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Maurice sous la menace d’une flambée du cours du pétrole

À 19 h 30 le jeudi 1er décembre, le baril de pétrole s’échangeait à USD 50,82, selon Bloomberg.

Depuis que l’Opep et la Russie ont annoncé qu’elles allaient baisser le niveau de production de pétrole dès le début de 2017, le cours de l’or noir est en hausse. Quelles en seront les conséquences pour Maurice ?

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L’économie mauricienne se retrouve sur une pente glissante. Glissante parce que les pays producteurs de pétrole y ont jeté de l’huile dans l’après-midi du mercredi 30 novembre. Leur décision unanime de réduire la production quotidienne a donné des ailes au cours du pétrole. Et Maurice, en tant qu’importateur net, ne peut que se préparer à une hausse dans les semaines à venir.

Le monde assiste donc à une forte remontée du cours du pétrole en cette fin d’année. À 19 h 30, jeudi 1er décembre, le baril de pétrole s’échangeait à USD 50,82 selon l’agence de données financières Bloomberg. Et il est même question que le cours atteigne les USD 60, soit plus du double qu’en janvier.

Le cours a grimpé pour le deuxième jour de suite après que l’Organisation des pays exportateurs de pétrole (Opep – voir hors texte) a annoncé que ses membres baisseront le niveau de production à partir du 1er janvier 2017. C’est une première depuis 2008. La Russie, autre pays producteur, s’est alignée sur cette position.

« On ne peut venir affirmer que les prix flambent sur le marché mondial. C’est une réaction naturelle à une décision de l’Opep qui était en gestation depuis longtemps. Elle s’est matérialisée mercredi », a déclaré Rajanah Dhaliah, directeur-général de la State Trading Corporation (STC).

Price Stabilisation Account

Pourquoi l’Opep a-t-elle décidé de réduire sa production quotidienne de 1,2 million de barils par jour ? Parce que depuis 2014, le prix a chuté à un niveau insoutenable pour les pays producteurs, allant de l’Arabie saoudite au Nigéria. Ces pays dépendent des recettes du pétrole pour alimenter les fonds de leur trésorerie publique. Et toute baisse a poussé ces économies à assister, de manière impuissante, à une détérioration de leurs finances.

Qui plus est, les puissances économiques comme les États-Unis ont accumulé des réserves conséquentes de produits pétroliers. Avec un maintien de la production à un présent niveau, le prix, quoique sur l’ascendance, n’aurait pas atteint un seuil qui aurait été favorable aux pays producteurs. En contenant le flot dans un contexte de demande en hausse, les prix grimpent.

Et Maurice dans tout cela ?  Le pays et sa population de 1,3 million sont des importateurs nets d’essence, de diesel et d’huile lourde. Un réajustement des prix aura des effets négatifs sur l’économie (voir hors texte). Maurice, par l’intermédiaire de la STC, paie le prix du marché. Ces derniers mois, on a assisté à une remontée. Après une révision du mécanisme opérationnel du Petroleum Pricing Committee (PPC), un Price Stabilisation Account a été constitué.

Maintenir le prix

Le Price Stabilisation Account représente des réserves qui servent à empêcher toute majoration immédiate de prix, suivant la tendance à la hausse dans le monde. Par exemple, en octobre 2016, le pays a accusé réception de deux cargaisons d’essence. Pour le premier, la STC a dû puiser Rs 55 millions du Price Stabilisation Account pour garder le prix tel quel (voir tableau). Le même mois, pour la seconde cargaison, le montant pour stabiliser le prix a été de Rs 85 millions.

« Je ne m’attends pas à une hausse des prix à la prochaine réunion du PPC. Il y a toujours de l’argent dans le Price Stabilisation Account. Nous nous en servons pour maintenir le prix à son niveau actuel. C’est clair que la tendance à la hausse sur le marché mondial se maintient. Et le prix actuel ne pourra être maintenu éternellement, a fait ressortir Rajanah Dhaliah. Il y aura une réunion du PPC en décembre afin de prendre connaissance des derniers développements. On aura une indication plus précise de la marche à suivre. »

Évolution des prix sur trois ans

Date Essence Diesel
5 novembre 2016 Rs 38,85 Rs 29,50
4 février 2016 Rs 38,85 Rs 29,50
14 novembre 2015 Rs 41,35 Rs 32,75
5 septembre 2015 Rs 45,95 Rs 35,50
13 août 2015 Rs 45,95 Rs 37,80
6 décembre 2014 Rs 45,95 Rs 37,80
21 novembre 2014 Rs 47,90 Rs 39,45
7 novembre 2014 Rs 50,15 Rs 41,90
4 juillet 2014 Rs 52,25 Rs 43,95

(Source : State Trading Corporation)

La mainmise sur 81 % des réserves mondiales

Créée en septembre 1960, l’Organisation des pays exportateurs de pétrole (Opep) est une instance intergouvernementale de 14 pays. Ces États-membres sont : l’Algérie, l’Angola, l’Équateur, le Gabon, l’Indonésie, l’Iran, l’Iraq, le Koweït, la Libye, le Nigéria, le Qatar, l’Arabie saoudite, les Émirats arabes unis et le Venezuela.

La mission de l’organisation est très précise : « Coordonner les politiques pétrolières de ses membres et stabiliser les prix du pétrole afin d’assurer un approvisionnement économique et régulier aux consommateurs, des revenus stables aux producteurs et un retour équitable de l’investissement aux investisseurs du secteur. »

Comment se fait-il que ce groupe ait un impact sur le cours du pétrole et l’économie mondiale ? C’est simple : les 14 pays contrôlent 81 % des réserves mondiales en pétrole, les cinq principaux étant le Venezuela, l’Arabie saoudite, l’Iran, l’Iraq et le Koweït. Et selon l’agence de données financières Bloomberg, ils contrôlent 40 % de la production quotidienne.


Arvind Nilmadhub, économiste : «Vers un réajustement des prix à Maurice»

Arvind Nilmadhub« Avec une hausse du cours sur le plan mondial et une certaine stabilisation, on devrait assister à un réajustement des prix à Maurice. Nous n’avons aucun autre choix. L’impact ne s’arrête pas à la pompe, dont le quantum reste à être déterminé par le Petroleum Pricing Committee. Le Central Electricity Board – utilisant l’huile lourde pour produire de l’énergie – réajustera ses tarifs afin de ne pas se retrouver dans le rouge. Le coût du fret augmentera. Les produits importés reviendront à plus cher pour le consommateur. La récente flambée devrait inspirer le gouvernement à accélérer le processus d’utilisation d’énergies renouvelables tant pour l’électricité que pour les voitures. »

Suttyhudeo Tengur, président de l’Apec : «Des conséquences désastreuses en vue»

Suttyhudeo Tengur« C’était un scénario écrit d’avance. L’Opep baisse sa production. Le cours mondial flambe. La State Trading Corporation et l’État ont un choix à faire. Relayer cette hausse aux consommateurs sera désastreux pour le pays. Le consommateur a déjà un pouvoir d’achat assez restreint. L’économie, qui opère déjà en-dessous de son potentiel, ralentirait davantage et les acteurs économiques, dont les petites et moyennes entreprises, seront les plus affectés. Mais les décideurs ont une possibilité de maintenir le prix à son niveau actuel. Il suffirait que l’État arrête avec cette pratique d’utiliser les produits pétroliers comme source de financement pour divers projets tant à Maurice qu’à Rodrigues. En éliminant certains prélèvements, le consommateur paiera le même prix. »

 

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