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Ce que le Finance Bill va changer

Le Finance Bill, qui regroupe les mesures du Budget 2025-26, est débattu à l’Assemblée nationale. Après le discours du Premier ministre et ministre des Finances Navin Ramgoolam, vendredi, le leader de l’opposition Joe Lesjongard s’exprimera ce mardi. Voici les points essentiels pour mieux comprendre ce projet de loi.

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Un Finance Bill transformateur

Le grand oral du ministre des Finances n’est que la partie visible d’un long processus technocratique et politique. Derrière le discours budgétaire, ce sont des mois de concertations, d’arbitrages et de rédaction qui convergent vers une série de documents fondamentaux : les annexes, les projections économiques et surtout, le Finance Bill. Ce dernier, volumineux texte législatif, vient donner force de loi aux mesures annoncées.

Cette année, le Finance Bill 2025, fort de 333 pages, introduit des amendements à près de soixante lois existantes. Ce texte dit « omnibus » est crucial : il traduit juridiquement les engagements budgétaires, notamment en matière fiscale, réglementaire et de gouvernance publique. L’objectif est clair : réorienter le modèle économique mauricien, tout en posant les jalons d’un assainissement durable des finances publiques.

Le Premier ministre et ministre des Finances, Navin Ramgoolam, a posé les fondements d’un tournant stratégique. Lors de la présentation du budget à l’Assemblée nationale, il a défini trois piliers de réforme :

  • Le passage à un modèle économique plus résilient ;
  • La mise en œuvre d’un nouveau pacte social ;
  • Un renforcement de la responsabilité fiscale.

« Le succès de toutes ces mesures dépendra toutefois d’une mise en œuvre rigoureuse et d’une gestion équilibrée entre dépenses sociales et recettes publiques. » Manisha Dookhony, économiste

Dette publique : retour à la réalité

Dans une volonté affichée de transparence, l’exécutif revoit les modalités de calcul de la dette publique (amendements à la Public Debt Management Act). Exit la dette nette comme référence principale ; c’est désormais la dette brute du secteur public qui prévaudra, en cohérence avec les normes du Fonds monétaire international (FMI).

Chiffres-clés :

Mars 2025 : dette brute à Rs 628,4 milliards, soit 90 % du PIB ;

Dette nette : Rs 552 milliards, ratio ramené artificiellement sous les 90 %.

L’objectif ? Ramener ce ratio à 75 % du PIB d’ici juin 2030, puis à 60 % à l’horizon 2035, seuil jugé soutenable pour une petite économie insulaire.

En parallèle, l’État entend limiter ses engagements en matière de garanties publiques accordées aux entreprises d’État. Désormais, toute garantie devra tenir compte des plafonds d’endettement et respecter une logique de discipline budgétaire.

« Cette nouvelle politique encouragera une discipline budgétaire plus stricte, une meilleure transparence et une gestion plus prudente de la dette publique. Des objectifs clairs sont fixés pour réduire la dette afin de garantir la pérennité des finances publiques. Mais un ajustement fiscal rigoureux sera nécessaire, avec des excédents primaires soutenus dans le temps et un contrôle strict des dépenses publiques. On observe d’ailleurs une baisse notable de certaines dépenses publiques. Ce redressement pourrait être accompagné par une croissance du PIB. Une amélioration de la confiance des investisseurs pourrait soutenir cette croissance, notamment grâce à une meilleure notation souveraine, ce qui réduirait le coût des emprunts. »
Manisha Dookhony

Revenus en devises et fiscalité ciblée

Parmi les mesures phares du Finance Bill figure l’introduction d’un paiement partiel des impôts en devises. Les entreprises réalisant plus de 50 % de leurs revenus en devises seront tenues de s’acquitter d’une part de leurs impôts en monnaie étrangère, à l’exception des banques pour leurs transactions avec des résidents mauriciens (et non-offshore).

« Cela devrait augmenter les recettes publiques en devises et faciliter le remboursement de la dette externe. » Manisha Dookhony

Réforme des retraites : entre besoin de soutenabilité et tensions sociales

La réforme de la pension universelle est sans conteste la mesure la plus controversée. À partir du 1er septembre 2025, l’âge d’éligibilité sera progressivement relevé jusqu’à 65 ans, contre 60 ans aujourd’hui.

Le gouvernement a tenté d’atténuer l’impact avec une allocation transitoire de Rs 10 000 pour les plus vulnérables, mais la colère populaire s’est exprimée à travers des manifestations et même une grève de la faim.

La gouvernement campe sur ses positions : le système actuel, dans un contexte de vieillissement démographique, est intenable à long terme.

Riches, rentables et taxés

La Fair Share Contribution a été maintenue. Au-delà de Rs 12 millions de revenus imposables, une taxe additionnelle de 15 % s’ajoute aux 20 % initiaux. Cette mesure s’applique pour trois années financières, jusqu’en 2027-28. Les dividendes payés par des sociétés offshores à des non-résidents, de même que les lump sums ne seront pas impactés.

Les entreprises dégageant plus de Rs 24 millions de bénéfices devront également s’acquitter d’un prélèvement additionnel de 2 à 5 %, selon certains critères. L’État prévoit ainsi de générer Rs 63,44 milliards de recettes issues de l’impôt sur le revenu et les profits en 2025-26, soit une hausse de 31 % par rapport à l’exercice précédent.

Allocations sociales : vers un recentrage ciblé

Selon le Premier ministre, l’ancien gouvernement aurait prévu une suppression brutale des allocations CSG. L’actuel exécutif opte pour une extinction progressive sur deux exercices budgétaires. Les personnes inscrites au Social Register of Mauritius continueront de percevoir leur aide. Deux économistes du FMI, Mariana Colacelli et Felix Simione, saluent cette approche plus ciblée : « Les économies générées permettront de financer des dispositifs plus ciblés pour les plus vulnérables, rendant la politique budgétaire plus soutenable. »

Mise à exécution

Après l’adoption en troisième lecture, les mesures entreront en vigueur avec l’assentiment du président de la République, selon les dispositions de l’article 66 du Finance Act. Certaines mesures seront rétroactives, comme l’ajustement des salaires des Junior Ministers (alignement dès novembre 2024 sur ceux des PPS), tandis que d’autres – comme le relèvement de l’âge de la pension – entreront en vigueur le 1er septembre.

À consulter, la Government Gazette pour suivre l’application des différentes clauses du Finance Act.

 

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