Economie

Marché de l’emploi: ces jeunes pris dans l’engrenage des contrats de travail éphémères

C’est un phénomène qui prend de l’ampleur ! Un nombre croissant de jeunes sont contraints de travailler sur contrat à durée déterminée. Un système qui serait plus démotivant qu’encourageant. Deux jeunes témoignent !

Vimi, 28 ans, ‘supply teacher’: « Je vis dans l’incertitude »

À 28 ans, Vimi, qui a toujours voulu être enseignante, n’aspire qu’à une seule chose : devenir un employé permanent. Et plus les jours passent, plus elle y croit moins à « son rêve ». Il faut dire qu’en quatre ans, elle a travaillé dans quatre établissements du secondaire. « Après avoir obtenu ma licence en français, j’ai travaillé comme ‘supply teacher’ dans un collège privé de la capitale. J’y ai travaillé pendant deux trimestres quand la direction m’a informée que mes services n’étaient plus requis », indique Vimi, qui s’est retrouvée, par la suite, au chômage pendant une année. Elle obtient finalement un poste de remplaçante dans un collège privée à Curepipe. « C’était seulement pour le troisième trimestre. Je devais remplacer une enseignante qui était partie en congé maternité. J’ai, par la suite, exercé dans une école à l’Ouest pendant moins d’une année et je travaille depuis le mois de janvier dans un collège privé dans un village dans l’Est », relate-t-elle. Pour chacun de ses postes, Vimi a dû signer un contrat. « C’est un contrat pour ‘casual employment’, en d’autres mots, on fait appel à ses services que pendant une période déterminée », nous indique le syndicaliste Reeaz Chuttoo. Un système de travail qui exaspère Vimi tout comme ses autres collègues ‘supply teachers’. « Chaque début d’année, je reste tout près du téléphone en espérant qu’on m’appelle pour un emploi. Je vis dans l’incertitude et je ne peux pas me projeter dans l’avenir », avance-t-elle. D’ailleurs, Vimi n’entreprends aucun projet. « Je n’achète d’ailleurs rien à crédit de peur de ne pouvoir rien rembourser. D’ailleurs, même si je voulais prendre un prêt ou acheter à crédit, je ne le pourrais pas car je ne reçois pas de fiche de paie », explique-t-elle.

Sophie, 25 ans, employée de banque: « Mes temps de service ne sont pas comptabilisés »

Sophie, 25 ans, fait actuellement un « break ». Non pas parce qu’elle l’a voulu, mais parce qu’on lui a imposé. « Cela fait deux ans que je travaille dans une banque. Comme mon deuxième contrat (Ndlr : le premier contrat a duré 11 mois) est arrivé à terme, on m’a imposé un ‘contract break’ d’un mois et c’est par la suite qu’il sera renouvelé », indique-t-elle. Avec un tel système, le temps de service de Sophie au sein de la compagnie n’est pas comptabilisé. « Si j’ai droit à mes Local et Sick Leaves, je dois, toutefois, tout recommencer à zéro. Je n’ai également pas droit au ‘performance bonus’ ni à une assurance médicale comme ceux qui sont employés sur une base permanente », déplore la jeune femme. Pour Sophie, cette pratique est « injuste ». « Il y a un sentiment de deux poids deux mesures. Nous travaillons tout aussi dur voire même plus que les employés permanents, mais notre salaire est de 30 à 40 % inférieur aux leurs », déplore-t-elle. Cette situation l’a démotive de plus en plus. « Je n’arrête pas d’envoyer ma lettre de candidature en vue d’obtenir un poste dans une autre banque. Psychologiquement, ce système de travail nous fatigue. On aurait été beaucoup plus motivé si le contrat était à plus long terme et si nous bénéficions des mêmes avantages que les personnes travaillant sur une base permanente », fait-elle ressortir. Et de conclure : « Les gens qui travaillent sur contrat à durée déterminée ont plus de difficulté à obtenir des prêts. Il aurait fallu que les banques et autres institutions financières puissent revoir leur stratégie afin d’accorder des prêts à ces gens afin qu’ils puissent réaliser leurs projets. »
  • NOTE : Les noms utilisés sont fictifs.

 

Ce qu’ils en pensent

  • Reeaz Chuttoo, syndicaliste : « De plus en plus d’employeurs dans le privé y compris le gouvernement avec le cas Airmate et les supply teachers adoptent le CDD. Ce qui amène à une dégradation qualitative de l’emploi. »
  • Jane Raggoo, syndicaliste : « Le CDD est bénéfique pour les employeurs dans la mesure où ils n’ont pas à s’acquitter des charges sociales de l’employé ni à lui payer un boni. C’est une pratique très présente dans l’enseignement, la construction, les centres d’appels, entre autres. C’est pourquoi nous recommandons des clauses de protection pour les employés qui travaillent sous ce type de contrat. »
  • Khemil Gobin, directeur d’Edge Consulting : « L’importance d’avoir un contrat c’est que toutes les conditions ainsi que le montant de salaire y sont spécifiés. Ces contrats sont écrits sous des provisions légales et les employeurs ne peuvent donc pas aller à l’encontre de la loi. L’avantage avec le CDD ce que la personne sait jusqu’à quand on aura besoin de ses services. Il y a donc une certaine flexibilité. Ce n’est pas une mauvaise chose en soi dans la mesure où le monde du travail évolue et où les employés bougent constamment. Il y a de moins en moins de gens qui demeurent dans un emploi jusqu’à l’âge de la retraite. »

Les contrats de travail les plus communs

  1. Contrat à durée indéterminée (CDI). C’est le contrat de travail le plus répandu passé entre l’employeur et l’employé où il n’y a aucune limitation de durée.
  2. Contrat à durée déterminée (CDD). C’est le contrat où la durée de travail est fixée. Arrivé à échéance, le contrat peut être renouvelé ou pas.
  3. Contrat individuel. « C’est un contrat où l’employé négocie ses conditions de travail. C’est un ‘one-to-one contract’ qui concerne bien souvent ceux qui touchent un salaire de plus de Rs 30 000 », indique le syndicaliste Reeaz Chuttoo.
  4. D’autres types de contrats. « Il y a des contrats de travail, dit précaires où l’employeur a le contrôle absolu sur l’employé. À titre d’exemple, il y a des cadres administratifs qui touchent un ‘package’ global. S’ils font des heures supplémentaires, ils ne reçoivent rien en retour », déplore le syndicaliste. Il y a aussi des contrats pour des gens qui travaillent de chez eux ou qui travaillent à temps partiel.

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