Le faible taux d’intérêt bancaire est une des raisons qui pousse les Mauriciens à se tourner vers des produits financiers aux retours plus élevés, explique Imrith Ramtohul. Dans cet entretien, le ‘Senior Investment Consultant’ chez Aon Hewitt Ltd commente les derniers cas d’arnaques financières décriées par la Banque de Maurice et la Financial Services Commission.
[blockquote]« Les Mauriciens ne font plus confiance aveuglément même si la compagnie où ils investissent a une solide réputation. Désormais, ils posent plus de questions. »[/blockquote]
Après les épisodes de Sunkai, de WhiteDot et, plus récemment de l’affaire BAI, nous avons une nouvelle fois affaire à des compagnies nottamment la Commercial Exchange Bank et la SBMA Investment, dont les activités sont nébuleuses. Est-ce l’envers du développement du secteur financier ?
Maurice n’est pas le seul pays à faire face à ce phénomène. On a des cas similaires aux États-Unis ou encore en Inde. Il faudra s’attendre à enregistrer d’autres cas d’arnaques financières à l’avenir. D’où la nécessité que les régulateurs soient très vigilants et veillent à ce que les compagnies aient les permis nécessaires et opèrent en toute transparence.
Comment mieux protéger la population contre les arnaques financières, notamment les plans de type Ponzi ?
L’éducation financière est un moyen de protéger les particuliers contre les arnaques. Or, il y a un manque à ce niveau. Il faudrait aussi que l’investisseur soit lucide. Par exemple, il doit se demander si le retour qui lui est proposé sur son investissement n’est pas trop beau pour être vrai. Et aussi savoir où la compagnie place ses investissements.
Comment les régulateurs – la Banque de Maurice et la Financial Services Commission – peuvent-ils renforcer leur système de surveillance ?
Les régulateurs doivent encourager les ‘whistleblowers’ à les prévenir pour tout cas d’activité louche. Il faudrait aussi qu’ils cherchent l’assistance d’autres pays à ce niveau, tout en adoptant les moyens les plus efficaces utilisés à l’étranger pour renforcer leur système de surveillance.
Faut-il renforcer le cadre légal pour mieux combattre les crimes financiers ?
La loi est assez claire à ce niveau. Il faudra plus miser sur l’éducation financière. Toutefois, il faudra à l’avenir amender la loi quand on retrouvera sur le marché des produits financiers plus compliqués.
Vous êtes parmi ceux qui pensent que les Mauriciens ne sont pas suffisamment éduqués financièrement. D’où le fait qu’ils se laissent parfois séduire par des sociétés financières proposant des retours sur investissement déraisonnablement élevés…
En effet ! Une des raisons qui explique cette situation est que le taux d’intérêt bancaire est assez faible. À titre d’exemple, le taux pratiqué sur un dépôt fixe n’est aujourd’hui plus aussi incitatif qu’il y a dix ans. Les gens se laissent donc tentés par des produits aux retours plus alléchants.
Dans quelle mesure les faibles taux d’intérêt à l’épargne – autour de 2,60 % – et la volatilité de la Bourse de Maurice ces deux dernières années ont-ils favorisé ce type d’arnaques ?
Le retour sur la Bourse a été négatif et le taux d’intérêt bancaire reste faible. Il y a donc un intérêt de la part des investisseurs pour des compagnies qui proposent des investissements avec des retours plus intéressants. Toutefois, c’est moins facile, aujourd’hui, pour les compagnies dont les activités sont louches d’attirer les investisseurs. Ces derniers sont beaucoup plus avertis.
Après les nombreux cas d’arnaques financières que le pays a connues ces dernières années, est-ce que les Mauriciens sont-ils aujourd’hui prudents avant d’investir leur argent ?
Oui. On note définitivement une certaine prudence. Ils ne font plus confiance aveuglément même si la compagnie où ils investissent a une solide réputation. Désormais, ils posent plus de questions.
Notez-vous un retour vers les modes d’investissement traditionnels ?
C’est difficile à dire en cette période, car il prévaut actuellement une situation de ‘wait and see’. Les gens attendent la présentation du Budget avant d’investir. Ce n’est qu’après cet exercice qu’on saura la réelle tendance.
Dans ce contexte de volatilité du marché boursier quelles sont les compagnies cotées qui attirent les particuliers ?
Il y a les banques, certains hôtels et conglomérats ainsi que des groupes sucriers. Le fait que le ‘dividend yield’ du marché boursier tourne autour de 4 % soit plus élevé que le taux d’épargne bancaire peut intéresser les investisseurs.
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