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Les quatre défis majeurs de la gestion des déchets

Le volume des déchets devient inquiétant.

Une production de déchets en hausse, une décharge qui arrive à saturation, l’indisponibilité de nouvelles infrastructures ou encore un taux de recyclage faible. Ce sont là autant de défis auxquels doivent faire face les autorités aujourd’hui en matière de gestion des déchets.

La quantité de déchets générés a connu une hausse importante au cours de ces dix dernières années. De 399 488 tonnes en 2008, ce chiffre est passé à 543 196 tonnes en 2018, soit une hausse de plus de 35% (voir détails plus loin). Les déchets ménagers comptaient pour plus de 95% de la totalité des déchets produits. 

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Il s’agit là uniquement des déchets qui ont été acheminés vers Mare Chicose, la seule décharge du pays et ne tient pas en compte les déchets qui, par exemple, ont fini dans la nature ou qui ont été exportés (environ 5 000 tonnes en 2017).  La gestion des déchets demeure donc un défi de taille pour l’État qui dépense environ Rs 1,2 milliard par an sous cet item. Selon notre enquête auprès des autorités concernées, en sus de ce poids financier, les autorités font face aujourd’hui à quatre défis majeurs :

1. Production de déchets en hausse. Le pays a produit plus de 543 196 tonnes de déchets en 2018. Un chiffre en hausse constante au cours de ces 10 dernières années de l’ordre de 3,1% annuellement. Les raisons imputées à cette tendance sont la croissance économique, l’urbanisation, de meilleures conditions de vie et la manière de consommer de la population. Ainsi, avec une moyenne de 1 488 tonnes de déchets produits quotidiennement, cela revient à environ 415 kilos de déchets par tête d’habitant annuellement. 

2. Mare Chicose saturée. L’unique décharge du pays, située à Mare Chicose dans le sud du pays, arrivera à saturation et ne sera donc plus en mesure d’accommoder davantage de déchets d’ici mai 2020, si jusque-là rien n’est fait.  

3. Manque de terrain. L’indisponibilité de terrains est une autre contrainte majeure avec laquelle les autorités doivent composer. Il s’avère que les mesures prises jusqu’ici en vue de trouver un terrain pour en faire une décharge se sont soldées par des échecs. Les propriétaires, selon nos informations, préfèrent de loin les développements fonciers, qui rapportent beaucoup plus, que d’en faire une décharge.  

4. Faible taux de recyclage. Moins de 10%. C’est le pourcentage de déchets produits annuellement qui sont recyclés. Or, selon les autorités, quelque 80% des déchets produits sont potentiellement recyclables. D’ailleurs, 60% des déchets sont de nature organique. Le coût de transformation, jugé élevé, en serait une des causes de ce faible taux de recyclage.  

Hausse de 35% en 10 ans
De 2008 à 2018, la quantité de déchets disposée à la décharge de Mare Chicose annuellement est passée de 399 488 tonnes à 543 196  tonnes. Ce qui représente une hausse de plus de 35%.
2008 399,488
2009 415,948
2010 427,802
2011 414,543
2012 387,926
2013 429,935
2014 417,478
2015 448,476
2016 444,695
2017 482,196
2018 543 196

Des solutions à court et moyen termes

Pour faire face aux défis mentionnés ci-dessus, plusieurs options sont à l’étude au ministère de l’Environnement. L’une d’elles,  comprend la mise sur pied d’un projet pilote dans deux régions de l’Île, lesquelles ont déjà été identifiées. L’une se trouve dans l’Ouest et l’autre dans le sud du pays. Il s’agit, en fait, de la deuxième phase d’une étude commanditée par le ministère de l’Environnement (voir détails plus loin). « Cette étude de faisabilité débutera en août prochain. En somme, le projet consistera à encourager la population de ces deux régions à faire le tri de leurs déchets. Toutes les facilités nécessaires leur seront accordées », explique un haut cadre à l’Environnement. 

Dans un premier temps, 25% de la population de ces deux régions seront ciblées. « Ces déchets seront acheminés vers une Material Recovery Facility qui comprendra une usine de compost pour les déchets organiques, une Sorting Unit pour les matériaux recyclables et un Civic Amenity Centre pour les déchets ménagers dangereux, les huiles usées, les bulky waste et les matériaux de construction», précise notre interlocuteur.

Les recycleurs (pour les produits tels que papiers, verres, produits électroniques, plastiques, textiles, piles, pneus, etc.) pourront ainsi s’y approvisionner. « Cela permettra à ces recycleurs d’obtenir des matières non contaminées et en quantité, deux de leurs soucis majeurs. Ils pourront, de ce fait, diminuer leur coût de transformation et ce sera économiquement plus intéressant pour eux », poursuit-il. 

L’entreposage vertical. Il s’agit d’une autre solution faisant l’objet d’études au ministère de l’Environnement. En fait, une étude de faisabilité est en cours afin d’évaluer, entre autres, les implications, les risques techniques et les coûts liés à ce projet. Il est prévu que ce projet soit concrétisé d’ici 2020, coïncidant ainsi avec la période à laquelle la décharge de Mare Chicose devrait arriver à saturation. « Un avantage majeur avec ce projet, c’est qu’il ne nécessitera pas de gros investissements. C’est une pratique qui se fait déjà aux États-Unis, en Inde, en Belgique, etc. Donc, ce n’est pas nouveau. De plus, les autorités ont déjà procédé au relogement des habitants aux alentours », précise notre interlocuteur. 

Redevance incitative : Baisse de 30% à 50% de la masse des déchets

Malgré tous les efforts des autorités pour une gestion efficace des déchets, tout le monde s’accorde à dire qu’il faut un changement dans la mentalité des citoyens vis-à-vis des déchets. « Les campagnes d’éducation et de sensibilisation à elles seules ne sont plus suffisantes. Il faut peut-être aussi penser à des mesures dissuasives », suggère le Chief Executive d’une collectivité locale. Un des moyens proposés est la redevance incitative qui facture les ordures au poids. « Cette pratique a permis, là où elle a été appliquée, de réduire la masse de déchets produite par foyer de 30 à 50 %. Il faudrait, par la même occasion, l’appliquer  aux entreprises qui disposent de leurs déchets sans avoir, jusqu'ici, aucun frais à payer », dit-il

Scrap Yard. La mise sur pied d’une casse pour les véhicules en fin de vie ou les véhicules accidentés (total loss) est actuellement à l’étude. Le consultant, souligne notre interlocuteur, a d’ailleurs déjà été choisi à l’issue d’un exercice d’appel d’offres. « Il n’y a actuellement aucune facilité pour le démantèlement de ces véhicules de manière adaptée, sachant que ces véhicules sont composés de matières dangereuses. Il faut donc les dépolluer dans une casse. Où, comment et par qui ? C’est ce que devra venir déterminer le consultant », ajoute le haut cadre. 

Déchets de construction. Un appel d’offres en vue de trouver un consultant pour la disposition des déchets de constructions sera incessamment lancé. C’est ce que nous indique une source au ministère de l’Environnement. L’idée, souligne-t-elle, est d’aménager la station de transfert de La Chaumière afin de pouvoir accommoder ces déchets, surtout ceux qui peuvent être réutilisés, notamment les « blocks » pour effectuer des remplissages, etc. « Il y a une concasseuse à proximité qui pourrait être aussi utilisée », fait-elle ressortir.  


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Incinérateur : « Pas dans l’immédiat »

Le recours à un incinérateur ne serait pas une option envisageable dans l’immédiat dans le cadre de la gestion des déchets. C’est ce que nous indique un cadre du ministère de l’Environnement. « Il faut, au préalable, exploiter toutes les alternatives possibles telles que le recours à une nouvelle décharge ou le recyclage. Aussi, il y a de nombreux facteurs à prendre en considération dans la mise en opération d’un incinérateur, tels que le site qui doit être éloigné des habitations, la direction du vent, etc. Sans compter que ce n’est pas évident de brûler des déchets composés à 60% de matières organiques avec un taux d’humidité très élevé », souligne-t-il.

17 000 tonnes de déchets dangereux

Quelque 17 000 tonnes de déchets dangereux sont générées à Maurice annuellement. Parmi, des produits chimiques de laboratoire ou industriel, de peinture, de pesticides, des déchets pharmaceutiques, aérosol, piles, amiante, huile usée, des produits électriques et électroniques. 10% de ces produits ne peuvent être traités localement. Le ministère de l’Environnement a ainsi mis sur pied une plateforme à la station de transfert de La Chaumière pour tester, trier, regrouper, empaqueter, libeller, entreposer et exporter.


Un plan d’action sur 5 ans élaboré

Afin de réduire la dépendance sur le seul centre d’enfouissement que compte le pays et promouvoir une économie circulaire durable, le Ministère de l’Environnement a commandité une étude pour le développement d’une stratégie et d’un plan d’action dans le cadre de la gestion des déchets. Une étude menée par le consultant Ecorem/Luxconsult Ltd et financée par l’Agence française de développement (AFD). Un plan d’action sur cinq ans a ainsi été élaboré, dont les stratégies reposent sur les cinq axes suivants : Primo, la minimisation de l’impact des déchets en réduisant la quantité produits. Secundo, la récupération des ressources qui peuvent être réutilisées. Tertio, la transformation des déchets en énergie. Quarto, l’optimisation de la décharge de Mare Chicose tout en convoitant la possibilité de trouver de nouvelles infrastructures. Et quinto, à travers des campagnes d’information, d’éducation et de communication.

 Traitement de déchets à Riche-Terre : EIA/PER Monitoring Committee examine le dossier 

Les habitants et députés de Riche-terre ne veulent pas d’un incinérateur. Leurs colères sont dirigées vers la firme Veolia. Toutefois, le dernier mot reviendra au comité EIA/PER du ministère de l’Environnement. 
Le suspense est maintenu. Veolia sera fixé sur son sort lorsque l’EIA/PER Monitoring Committee du ministère de l’Environnement aura donné son avis. La compagnie est suspendue à la décision du comité. Toutefois, l’exécutif parlementaire s’est déjà prononcé sur le sujet. Or, c’est le comité qui va statuer sur le contentieux sauf si le gouvernement fait valoir son droit d’émettre des nouveaux règlements sur les incinérateurs, explique une source du ministère de l’Environnement. 

Le dossier Environmental Impact Assessment de la compagnie est devant le comité depuis une semaine. La source du ministère nous explique que malgré le désaccord exprimé par des parlementaires, le comité fonctionne en toute indépendance. La source nous fait comprendre que la compagnie a effectué une demande selon les procédures et que le dossier sera traité de façon "légale et sans préjugé"".  

Traitement d’hydrocarbure

Le 30 juin dernier, le ministre du Travail Soodesh Callichurn et le Parliamentary Private Secretary, Sharvanand Ramkaun ont manifesté à Riche-Terre contre le projet d’incinérateur. Le même jour, le Défi Media Group devait obtenir, d’un des proches du Bureau du Premier ministre, que Pravind Jugnauth serait contre le projet. Il avait, même, évoqué un « pull-out order » contre le promoteur. 

Pour le promoteur, en l’occurrence Veolia, il n’est pas question de construction d'un incinérateur à Riche-Terre. Son projet pour lequel il a obtenu un permis ne concerne que le traitement d’hydrocarbure. La direction de la firme l’a confirmé à travers une série de communiqués. Le dernier a été émis lundi le 1er juillet. Dans une correspondance, le Chief executive officer (CEO) de Veolia, Patrice Wadley nous explique qu’il y a trois phases dans le recyclage des déchets d’hydrocarbures qui sont composés de sédiments, d’eau et d’une partie huileuse. La partie huileuse est revalorisée et vendue en tant que fioul lourd ou gazole pour les navires. Les sédiments sont traités sur la plateforme de traitement des terres, alors que l’eau passe par l’unité de traitement pour être dépolluée avant d’être envoyée vers un centre d’assainissement. « L’incinération ne fait à aucun moment partie de ce procédé ». soutient Patrice Wadley. 

Pour ce dernier, il y a une "mauvaise interprétation" des intentions de la firme. « Notre dossier EIA a pour but de donner une vision d’ensemble des potentialités des technologies que nous pouvons mettre en œuvre pour le traitement de plusieurs types de déchets. Cependant, nos activités se feront conformément à l’Investment Certificate que nous a remis les autorités et qui porte uniquement sur le traitement et la revalorisation des déchets d’hydrocarbures ».   

hydrocarbures

 

 

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