Cour Suprême daté du 9 avril 2002 et rendu par l’ancien chef juge Bernard Sik Yuen et l’ancienne juge Vidya Narayen. Après les émeutes de février 1999, après la mort du chanteur Joseph Reginald Topize (Kaya), une commission d’enquête avait été instituée pour faire la lumière sur les incidents survenus à travers le pays. Ladite commission était présidée par le chef juge actuel Kheshoe Parsad Matadeen.

L’entrepreneur Harry Krishna Padiachy

L’entrepreneur Harry Krishna Padiachy a aussi obtenu gain de cause en Cour suprême en 2003. Il contestait les conclusions de la même commission présidée par l’ancien chef juge Bernard Sik Yuen, le concernant. Dans leur verdict, le chef juge Ariranga Pillay et le juge Asraf Caunhye statuent que la commission a outrepassé ses attributions au sujet de l’entrepreneur. La Cour devait ordonner que des paragraphes du rapport le concernant ne soient pas pris en considération. L’entrepreneur avait réfuté des allégations selon lesquelles il avait été payé deux fois pour un même contrat.

 

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