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Jean-Claude de l’Estrac : «Que la force policière reflète la composition de notre société multiethnique»

Est-ce que de nos jours une manifestation fait bouger les choses en provoquant une réaction du gouvernement ? 
Cela peut arriver. En général, une manifestation est l’expression d’une urgence, elle incite le pouvoir à une réaction. Dans certains cas, la question est même posée de savoir si la violence paie. Cette question est débattue dans la presse française suite aux manifestations violentes du mouvement des Gilets jaunes qui ont provoqué un recul du gouvernement.

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À Maurice, où tout est surpolitisé, la réaction du gouvernement est double : il est d’abord dans le déni de la gravité de la crise sociale et il est ensuite dans la désignation d’un coupable politique. Mais je note un infléchissement dans les discours puisque les ministres commencent à expliquer que des mesures de soutien aux familles en difficulté sont à l’étude. Pour ma part, j’ai proposé la réintroduction d’un « Cost of Living Allowance » (COLA) pour les plus vulnérables.

Le gouvernement est dans le déni de la gravité de la crise sociale."

Quelle comparaison peut-on faire avec les incidents de 1999 ?
Aucune. Les ministres ont fait cette comparaison pour accréditer la thèse d’une manipulation politique par les mêmes instigateurs. Dans l’affaire Kaya, il s’agissait d’une manifestation de colère et de l’expression spontanée d’une vive émotion. C’était une émeute – j’allais dire ordinaire – mais mal gérée par la police.

Cela dit, il y a un problème fondamental qu’il faudra bien régler, faute de quoi la situation pourrait s’aggraver. Il est absolument indispensable dans une société multiethnique que sa force policière reflète sa composition. Le déséquilibre actuel est une des causes de sa difficulté à se faire respecter dans certains points chauds du pays. C’est un problème grave, il faut arrêter se fermer les yeux.

Est-ce que les Avengers tentent de combler un vide laissé par la classe politique et le monde syndical ? 
Il n’y a pas de vide politique, il y a une crise de leadership. Si l’on se fie aux résultats des dernières législatives, une majorité de Mauriciens n’a pas soutenu ce gouvernement. Mais cette majorité disparate, politiquement divisée, peine à présenter un front uni et à proposer une stratégie cohérente. Tant que la question de leadership de l’opposition ne sera pas réglée d’une manière qu’elle parait  représenter une offre crédible d’alternance politique,  Pravind Jugnauth peut dormir tranquille. J’ai l’ai dit maintes fois : notre système de gouvernement est quasi présidentiel. La posture de collectif présentée par l’Alliance de l’Espoir est nécessaire, mais insuffisante pour remporter l’adhésion de l’électorat. Il faut un chef !

 

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