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Journée internationale pour l’élimination de la violence à l’égard des femmes : Zoom sur des formes de brutalité moins connues

La violence domestique est celle qui est la plus connue. Cependant, d’autres femmes souffrent en silence sous d’autres formes. À l’occasion de cette Journée internationale, nous mettons en lumière quelques-unes…

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Le ministère de l’Égalité des Genres a annoncé une série d’activités et de programmes à l’occasion de la Journée internationale pour l’élimination de la violence à l’égard des femmes. Encore une fois, la sensibilisation autour de la violence domestique est primordiale. Le nombre de cas ne cesse d’augmenter et les autorités se doivent d’être vigilantes pour éviter que la situation ne s’empire.

La ministre, Fazila Jeewa-Daureeawoo explique, entre autres, qu’il est important d’avoir des peines plus sévères pour condamner les auteurs de violence envers les femmes. Elle s’attarde également sur la prévention pour aider à éliminer toute la violence envers la gente féminine.  « Il faut un changement de mentalité surtout en ce qui concerne la femme, sur ce qu’elle est, ses qualités et le besoin de la respecter. Il faut commencer à éduquer nos enfants dès leur plus jeune âge. Ils doivent grandir avec des valeurs importantes dont le traitement que l’on accorde à nos filles comme nos garçons. Les enfants apprennent de nos gestes quotidiens et retiennent le langage et le comportement que nous avons envers eux. »

La ministre ajoute que les autorités constatent que plus de femmes connaissent désormais leurs droits et choisissent de ne pas souffrir en silence. « Nous avons une panoplie de services pour les renseigner et les protéger et elles n’ont plus peur de venir de l’avant pour dénoncer. »

Perpetrators Programme – Réhabiliter les auteurs de violence

Le ministère de l’Égalité des Genres a décidé de mettre sur pied divers programmes pour les auteurs de violence. « Nous avons sollicité l’expertise australienne pour démarrer le ‘Perpetrators programme’ qui vise à proposer différents programmes de réhabilitation aux auteurs de violence. Il est important de les écouter, de les comprendre et de les aider car une personne qui est violente est peut être une personne malade qui cache une souffrance, bref, c’est quelqu’un qui a besoin d’aide. De plus, nous finalisons l’ouverture du centre intitulé ‘Integrated Support Centre’ où nous offrirons plus de services aux personnes victimes de violence domestique. Nous travaillons également avec les autorités concernées sur la diminution du temps d’attente pour l’attention d’un ‘Interim Protection Order’. C’est inacceptable qu’une femme qui vient chercher de l’aide doit attendre autant de temps pour obtenir une protection.  Il faut aussi penser aux enfants qui sont autant traumatisés par ces situations de violence. »

D’autre part, la société civile souhaite tirer la sonnette d’alarme sur ces autres cas de violence dont on parle moins. À l’instar de Hansheela Goinden-Seeven, membre de la ‘Henrietta New Hope Association’, qui est d’avis qu’on ne parle pas assez des violences sociales. « Souvent, les femmes sont victimes de ce genre de violences : on vise à l’isoler, on l’empêche de travailler, de recevoir des ressources, on lui interdit de parler à certaines personnes, de sortir, on le dénigre auprès des proches et amis de la famille... D’autres violences qui ne sont pas caractérisées sont les violences religieuses ou culturelles. C’est surtout quand les conjoints sont de religions différentes et que l’épouse souffre de ne pouvoir observer sa religion. »


Le dur combat de femmes étrangères sur le sol mauricien

Il n’y a pas de quoi s’alarmer diront certains. Mais Quincy Hollingsworth, volontaire au sein d’une ONG, a rencontré bon nombre de ces femmes qui ont très peur de dénoncer à haute voix les violences qu’elles subissent sur le sol mauricien.  « Bien sûr, l’histoire commence par une belle rencontre où deux tourtereaux décident par la suite de venir à Maurice pour y vivre. Puis, certaines se retrouvent seules après une séparation. Elles n’ont pas de proches ici, peu ou pas d’amis, elles ne connaissent ni les lois ni les procédures et c’est difficile pour elles de rentrer chez elles. » Elle ajoute que dans certains cas, elles sont en quelque sorte prisonnières à Maurice. « Au moment de demander le divorce par exemple, il y a le problème de garde d’enfants. Le mari objecte au départ des enfants dans le pays natal de son ex-femme. Ainsi cette dernière est obligée de rester sur le sol mauricien à cause des enfants. » Étant au courant de  ces difficultés, la jeune femme explique que malheureusement de nombreux maris utilisent tout cela comme chantage et un moyen de pression et se montrent violents envers ces femmes sans défense à Maurice.


Parinata Shilpa Gujadhur : «Sauvons nos enfants du mariage précoce !»

Parinata Shilpa GujadhurCela fait un bon bout de temps que la question de mariage précoce fait couler beaucoup d’encre à Maurice. Parinata Shilpa, fondatrice de l’International Indian Welfare Association, estime que le mariage précoce, hormis tous les problèmes qui y sont reliés, est aussi une source de violence envers les femmes dont souvent de jeunes enfants incapables de se défendre, de prendre de bonnes décisions et de se protéger. « Le mariage des enfants est un «CRIME» qui a été accepté et agréé comme pratique dans le passé. Le peuple d’aujourd’hui a évolué et ne peut continuer à suivre des croyances aveuglément. Les livres et les écrits religieux rendent ce débat plus complexe. »

Elle ajoute qu’il est important de protéger avant tout nos enfants. Or, un enfant est considéré comme tel jusqu’à l’âge de 18 ans. On ne devrait pas permettre le mariage avant 18 ans. D’abord, parce que les filles n’ont pas toutes les aptitudes nécessaires  qui pourraient les amener à prendre des décisions complexes. De plus, exposées à des situations de violence, elles sont bien plus vulnérables.  Elle est d’avis qu’il faut conscientiser les parents pour que ces deniers ne donnent plus leur accord et bénédiction pour ces mariages. Ils ont une responsabilité : celle de protéger leurs enfants et de les guider.

« En tant que citoyen mauricien, je voudrais adresser une modeste requête aux autorités pour qu’elles adoptent des lois strictes et protègent les âmes innocentes des séquelles psychologiques à vie. »

Prisheela Motee, présidente et fondatrice de l’association ‘Raise Brave Girls’ (RBG) est aussi d’avis que parmi les cas non signalés et les formes de violence moins connues, nous avons la question des mariages d’enfants qui sont liés à des traumatismes physiques, sexuels et psychologiques. « La place de l’enfant est à l’école et non emprisonnée dans le mariage. Nous devons mettre en lumière le fait que l’article 145 du Code civil mauricien prévoit que les enfants de 16 à 18 ans peuvent se marier avec le consentement de leurs parents. L’association RBG soutient que ledit article devrait être abrogé dans l’intérêt de la fille », soutient-elle.

« RBG a observé que les barrières culturelles peuvent être considérées comme une forme invisible de violence dans une structure patriarcale. L’enfant fille est dans certaine culture considérée comme un fardeau et une responsabilité. Certains parents ne pensent qu’à marier leur fille à un âge nubile au lieu d’investir dans sa carrière et son avenir. Les barrières culturelles ouvrent les portes aux mariages d’enfants. C’est une forme de violence invisible qui a un impact psychologique sur la fille, ce qui entraîne un manque de confiance en soi dans la plupart des cas et crée ainsi des obstacles pour que la fille aille de l’avant dans la vie et réalise son rêve. La culture doit accorder des droits égaux aux deux sexes au lieu de créer des discriminations.


Le calvaire des femmes SDF

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S’il y a des femmes qui sont victimes de violence tous les jours, ce sont bien celles qui dorment chaque soir dans un endroit public. Lindy Florent d’Un Abri pour Elles, explique que le nombre de femmes SDF ne cesse d’augmenter et qu’il faut en parler. « Tant que nous continuerons à pratiquer la politique de l’autruche, nous nous retrouverons avec d’autres fléaux et des problèmes de société. L’errance féminine n’est pas assez connue à Maurice et malheureusement, nous avons tendance à banaliser les situations de violence que rencontrent ces femmes dans la rue au quotidien. C’est une violation des droits humains : elles sont privées de logement, de nourriture, de vêtements, d’argent, de nourriture et j’en passe. Certaines d’entres elles se font agresser et violer dans la rue et d’autres doivent accepter des propositions indécentes rien que pour se faire héberger. » Elle est d’avis qu’il faut une politique de logement à long terme et la mise sur pied d’un projet national pour aider ces femmes et leurs enfants.


Les violences gynécologiques

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Pourquoi en parler ? Les violences gynécologiques font partie du processus de la grossesse et de l’accouchement pour certains. Ainsi, il ne faut rien dire, juste accepter que c’est comme ça, répondent la majorité de femmes. Lilette Moutou, travailleuse sociale, explique qu’il est malheureux de constater qu’aujourd’hui de nombreuses femmes ne font pas d’examens et des suivis gynécologiques à cause des traumatismes qu’elles ont subi pendant la grossesse et le jour de  l’accouchement.

Parmi les témoignages que nous avons recueillis, on peut lire : « Au lieu de nous expliquer clairement ce qui se passe, le médecin et ceux qui l’assistent de temps en temps se parlent en anglais, croyant que nous ne comprenons pas et cela nous inquiète davantage. »« On me crie dessus, j’ai pleuré et ils se sont moqués de moi, ils m’ont dit qu’ils devaient m’examiner, j’ai demandé si j’aurais mal et là on m’a dit ‘Pa pli dimal ki kan ou ti fer li’. » « Le langage utilisé est traumatisant, il n’y a aucune empathie, on ne comprend pas ce qui se passe, on a l’impression d’être dans un abattoir. » « Ils ont mis leurs doigts chacun à leur tour, cela faisait partie de leur apprentissage, personne n’a demandé mon consentement ou si cela me dérangeait de me retrouver sans culotte et les pieds relevés devant huit étudiants en médecine qui devaient chacun m’examiner. »

Elle estime qu’il faut en parler pour sensibiliser le milieu hospitalier sur l’impact de telles pratiques sur les femmes. « Le nombre de femmes qui gardent une expérience traumatisante de leur grossesse, est effrayant. »

 

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