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Coronavirus : la crise de confiance

Que n’a-t-on pas entendu ces derniers jours : un cas avéré de nouveau coronavirus à l’hôpital de Souillac ; trois membres d’une même famille décédés en l’espace de quelques jours à Port-Louis ; le gouvernement qui aurait révélé aux ambassadeurs postés à Maurice que les cérémonies entourant la Fête nationale ont été annulées en raison de deux cas avérés mais pas rendus publics. Et que ce ne serait qu’après le 12-Mars que le gouvernement lèverait le voile sur le nombre de cas à Maurice... Tout cela, bien que le ministère de la Santé rassure la population sur une base quotidienne qu’aucun cas de coronavirus n’a été enregistré.

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Cette face macabre des réseaux sociaux a provoqué une crise de confiance au sein de la population. Comme quoi, Maurice ne pourrait pas être parmi les rares pays au monde qui sont encore immunisés contre le coronavirus. Pourtant, on aurait dû s’en réjouir et prier davantage pour que notre île paradisiaque reste protégée. C’est une preuve de la bonne hygiène de vie à Maurice et des mesures appropriées prises par les autorités. En octobre, le journal britannique The Sun relatait que, selon des scientifiques chevronnés, Maurice figure parmi la vingtaine de pays où l’on peut se réfugier contre le coronavirus en cas de pandémie. À présent, les oiseaux de mauvais augure ne se rendent pas compte que la région de Wuhan, en Chine, qui était frappée de plein fouet par le Covid-19, commence, peu à peu, à sortir de l’agonie.

À force de prêter attention aux Fake News, certains risquent fort de développer une paranoïa."

Cette crise de confiance n’est pas ressentie qu’à Maurice, mais à travers le monde, comme l'a fait ressortir Kevin Rudd, l’ancien Premier ministre de l’Australie, le 6 mars 2020 dans « Project Syndicate » : « At present there is a palpable crisis of confidence around the world, in part because of a loss of confidence in national and global leadership. This is reflected in public panic and financial markets’ heightened volatility. » Couplée avec une avalanche de Fake News, hors de contrôle des autorités, cette crise de confiance a fini par générer une contagion de frayeur dans la population. À force de prêter attention aux Fake News, certains risquent fort de développer une paranoïa. Où le coronavirus est un fantôme qui rode dans les neuf districts prêt à sévir à n’importe quel instant. Dès que quelqu’un éternue, ils s’enrhument. Déjà, ils prennent avec des pincettes l’assurance donnée par le ministère de la Santé. Dans ce climat de panique, certains Mauriciens se ruent vers les commerces et les pharmacies pour se constituer un stock, créant ainsi une pénurie artificielle. Mardi, un préposé d’une pharmacie de La Chaussée m’informe que le matin une dame demande à acheter non pas deux ou trois inhalateurs contre l’asthme, mais six au prix de Rs 588 l’unité. Ces personnes ne réalisent pas qu’en faisant cela, elles font grimper les prix de certaines commodités. Le prix des masques N95 est passé de Rs 50 à Rs 250 l’unité. Celui d’une boîte de Surgical Mask de Rs 140 à Rs 700. Cette situation fait le bonheur de certains.

Crise de confiance ou non, il faut être excessivement naïf pour avaler la couleuvre qu’un gouvernement prendra le risque fou de garder secret un cas de coronavirus avéré. Pravind Jugnauth et Kailesh Jugatpal doivent être conscients qu’un cas caché couvre au minimum dix cas. Et c’est presque un acte criminel de ne pas mettre tous les proches de la victime en quarantaine, car ils sont des vecteurs potentiels pour la propagation rapide du virus. En cachant un cas, le gouvernement finirait par en avoir des centaines, voire des milliers, sur les bras. À travers le monde, on joue la transparence car il y va de la santé de toute une nation. À tel point que même les informations concernant les hommes politiques mis en quarantaine ou qui ont attrapé le virus sont rendues publiques.

Qu’on le veuille ou non, il est impossible pour le ministère de la Santé de se taire sur un cas de coronavirus testé positif car l’information sera fuitée, plus vite que ne dégaine Lucky Luke, par le personnel médical et paramédical. Barry Eichengreen, professeur à l’Université de Californie insiste que la confiance du public ne peut être restaurée dans la présente conjoncture que par des gestes de « transparency and accuracy in reporting infections and fatalities. »

Quoi qu’il en soit, ce ne sera pas l’apocalypse si on décèle des cas à Maurice. Le gouvernement, surtout la Santé, a eu suffisamment de temps pour prendre les mesures pour la détection, l’isolement et le traitement. Jim O’Neill, ex-ministre des Finances britannique, a parfaitement raison de dire « the pandemic should alert governments to the need for significantly greater investment in public-health preparedness. »
 

 

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