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Les vétérinaires malgaches demandent aux autorités mauriciennes de les reconnaître

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La polémique autour de la reconnaissance des vétérinaires malgaches à Maurice suscite des discussions sur le plan technique, administratif et diplomatique. Ce débat est né d’une déclaration du ministre de l’Agro-industrie, Arvin Boolell, lors d’un atelier à Ébène.

Tout a commencé lors de l’atelier sur le partenariat public-privé des services vétérinaires, organisé du 14 au 17 octobre à Ébène. À cette occasion, le ministre Arvin Boolell a plaidé pour une approche plus inclusive et ouverte dans le domaine vétérinaire. 

Le ministre, dans une déclaration, a lancé un appel à « ne pas faire preuve de discrimination » envers les vétérinaires malgaches, affirmant qu’ils « méritent une inscription provisoire, puis permanente au registre vétérinaire ». Cette déclaration a immédiatement provoqué des réactions dans le milieu professionnel.

Registre vétérinaire

Le président du Veterinary Council of Mauritius, le Dr Radhakrishna Veerapa, a rappelé le cadre réglementaire en vigueur, précisant que la profession vétérinaire à Maurice est régie par la Veterinary Council Act 2020. Cette loi définit les critères d’agrément et impose un contrôle préalable des diplômes avant toute autorisation d’exercer. 

Le Dr Veerapa a indiqué que seuls les praticiens enregistrés peuvent pratiquer sur le territoire mauricien. Il a toutefois reconnu la participation de plusieurs vétérinaires malgaches à certaines campagnes de stérilisation menées sur l’île, mais en dehors du cadre formel d’enregistrement, donc sans statut légalement défini. 

Le ministre Boolell, pour sa part, a maintenu sa position en faveur d’une reconnaissance plus souple et d’une ouverture accrue, estimant qu’il est temps de « faire évoluer » les pratiques et de dépasser les résistances administratives. Il a soutenu que la coopération régionale doit primer, tout en rappelant que Maurice et Madagascar partagent une longue histoire d’échanges techniques et sanitaires fructueux.

Ces propos ont cependant pris une tournure diplomatique. Le 23 octobre, l’ambassade de Madagascar à Maurice a publié un communiqué exprimant « sa vive indignation » face à certains commentaires jugés offensants envers les professionnels malgaches. Dans ce texte, l’ambassade appelle à « la fin immédiate de toute forme de dénigrement » et insiste sur la nécessité de préserver un climat de respect mutuel entre les deux pays. 

Coopération

Elle souligne que les relations entre Maurice et Madagascar reposent depuis longtemps sur une coopération solide, notamment dans les domaines techniques et sanitaires. L’ambassade, dirigée par Albert Camille Vital, rappelle aussi la compétence reconnue des vétérinaires malgaches, citant leur engagement constant, y compris durant les crises épizootiques qui ont affecté la région. Le communiqué conclut sur un appel au dialogue et à la modération, invitant les deux parties à régler leurs différends dans un esprit constructif et fraternel.

Cette controverse a pris une dimension supplémentaire le vendredi 24 octobre avec la correspondance officielle du président du Conseil national de l’Ordre national des docteurs vétérinaires de Madagascar, Josoa Rakotosamimanana, adressée au ministre Arvin Boolell. 

Dans cette lettre, le président de l’Ordre exprime ses inquiétudes face à l’évolution du débat et tient à rappeler que les vétérinaires malgaches exerçant à Maurice sont pleinement conformes aux exigences déontologiques et réglementaires de la profession. Selon lui, leurs qualifications académiques proviennent d’établissements publics reconnus et accrédités par les autorités compétentes.

La lettre des vétérinaires  malgaches.
La lettre des vétérinaires  malgaches. 

Diplômes

Le président Josoa Rakotosamimanana précise que ces diplômes sont délivrés par la Faculté de médecine vétérinaire de l’Université d’Antananarivo, par l’École inter-État de sciences et de médecine vétérinaire de Dakar au Sénégal, ainsi que par la Faculté de médecine vétérinaire de Kiev en Ukraine. Ces établissements, selon la correspondance, répondent aux standards internationaux de formation et sont reconnus pour la qualité de leur enseignement. Le président de l’Ordre malgache insiste également sur la dimension de confiance et de coopération historique entre les deux pays.

Dans sa lettre, Josoa Rakotosamimanana rappelle l’aide apportée par les autorités malgaches à Maurice en 2016, lorsqu’une équipe de dix vétérinaires avait été envoyée pour prêter main-forte aux services mauriciens dans la lutte contre la fièvre aphteuse. Cette collaboration, écrit-il, illustre la solidarité et la coopération exemplaire entre les deux nations dans le domaine de la santé animale. Il invite donc les autorités mauriciennes à résoudre rapidement tout différend administratif afin de permettre aux vétérinaires malgaches de travailler sereinement sur le territoire mauricien, dans un esprit de coopération et de respect mutuel.

Selon les données disponibles, quinze vétérinaires malgaches travaillent actuellement à Maurice, dont deux au sein de la Mauritius Society for Animal Welfare. Leur contribution est considérée comme essentielle, notamment dans les campagnes de stérilisation et dans la prise en charge du bien-être animal. Leur présence, au fil des années, a permis de renforcer certaines missions publiques et de pallier le manque de praticiens disponibles sur le plan local.

Échanges

Cette situation s’inscrit dans une tradition de collaboration ancienne entre Maurice et Madagascar. Outre la mission de 2016 pour combattre la fièvre aphteuse, plusieurs projets conjoints ont été menés dans le domaine de la santé animale, des échanges vétérinaires et de la prévention des maladies zoonotiques. Ces partenariats, jusque-là exemplaires, n’avaient jamais été remis en question. La controverse actuelle repose donc moins sur les compétences des vétérinaires concernés que sur la question de leur reconnaissance administrative et de leur enregistrement officiel au registre mauricien.

Pour les autorités mauriciennes, la position reste claire : toute autorisation d’exercer doit être encadrée par la loi, et le respect des procédures est une garantie pour la transparence et la sécurité du public. Pour Madagascar, il s’agit avant tout de faire valoir la légitimité de ses organismes de formation et de défendre la réputation de ses diplômés. Les deux approches ne sont pas nécessairement opposées, mais elles traduisent deux priorités différentes : la rigueur réglementaire d’un côté, la reconnaissance mutuelle des compétences de l’autre.

Le ministère de l’Agro-industrie n’a pas encore annoncé de décision formelle concernant l’intégration des vétérinaires étrangers au registre national. Le dialogue reste ouvert, et plusieurs échanges techniques devraient avoir lieu entre les deux parties. Du côté du Veterinary Council of Mauritius, aucune réaction supplémentaire n’a été enregistrée depuis la publication de la lettre du président malgache, mais des discussions internes sont en cours pour examiner les implications de cette correspondance.

Reconnaissance

Cette polémique, bien qu’ancrée dans un cadre strictement professionnel, met en lumière un enjeu plus large : celui de la reconnaissance des qualifications au sein de la région. Sans cadre commun entre les pays de l’océan Indien, chaque État conserve ses propres exigences, ce qui complique la mobilité des professionnels, y compris dans des domaines sensibles comme la santé animale.

Malgré ces divergences, le ton demeure mesuré de part et d’autre. L’ambassade de Madagascar, dans son communiqué, comme l’Ordre national des docteurs vétérinaires dans sa lettre ont tous deux privilégié la voie du dialogue et de la coopération. Du côté mauricien, le ministre Arvin Boolell a réaffirmé sa volonté d’avancer dans un esprit d’ouverture tout en respectant les exigences de qualité et de conformité légale.

Et les praticiens malgaches souhaitent continuer à exercer leur métier dans un cadre serein, fondé sur la reconnaissance, la transparence et la compréhension mutuelle.

 

 

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