Interview

Yuvan A. Beejadhur : «Nous avons besoin de soutien pour construire des ports de pêche modernes»

Yuvan A. Beejadhur

La signature d’un accord de pêche avec le Japon est un pas dans la bonne direction pour Maurice dans ses ambitions de faire de l’économie bleue un pilier économique du pays. Tel est l’avis de Yuvan A. Beejadhur, spécialiste des ressources naturelles et économiste. Entretien.

Publicité

Maurice compte concrétiser la signature d’un accord de pêche avec le Japon. Est-ce une bonne chose ?
Nous devrions nous féliciter de la coopération avec d’autres acteurs internationaux puissants tels que le Japon, à condition que nous puissions garantir dans tout futur accord une protection totale des espèces en voie de disparition. Nous avons besoin de soutien pour construire des ports de pêche modernes, faire en sorte que nos pêcheurs participent aux opérations de ces grands bateaux, bénéficier des pêches groupées et de la transformation du poisson, et bien sur des expertises, de la formation et des ressources. Nous devons faire preuve de prudence dans notre diplomatie, nous assurer que nos accords soient gérables, lorsque de grandes puissances se font concurrence sur nos ressources.

Croyez-vous que l’économie bleue peut jouer un rôle essentiel dans la transformation structurelle de l’Afrique ?
L’économie océanique représente déjà une activité de 24 000 milliards de dollars mondialement, créant de la nutrition, de l’emploi et des services pour des millions d’Africains. Mais elle perd aussi parce que les investissements sont encore faibles, en raison des risques liés à des secteurs complexes tels que les énergies renouvelables, l’aquaculture, le tourisme, les ports et le transport maritime. L’Afrique mérite sa propre « renaissance bleue » avec plus d’emplois, d’innovation et de la recherche. Elle a besoin d’un encadrement fort qui permettra à diviser les bénéfices équitablement, à réduire la pauvreté pour générations à venir. Par conséquent, elle doit placer le capital naturel et un programme humain au cœur de son développement. Les aménagements des espaces maritimes restent essentiels. Selon les estimations sur Maurice, il faudrait environ 580 millions de dollars d’investissements par an (et entre 15 et 18 ans) pour doubler la partie actuelle de l’économie océanique (environ 12 %) à 25 %.

Comment Maurice peut-elle assurer la protection de nos ressources marines ?
Je doute que nous comprenions la valeur des océans. À l’instar du carbone, nous devrions commencer à mettre un prix, une valeur sur les océans pour que tous les plastiques ou les bourgeons de cigarettes qui s’y trouvent, ou les écoulements agricoles, pétroliers ou même les hôtels payent leurs frais. C’est un problème économique pas juste écologique. Le lagon de Maurice doit être réhabilité avec au moins 25 millions de dollars d’investissements. Nous avons également besoin d’une stratégie de protection financière contre les catastrophes climatiques qui, à l’heure actuelle, constituent un obstacle majeur à la construction d’une économie bleue mauricienne de demain.

Pensez-vous qu’il y a un manque d’intérêt de la part du ministère pour promouvoir ce secteur ?
L’océan est « everybody’s business ». Le ministère a besoin d’un vrai leadership du plus haut, et de l’expertise. Un bateau pour commencer.

Que doit faire l’État mauricien pour faire fructifier ce secteur?
Ma vision pour une « Maurice bleue », c’est de devenir un laboratoire haut de gamme pour la recherche dans l’énergie des vagues, la construction navale et des services, la promotion des espèces haut de gamme, un tourisme écologique. On doit savoir ce que renferment nos océans et nos limites: plus de ressources à la Mauritius Oceanographic Institute, allons regarder ce qu’il y a dans les profondeurs, construisons des bases de données et travaillons avec les États voisins. Il faut identifier les meilleures innovations qui fonctionneraient pour Maurice, les connecter aux marchés internationaux et aux investisseurs, en plaçant toujours la durabilité au centre

 

Notre service WhatsApp. Vous êtes témoins d`un événement d`actualité ou d`une scène insolite? Envoyez-nous vos photos ou vidéos sur le 5 259 82 00 !