Taux de réussite et qualité des résultats en baisse. Directeurs et pédagogues réclament une étude afin d’améliorer les résultats du School Certificate et le niveau du primaire. Pourtant, les récents résultats du HSC ont montré que certains collèges, loin d'être des Stars Colleges, pouvaient fabriquer des lauréats.
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Pas plus de 4 000 candidats sur 10 990 ont obtenu quatre à cinq Credits aux derniers examens du School Certificate. Pour la cuvée 2018, le nombre de Credits requis pour accéder en Higher School Certificate est de quatre. Ce qui inquiète responsables et syndicats des établissements scolaires.
Les directeurs des collèges privés tirent la sonnette d’alarme. Si cette tendance se maintient, certains établissements secondaires du privé seront contraints de fermer leurs portes dans quelques années. Qui plus est, plus de la moitié des candidats se retrouveront hors du circuit secondaire après le School Certificate et ne pourront compléter leur Higher School Certificate.
Des experts étrangers à la rescousse
Pour Ramparsad Mungar, le taux réel de réussite pour le School Certificate tournerait autour de 44 %. Afin de rehausser la qualité des résultats, la Managers of Private Secondary School Union a fait appel à des experts étrangers. « Nous allons nous-mêmes financer l'arrivée des experts. Pour le moment, nous allons solliciter l'expertise des Singapouriens ou des Indiens. Ce sont des pays qui ont rencontré le même problème que nous et qui ont pu le régler. Nous devons apprendre d'eux. »
Ramparsad Mungar est d'avis que l'obtention de cinq Credits pour accéder en HSC ne joue pas en faveur des élèves moyens. Cette mesure, selon lui, ne permet pas aux élèves faibles de passer le cap des études secondaires, cruciales pour avancer dans la vie. « L'éducation doit aider un élève à progresser dans la vie de façon intelligente. Ce n'est pas une question de passer un examen, ou de trouver un travail mais de faire de lui un bon citoyen. »
Pour sa part, Bashir Thaleb de la Fédération des managers des collèges privés, pense qu’une étude en profondeur du problème est hautement recommandée. « Les élèves ont des difficultés à obtenir des Credits depuis des années. Ce n'est pas un communiqué du ministère requérant quatre Credits qui va changer la situation. La preuve en est les résultats obtenus cette année. Pour améliorer la situation, tout est à revoir. Il faudra revoir la méthode d'enseignement. »
Il admet toutefois qu'un élève ayant récolté le moins de Credits mais qui accède quand même au HSC éprouve plus de difficultés à réussir aux examens du HSC. « En tant que pédagogue, je constate cela. Un élève avec trois Credits peine à réussir à ses examens, avec la formule des trois matières principales, une matière subsidiaire et le General Paper qui est obligatoire. Ça pose un problème. Il faut revoir la formule. Il est sans doute plus approprié pour les candidats qui aspirent à être lauréats d'opter pour trois matières principales. Il ne faut pas avoir la même formule pour tous les élèves. »
Bashir Thaleb compte ainsi adresser une requête au ministère de l’Éducation pour permettre à ceux qui n’ont pu obtenir les quatre Credits requis de compléter un A Level. « Nous allons demander au gouvernement de permettre aux candidats qui n'ont pas décroché les quatre Credits de faire un A Level au lieu d'un HSC. Ainsi, certains pourront obtenir 3 A Levels qui assureront leur entrée à l'université. »
Pour Roshan Boodna, président de la Government Secondary School Teachers' Union, en revanche, réduire le nombre de Credits offre plus de chances aux élèves, certes, mais cela constituera un nivellement par le bas. « Le ministère doit proposer un programme pour sensibiliser les élèves à la nécessité d'obtenir un nombre idéal de Credits. C'est ce qui provoque un mismatch sur le marché du travail. Même les élèves ont un choix limité de matières lors de leur entrée en HSC. Certains se retrouvent même à faire des matières qu'ils n'ont pas étudiées en SC. »
Le pédagogue Fezal Jeerooburkhan constate, pour sa part, qu'une faible connaissance de la langue anglaise est un obstacle au rehaussement du niveau des résultats. « La majorité des questionnaires pour les examens est rédigée en anglais. Il faut rehausser le niveau en langue anglaise. Beaucoup d'élèves ne parviennent pas à s'exprimer en anglais et à répondre aux questions correctement. Une bonne connaissance de cette langue est fondamentale pour améliorer le niveau des résultats, que ce soit en SC ou en HSC. »
Selon Fezal Jeerooburkhan, la filière technique peut bien convenir à ceux qui ne parviennent pas à obtenir de bons résultats. « Je ne crois pas que le HSC soit la meilleure option pour les élèves moins capables académiquement. Je pense qu'une filière technique après le SC leur serait plus bénéfique. »
Comment expliquer cette baisse de niveau en SC ? Tous s’accordent à dire que le travail, qu'il soit pédagogique ou académique, ne se fait pas comme il se doit, au primaire.
Ces collèges qui ont trouvé la bonne recette
La proclamation des lauréats, lundi dernier, a eu l’effet d’une bombe. Et pour cause, certains collèges se sont démarqués au-delà de toute espérance. Des collèges qui sont loin d'être des Stars Colleges ont vu briller chez eux des lauréats. Ce qui contraste avec la faible performance de certains établissements chaque année.
La grande surprise est venue du collège d'État de Triolet. Luciano Azor fait la fierté de ce collège et de sa localité, la Résidence Mère Teresa, d'où il est issu. Vivant dans une famille très modeste, Luciano Azor avouera lui-même avoir été un slow learner au primaire mais que la détermination et la volonté lui ont permis de se hisser parmi les lauréats de la cuvée 2017.
La rectrice du State Secondary School (SSS) de Triolet, Yashwantee Jeetoo, souhaite que Luciano Azor devienne un role model pour les autres élèves. « C'est un garçon très structuré, avec des leadership skills. » Selon Yashwantee Jeetoo, les activités extracurriculaires jouent un rôle important pour le développement intellectuel d'un élève. « Luciano est un élève qui a représenté l'école lors de nombreuses compétitions extracurriculaires. Il nous a ramené des prix. Il est même parti aux États-Unis pour représenter le collège et Maurice. » Et de soutenir que les besoins des enfants sont pris en considération, surtout ceux issus d'un milieu familial difficile.
À Triolet toujours, SSS Lady Sushil s'est aussi distingué avec une lauréate, tout comme SSS James Burty David, le MGI et le collège John Kennedy.
Une première pour Rodrigues cette année. Un nom qui a retenu l'attention, celui d'Emma Perrine du Rodrigues College. Elle a raflé une bourse au plan national pour la cuvée 2017 dans la filière Économie, alors que le collège de Maréchal a pour la première fois produit un lauréat.
Les collèges Lorette de Quatre-Bornes et de Port-Louis font leur retour dans cette prestigieuse liste avec une boursière chacun. Le collège du Saint-Esprit, pour sa part, a produit deux lauréats.
Performance également remarquée du SSS Droopnath Ramphul. Cet établissement de Calebasses qui a produit trois lauréates confirme qu'il est désormais dans la cour des grands.
La réforme est-elle la solution ?
Introduite en 2016, la Nine-Year Continuous Basic Education a apporté de nombreux changements dans le paysage éducatif à Maurice. Cette réforme se veut novatrice et mieux adaptée aux besoins des enfants d'aujourd'hui en raison de son approche plus holistique. Ainsi, le CPE a disparu pour laisser la place au Primary School Achievement Certificate.
L'introduction des nouvelles matières fait aussi partie de la réforme. Il y a les core subjects et les non-core subjects, comprenant l'Information and Communication Technology et les Communication Skills. La performance dans les matières sera notée comme suit : proficient, intermediate, basic.
La Nine-Year Continuous Basic Education a introduit également le Primary School Readiness Programme pour les élèves de Grade 1. Cela les aide à passer du préscolaire au primaire. Durant les premières semaines, le Early Support Programme évaluera leurs compétences. Les instituteurs doivent alors identifier les forces et les faiblesses des enfants. Des méthodes pédagogiques appropriées sont alors adoptées pour la mise à niveau de l'élève.
Sommes-nous sur la bonne voie pour autant ? Le pédagogue Bashir Thaleb reste sceptique. Selon lui, la baisse de niveau témoigne du manque de motivation chez l'élève. « Nous avons noté une baisse de motivation, un problème d'absentéisme, les élèves ne sont pas réguliers. Il y a aussi des changements dans le programme d'études effectués par Cambridge ces dernières années, qui expliquent un peu la baisse. »
Pour ce qui est de la réforme, il note que de nombreuses questions restent sans réponse. « Sommes nous prêts ? Les enseignants sont-ils formés correctement. Une reforme ne peut pas être faite dans un bureau et sur le papier. Des études doit être faites dans les salles de classes. »
Selon Roshan Boodna, toute réforme présente des qualités mais aussi des failles qui peuvent être réglées. « Nous avons fait des recommandations au ministère. Des enseignants seront recrutés, beaucoup de promesses sont faites mais ce n'est que dans deux ou trois ans que nous pourrons dire si la réforme fonctionne ou pas. Nous sommes à mi-chemin de la réussite. »
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