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Commission d’enquête sur la drogue : les autorités doivent assumer leurs responsabilités

Imran Dhanoo Imran Dhanoo

What’s next après le rapport de la commission d’enquête sur la drogue ? Ce thème a dominé  les débats, samedi, lors de l’émission « Au cœur de l’info », animée par Nawaz Noorbux et Jugdish Joypaul.

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Le directeur du Centre Dr Idrice Goomany, Imran Dhannoo, qui intervenait lors des débats samedi, a trouvé qu’il y a des recommandations dans le rapport Lam Shang Leen, qui pouvaient être mises en œuvre immédiatement. Il a cité, notamment, l’arrêt de la distribution de la méthadone à proximité des postes de police.  « Ce n’est pas recommandable pour une question d’hygiène. Je pense que sur ce plan, le ministère de la Santé peut prendre les dispositions nécessaires assez vite », dit-il. 

Selon Imran Dhannoo, les autorités pénitentiaires devraient prendre des mesures pour mieux contrôler les accès aux prisons. Il a aussi parlé de l’importance de l’institution d’un coordinating body pour contrôler tous les aspects liés à la drogue.    
Répondant à une question de Nawaz Noorbux, le directeur du Centre Dr Idrice Goomany a trouvé intéressant la proposition de la mise sur pied d’un Drug Offenders Administrative Panel greffé sur le modèle portugais.  « Si une telle mesure est appliquée, au lieu de faire de la prison, les consommateurs de drogue passeront devant un comité d’experts en addiction qui élaboreront un programme de traitement taillé sur mesure pour les sortir de l’emprise de la drogue. La prison sera le dernier recours », a-t-il expliqué. 

Imran Dhannoo a dit accueillir favorablement cette recommandation, tout en affirmant qu’il a toujours défendu cette idée, car il considère que les consommateurs de drogue sont malades. « Ils ont besoin de soins appropriés. Leur place n’est pas en prison », a-t-il souligné. 

Selon lui, les autorités devrait instituer un comité dans les plus brefs délais pour se pencher sur la question. Imran Dhannoo a également attiré l’attention sur le fait que plus de 50 % des personnes condamnées pour des délits de drogue sont des consommateurs.  

Concernant la recommandation pour un débat dépassionné sur la  dépénalisation du cannabis, Imran Dhannoo a salué « une grande ouverture d’esprit ». Il a souhaité qu’il y ait des débats à ce sujet.

Toutefois, le directeur du Centre Dr Idrice Goomany ne se prononce pas en faveur du démantèlement de l’Anti Drug and Smuggling Unit (Adsu). Il penche pour une refonte en profondeur de la brigade antidrogue. « Par refonte de l’Adsu, je veux dire une révision de son mode d’opération, de son cahier des charges, de la qualité des officiers qui la composent et de leurs conditions de service », a-t-il fait ressortir.  

Cependant, selon Imran Dhannoo, cette commission d’enquête ne mettra pas un frein au trafic de drogue à Maurice. « Le problème est profond et systémique », a-t-il ajouté. 

Pour lui, la lutte contre le trafic de drogue est un combat national qui doit être soutenu par tout le monde. « Cela relève d’une volonté politique et je pense que le Premier ministre doit donner un signal fort en prenant certaines décisions dans l’immédiat », a-t-il souligné. 

Rajen Narsinghen, Senior Lecturer en droit à l’Université de Maurice, est également  intervenu lors de l’émission. Il a expliqué que les « findings » d’une commission d’enquête n’ont pas de valeur juridique en droit. Toutefois, dit-il, ils peuvent servir de base pour la police, l’Independent Commission against Corruption ( Icac) et la Mauritius Revenue Authority (MRA) pour ouvrir une enquête. Cependant, ces dernières ne peuvent pas se baser sur les conclusions d'une commission d’enquête pour entamer des poursuites contre les personnes citées dans ce rapport. 

Parallèlement, il pense aussi qu’une demande de révision judiciaire pour contester des conclusions d’une commission d’enquête représente un gros risque. Il a expliqué que le but d’une telle demande est de voir si la commission a bien respecté toutes les procédures. « Une demande de révision judiciaire est un couteau à double tranchant, car soit la Cour suprême établit que les procédures n’ont pas été  respectées, ce qui blanchit la personne concernée, soit elle confirme les conclusions de la commission et ainsi la personne se retrouve davantage dans le pétrin », a-t-il indiqué. 

Tout comme le directeur du Centre Idrice Goomany, Rajen Narsinghen a avancé que la police, la MRA et l’Icac pouvaient se baser sur les conclusions de la commission d’enquête pour démarrer une enquête et ensuite envoyer leur rapport au Directeur des poursuites publiques pour d’éventuelles poursuites. 

L’avocat Madan Dulloo, qui a présidé un select committee sur la drogue dans les années 80, a, lui, expliqué que si l’on peut réclamer une révision judiciaire, toutefois aucune action légale ne peut être entamée contre le commissaire et ses assesseurs. Ces derniers jouissent d’une immunité dans l’exercice de leurs fonctions.  

Selon lui, tout comme le rapport de la commission Rault, il y a « beaucoup de faiblesses » dans le rapport Lam Shang Leen.  Il a insisté pour que les procès-verbaux de ce rapport soient publiés. 

Madan Dulloo est d’avis que la mise sur pied d’un comité  ministériel pour  étudier ledit rapport est « une perte de temps ». « Toutes les autorités devront agir aussitôt que le rapport sera publié dans la Government Gazette », a-t-il dit.  Pour conclure, il a émis le souhait que le rapport Lam Shang Leen face l’objet de débats au Parlement.

 

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