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Lutte contre la drogue - Lauthan : «Il faut une collaboration à tous les niveaux»

Me Raj Pentiah et Sam Lauthan.

L’émission « Au Cœur de l’Info » sur Radio Plus avait pour thème, le mercredi 8 février, « Le combat contre la drogue : quel est le rôle de nos institutions ? ». Le cas de Jean Hubert Celerine, alias Franklin, arrêté mardi par l’Independent Commission against Corruption ( Icac) a été aussi mis en avant lors de l’émission animée par Jane Lutchmaya et Anoop Dhookeeya. 

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Sam Lauthan, ancien assesseur de la Commission d’enquête sur la drogue, et Raj Pentiah, ancien magistrat, ont chacun livré leurs observations sur le fonctionnement des institutions. « La lutte contre la mafia est un combat inégal. Pour le bon fonctionnement de nos institutions, il faut une collaboration à tous les niveaux. Il faudra se réinventer », dira l’ancien assesseur de la Commission d’enquête sur la drogue, présidée par l’ancien juge Paul Lam Shang Leen. 

« Nounn dir reget bann kriter sa bann dimounn ki a latet prizon, lapolis, sa bann institision. Bizin bann spesialis dan sa bann domenn-la », a expliqué Sam Lauthan. « Nou kondane kolabore. Pa kapav get ego. Pa kav klwazonn problem ladrog. Bizin get o nivo la fami, ban program skoler, mem bann institision religiez », a-t-il  poursuivi. « J’ai appris que 92 des recommandations n’ont pas encore été implémentées à la suite des travaux de la Commission d’enquête sur la drogue. Cela reste des lacunes auxquelles il faut remédier », estime Sam Lauthan. 

« Des choses à revoir »

Raj Pentiah, ancien magistrat et homme de loi, dit avoir été surpris par l’affaire Franklin. « Il y a beaucoup de choses à revoir concernant nos institutions et nos lois. Le cas Jean Hubert Celerine, alias Franklin, est frappant. La Mutual Legal Assistance existe juste pour les pays du Commonwealth uniquement, ce qu’il n’y a pas avec La Réunion », lâche Raj Pentiah. Il remet en doute l’approche adoptée par l’Icac au sujet de ce jeune entrepreneur de Rivière-Noire. « Inn dir depi 2016 pe ‘keep an eye’ lor li, selman pena nanie de ‘suspicious’ ». Selon l’Icac, Franklin était considéré comme suspicieux mais n’avait pas de « predicate offense ».  

Le leader de l’opposition Xavier-Luc Duval est intervenu au cours de l’émission. Il a d’abord commenté la conférence de presse de l’Attorney General, Maneesh Gobin, sur l’affaire Franklin. Pour lui, il faut à nos institutions leurs lettres de noblesse. « Lapolis, l’Icac, kan erode perdi tou drwa. Kan institision fayir, ena koripsion, kriminalite, ladrog » a-t-il  fait ressortir. 
« Le gouvernement a mis en exergue qu’il y avait environ Rs 15 Md de drogue saisies depuis 2015. Me komie inn pass a traver ? Pour cela, aucun chiffre n’est communiqué. Notre démocratie est en danger. Il faut être impitoyable contre les trafiquants », a souligné le leader de l’opposition.  

Pour Raj Pentiah, il ne faut pas se laisser impressionner par les chiffres et les arrestations liés au combat contre la drogue. Il est confiant que les institutions peuvent fonctionner mieux. « Zot kapav fer boukou plis ki sa. Pa vinn kasiett deryer bann konfidansialite. Bizin rasir la popilasion. Ce qui pourrait amener plus de confiance dans ces institutions », est-il d’avis. 

Sam Lauthan a aussi fait ressortir que le « Protection Money » dans les gangs est un mal bien présent. « Li enn realite. Kan nou finn anket dan bann prizon, nou finn trouv sa. Ena enn ‘High Level Officer’ kinn explike kouma sa deroule. Apre ena l’Omerta (loi du silence). Bizin redouble zefor. Si kapav fer bann mama ki zanfan finn fer overdoz vinn koz ek sa bann dirizan-la », explique le travailleur social. Me Lovania Pertab, présidente de Transparency Mauritius, est aussi intervenue durant l’émission.

Réseaux bien rodés    

Les subterfuges des trafiquants pour planquer leur argent

Avec les événements de ces derniers jours, les différents moyens utilisés par les trafiquants de drogue refont surface. Voici quelques méthodes couramment employées pour blanchir de l’argent sale.

Prête-noms

Les prête-noms sont couramment utilisés pour blanchir de l’argent sale. Dans la pratique, explique un officier de la brigade antidrogue (Adsu), les trafiquants approchent des individus de confiance (ils n’ont normalement aucun lien de parenté ces personnes) en leur proposant d’ouvrir un business où tout est visiblement en règle avec les autorités. « Bizness-la marse ou pa marse, larzan sal la pou rantre ek pou blansi », indique-t-on. Cette pratique a d’ailleurs été soulevée dans le rapport de la Commission d’enquête sur la drogue présidée par l’ancien juge Paul Lam Shang Leen. Selon des renseignements, certains fast-foods opérant dans la capitale et dans l’ouest du pays sont fortement soupçonnés comme étant utilisés pour blanchir de l’argent.

Transfert de fonds

Autre ruse employée par les trafiquants de drogue : le transfert d’argent (en livres sterling ou en dollars) sur des comptes à l’étranger ou encore l’acquisition de biens immobiliers dans certains pays. Cela, fait-on comprendre, s’explique par leurs fréquents déplacements à l’étranger. Le paiement des biens immobiliers se fait en cash uniquement afin de ne pas éveiller des soupçons. Ces mafieux ont aussi tendance à effectuer des transactions de plus de Rs 500 000 en cash, que ce soit pour l’acquisition de véhicules ou d’autres biens immobiliers sur le sol mauricien. Cela profite aux commerçants, car ces derniers échappent au paiement de la taxe.

Tickets gagnants

Les trafiquants de drogue sont également friands de tickets gagnants. « Ils ont tendance à approcher des heureux veinards en proposant le rachat de leurs tickets gagnants contre de fortes sommes d’argent. Le jackpot est ensuite empoché par le trafiquant de drogue. En d’autres mots, c’est lui qui a été chanceux aux jeux de hasard », avance un officier de l’Adsu. Cette pratique est couramment employée dans certains casinos et autres maisons de jeu à travers le pays, mais également durant la saison hippique. « Cela s’explique par le fait que certains trafiquants de drogue sont propriétaires de chevaux », indique-t-on.

Ally Lazer : « Les maîtresses des trafiquants et leurs enfants utilisés comme prête-noms »

Le président de l’Association des Travailleurs Sociaux de l’île Maurice, Ally Lazer, demande à la police de suivre les traces de l’argent et de dévoiler toutes les ruses employées par les trafiquants de drogue pour blanchir leur argent sale. « Il y a beaucoup de complices qui acceptent d’utiliser leurs noms afin de blanchir l’argent des trafiquants de drogue. Je dispose de renseignements que les maîtresses des trafiquants et les enfants de ces maîtresses sont utilisés comme prête-noms. Je demande à la police de suivre ces traces », dit le travailleur social.

Trahis par leur train de vie grandiose

Des hauts gradés basés au quartier général de la brigade antidrogue se disent au courant des multiples ruses employées par les trafiquants pour blanchir leur argent sale. « Les trafiquants de drogue sont toujours trahis par leur train de vie grandiose », souligne-t-on.

 

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