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Chiffres déposés à l’Assemblée nationale - Indiscipline à l’école : hausse de 440 % des cas en neuf ans

De nouvelles formes d’indiscipline ont émergé ces neuf dernières années, selon un rapport déposé à l’Assemblée nationale mardi.

L’indiscipline en milieu scolaire est devenue systémique, atteignant des proportions décrites comme étant hors de contrôle par divers pédagogues. Les chiffres sur le sujet déposés à l’Assemblée nationale par le ministère de l’Éducation sont saisissants. 

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Constat édifiant. Ces neuf dernières années, soit de 2015 à 2024, le nombre de cas d’indiscipline en milieu scolaire a subi une hausse spectaculaire. En 2015, le ministère de l’Éducation en a recensé 55 : c’est-à-dire 15 dans les écoles primaires et 40 dans les collèges. En 2024, ce chiffre a été multiplié par plus de cinq, atteignant 297 cas : soit 139 dans les écoles primaires et 158 dans les établissements secondaires. Cela représente une augmentation de 440 %. 

Parmi les cas d’indiscipline les plus fréquents dans le milieu primaire : la violence, qui prédomine avec pas moins de 60 cas enregistrés en 2024, contre seulement huit en 2015. Le deuxième type de comportement indiscipliné le plus fréquent dans les écoles primaires est celui catégorisé comme « comportement perturbateur et irrespectueux ». Pour l’année scolaire en cours, 40 cas ont déjà été enregistrés, alors qu’en 2015, il n’y en avait eu que six. 

Nouvelles formes 

bullyLes chiffres révèlent également l’émergence de nouvelles formes d’indiscipline dans les écoles primaires. En 2015, il n’y avait aucun cas de vandalisme, de destruction de biens scolaires et de comportement inapproprié entre élèves. Cependant, en 2024, deux cas de vandalisme et de destruction de biens scolaires ont été recensés, de même que 10 pour comportement inapproprié. 

Le harcèlement scolaire, communément appelé « bullying », est une autre forme d’indiscipline préoccupante. Bien que ce type de violence ait été quasi inexistant en 2015, il a progressivement augmenté ces neuf dernières années. Les données de 2024 sont alarmantes : 27 cas de harcèlement ont été enregistrés. Cette augmentation significative reflète une tendance inquiétante au sein des écoles primaires, où les comportements violents et irrespectueux se multiplient. 

L’observation est tout aussi alarmante dans les collèges, où les cas d’indiscipline ont presque quadruplé en neuf ans. Les incidents de violence en milieu secondaire sont passés de 40 à 158 entre 2015 et 2024. La forme d’indiscipline la plus courante dans les collèges est le « comportement perturbateur et irrespectueux », avec une augmentation significative, passant de 22 cas en 2015 à 74 en 2024. 

Bullying 

Une croissance phénoménale des cas de violence a également été enregistrée, passant de 11 à 57. De plus, comme observé dans les écoles primaires, les cas de harcèlement (bullying) sont en nette augmentation. En 2015, seulement quatre cas de harcèlement avaient été signalés, contre 17 en 2024. Les comportements inappropriés entre élèves, qui étaient inexistants en 2015, ont commencé à émerger dans les collèges à partir de 2016. Pour 2024, quatre cas de ce type de comportement ont déjà été enregistrés en milieu secondaire.

Cette hausse inquiétante des comportements indisciplinés et violents dans les collèges soulève de sérieuses préoccupations quant à l’efficacité des mesures disciplinaires actuelles et à l’environnement scolaire en général. Pour plusieurs pédagogues, il est clair que des actions plus robustes et une collaboration étroite entre les parents, les enseignants et les autorités éducatives sont nécessaires pour inverser cette tendance. Il est impératif de renforcer les mécanismes de soutien psychologique et d’intervention précoce pour les élèves à risque. 

Mahen Gungapersad, député du Parti travailliste, a initialement soulevé cette question lors de la séance parlementaire de mardi dernier, interpellant la ministre de l’Éducation, Leela Devi Dookun-Lutchoomun. Contacté par la suite, pour commenter les chiffres qui ont été déposés, il a dit ceci : « La situation est alarmante. Rien n’a été fait pour prendre des mesures correctives afin de faire baisser ces chiffres. » 

Il est aussi très critique envers l’absence d’un état des lieux clair, déplorant le fait que le recrutement des Discipline Masters, prévu dans le Budget 2019-20 pour améliorer la discipline scolaire, n’ait toujours pas eu lieu. Autre manquement déploré par le député : le manque de Senior Educators dans les écoles. Selon lui, une de leurs responsabilités est de s’occuper de l’indiscipline dans les écoles. 

« De plus, le nombre de psychologues scolaires a drastiquement diminué, passant d’une trentaine à seulement 22 pour l’ensemble des établissements publics et privés. Cette réduction des effectifs complique davantage la gestion des comportements perturbateurs et l’offre de soutien psychologique aux élèves », fait-il part.

La ministre de l’Éducation, Leela Devi Dookun Lutchoomun a exprimé son désaccord avec les critiques suggérant un manque d’action pour lutter contre ce phénomène. Elle a fait état des mesures prises par son ministère pour aborder le problème d’indiscipline en milieu scolaire (voir encadré). Des mesures peu convaincantes et inefficaces, selon Mahen Gungapersad. 

Selon lui, il suffit de visiter les écoles pour se rendre compte que les structures mentionnées par la ministre ne fonctionnent tout simplement pas. Pour Mahen Gungapersad, l’augmentation des cas d’indiscipline dans les écoles démontre qu’il existe un problème profond qui nécessite avant tout une analyse approfondie et une compréhension du phénomène.

C’est le reflet de la société, selon la ministre de l’Éducation

La ministre de l’Éducation, Leela Devi Dookun-Luchoomun a, de son côté, fait état des mesures prises pour aborder le problème d’indiscipline dans les écoles. Elle a fait ressortir que le ministère dispose d’un service national de conseil et les enseignants sont formés à cet effet. Elle a également souligné que des bureaux de conseil ont été mis sur pied dans les écoles et que des efforts de surveillance sont en cours. Elle a exprimé son désaccord total avec les critiques qui suggèrent un manque d’action contre ce phénomène. « C’est totalement inadéquat de venir affirmer que rien ne fonctionne. Nous savons qu’il y a eu une augmentation du nombre de cas d’indiscipline, mais ceci reflète la société », a-t-elle affirmé à l’Assemblée nationale mardi. 

Basheer Taleb : « Les méthodes traditionnelles ne fonctionnent plus »

Basheer Taleb, manager de la Fédération des managers des collèges privés, a, lui aussi, pris note des chiffres rendus publics par le ministère de l’Éducation. Il ne mâche pas ses mots pour dire sans détour que les cas d’indiscipline dans les écoles « font peur ». 

Pour lui, ces données démontrent un échec total de la stratégie de lutte contre cette problématique. « Les méthodes traditionnelles ne fonctionnent plus. Il faut aujourd’hui adopter une nouvelle approche », dit-il. 

Selon lui, se contenter de renvoyer les enfants accusés d’indiscipline pour quelques jours n’est plus une solution applicable. « Il est grand temps que les autorités fassent preuve de créativité et d’écoute afin de mieux répondre à ce phénomène », estime-t-il. 

Réagissant aux propos de la ministre sur l’existence de bureaux de conseil mis en place dans les établissements scolaires, Basheer Taleb soutient que cette mesure existe uniquement dans les écoles privées et non dans les établissements publics. « En ce qui concerne la disponibilité des psychologues pour le milieu scolaire, c’est également un autre problème. À chaque fois qu’ils sont contactés, ils sont souvent déjà surmenés et ne parviennent pas à prendre en charge tous les cas à temps », explique-t-il.

 

 

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