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Dr Keyvoobalan Pauvaday : «Impensable que le ministre n’ait pas été informé»

Dr Keyvoobalan Pauvaday, ancien directeur à la Santé.

Ce jeudi, dans le contexte de l’affaire « Molnupiravir », les procédures pour l’achat de médicaments ont été détaillées par l’ancien directeur de la Santé. Il était l’un des invités de l’émission de Radio Plus « Au Cœur de l’Info », animée par Florence Alexandre et Terence O’Neill.

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Le Dr Keyvoobalan Pauvaday est surpris. En tant qu’ancien directeur général des services de santé, il connaît les rouages du système. Pour lui, il n’est pas possible que le ministre Kailesh Jagutpal n’ait pas été informé à toutes les étapes qui ont mené à l’achat de 999 000 doses de Molnupiravir par le ministère de la Santé à la société CPN Distributors Ltd, pour un montant de près de Rs 80 millions.

« Il y a des procédures bien établies pour l’achat de médicaments. Le directeur général de la Santé (DGS) et le Senior Chief Executive (SCE) sont impliqués dans l’achat des produits pharmaceutiques. Ils doivent, avant le lancement de tout appel d’offres, informer le ministre de la nécessité de se procurer le produit choisi par un comité technique »,indique-t-il. Selon lui, le SCE doit, « normalement », tenir le ministre informé de ce qui se passe à chaque étape de la procédure pour l’achat d’un médicament. Dans le cas précis du Molnupiravir, « il est impensable que le SCE ne soit pas allé vers le ministre ».

Le Dr Pauvaday explique qu’avant que l’achat d’une nouvelle molécule ne soit approuvé, il y a une succession de procédures selon une approche pyramidale. Dans un premier temps, « Les médecins qui travaillent avec les patients dans les hôpitaux, les spécialistes en médecine interne, les spécialistes des maladies respiratoires, les anesthésistes et les pharmaciens vont se concerter. » C’est le pneumologue Ramprakash Reesaul qui a initialement recommandé l’utilisation du Molnupiravir, dit-il. Cependant, la proposition est ensuite soumise à un comité formé de ses confrères.  

Ce comité siégeait sans la présence du DGS à l’époque où il occupait ce poste, souligne le Dr Pauvaday. « Le comité doit savoir quelle est l’efficacité du produit, combien de patients seront traités et le prix du médicament », poursuit-il. C’est à la lumière des informations fournies par le comité que le DGS transmet le dossier au Permanent Secretary (PS) et au SCE du ministère.

« Le SCE est à la tête du ministère. Il a de grandes responsabilités. Il peut dire qu’il n’y a pas assez de financement pour l’achat du produit. Normalement, pour un tel dossier, il y a une concertation avec le DGS et les principales personnes concernées avant d’informer le ministre de la démarche pour l’éventuel achat du médicament, car il faut trouver un financement additionnel ». Si le produit est efficace, il est approuvé par le ministre et c’est à partir de là que le dossier va au département « Procurement » pour démarrer les procédures d’achat. 

« Une compagnie ne peut pas fournir des médicaments au ministère avant qu’un contrat ne lui ait été alloué. Il peut s’agir d’une donation, mais là encore il y a des critères à respecter », fait ressortir le Dr Pauvaday. Au cas contraire, « cela pourrait être considéré comme un pot-de-vin versé au ministère de la Santé ».

Kadress Pillay, ancien directeur de l’Audit : «Des règles plus strictes pour les fournisseurs»

L’ancien directeur de l’Audit fait quelques propositions à étudier. Il faudrait, dit-il, que ceux qui veulent devenir fournisseurs de l’Etat s’enregistrent et que la liste soit rendue publique. Qu’ils aient obligatoirement une expérience significative dans le domaine concerné. Et enfin qu’ils donnent « une garantie bancaire de Rs 50 millions ».

Kadress Pillay se demande comment une entreprise qui n’a jamais vendu de médicaments a pu obtenir un tel contrat. « Depuis les dernières élections, il y a une descente aux enfers des gens impliqués dans le Procurement », dit-il. L’ancien ministre déplore aussi que seule la Public Service Commission peut prendre des sanctions contre des fonctionnaires. Selon lui, il faudrait créer un autre organisme pour cela. 

Enfin, il est en faveur d’un changement plus global. « La Constitution est dépassée. On ne peut pas garder un système crée en 1968 et dire que c’est applicable. Tout change, le système, entre autres. Même la Constitution doit changer. »

Amédée Darga : « Plus de sévérité envers les fonctionnaires fautifs »

« C’est clair qu’il y a eu un délit d’initié. Toutes les informations vont dans cette direction », affirme l’observateur Amédée Darga. « Pourquoi des hauts fonctionnaires prennent-ils leur retraite avant l’heure s’ils n’ont rien à se reprocher ? », demande-t-il. Les ministres, dit-il, ont également leur part de responsabilité. 

Le ministre, poursuit Amédée Darga, n’est pas forcément au courant lors du paiement accordé aux fournisseurs. « C’est le Permanent Secretary ou le Senior Chief Executive qui doivent donner leur aval. Mais une fois que le ministre est au courant de la situation, il devient condamnable s’il n’a pas pris les mesures adéquates. Il y a des hauts fonctionnaires qui se servent de leur position pour s’enrichir », dénonce-t-il.

Il juge « choquant » que des hauts fonctionnaires aient pris leur retraite en plein scandale. « Ils ne doivent pas fuir devant la situation. Même s’ils sont à la retraite, ils ont toujours des comptes à rendre devant la justice », note Amédée Darga. Il souhaite que la législation soit plus sévère pour de tels cas. « Un fonctionnaire a beaucoup de droits mais doit être sévèrement puni s’il arrive qu’il fasse du tort à la nation. Il faut durcir la loi par rapport aux fonctionnaires pointés du doigt pour corruption. Leurs biens doivent être saisis le temps de l’enquête. Leurs salaires doivent être revus. Une cour de justice spéciale doit être créée pour traiter ces cas », propose Amédée Darga.

L’observateur estime, par ailleurs, que l’Integrity Reporting Services Agency doit enquêter sur les biens acquis par les fonctionnaires et autres politiciens de façon inexplicable au fil des années.

Dharam Gokhool, ancien ministre : «La différence de prix a échappé au ministre ?»

Dharam Gokhool estime que le gouvernement a oublié certaines promesses. « Il avait promis de faire un nettoyage. Il a trahi son engagement d’apporter la bonne gouvernance », dit l’ancien ministre. En revanche, il salue le travail de l’opposition, et surtout celui du leader de l’opposition Xavier-Luc Duval qui a révélé le scandale. « Comment une information aussi importante que la différence de prix a-t-elle pu échapper au ministre ? Il est informé tout au long de la procédure. À moins qu’il ne soit pas intéressé », poursuit-il. Enfin, il trouve que ce serait tout à l’honneur de Kailesh Jagutpal de se retirer de ses fonctions le temps de l’enquête.

 

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