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Enfants hyperactifs : quand faut-il s’inquiéter ?

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Les enfants en général ne tiennent pas en place. Cependant, si certains d’entre eux sont tout simplement turbulents, d’autres souffrent du trouble de déficit de l’attention avec hyperactivité. Comment faire la différence ? Quelques points pour vous éclairer…

«Il ne s’arrête jamais ! »  Voilà comment Nicolas, qui habite Curepipe, qualifie son fils Rehan. Ce dernier est âgé de 4 ans.  « C’est lui qui contrôle tout à la maison et tout le temps. Il ne demande pas, il exige… », raconte le papa. Nicolas a décidé d’utiliser la méthode du chantage avec son fils. «Constamment, il faut que je fasse des compromis pour arriver à mes fins. Cela ne marche pas toujours, mais pour le moment, c’est la seule solution. Il demande beaucoup d’attention et je ne peux pas le laisser chez ses grands-parents, car ils sont vite dépassés. Ni chez personne d’autre d’ailleurs, et ce, pour des raisons évidentes » ajoute-t-il.

Est-il vraiment hyperactif ? C’est la question que se posent souvent les parents quand ils n’arrivent pas à comprendre le comportement de leurs enfants, surtout lorsqu’ils se sentent dépassés.

La psychologue Virginie Bissesur avance qu’il faut savoir faire la distinction entre un enfant agité et un enfant hyperactif. Il y a un diagnostic à effectuer. « Nous avons souvent tendance à décrire un enfant agité comme hyperactif. Pour le diagnostic, il ne faut pas seulement se rendre chez un simple consultant. Il y a des examens spécifiques à réaliser sur l’enfant. De plus, il faut que le psychologue soit spécialisé dans le domaine pour pouvoir interpréter les résultats afin de déceler si l’enfant a un QI élevé ou un QI faible, ce qui déterminera les raisons de son hyperactivité. À Maurice,  nous n’avons pas beaucoup de personnes qualifiées pour interpréter ces résultats », insiste la psychologue.

3 À 5 enfants sur 100 sont hyperactifs

De son côté, Naazim Mohungoo, psychiatre des enfants et des adolescents, explique : « On peut noter que l’enfant ne porte pas assez attention aux détails et fait des erreurs maladroites dans ses devoirs et dans  d’autres activités. Les enfants hyperactifs éprouvent des difficultés à rester concentré dans la classe. Ils sont souvent classifiés comme étant des personnes qui ne sont pas à l’écoute. Ils ont du mal à s’organiser et n’aiment pas les tâches difficiles. Souvent, ils perdent leurs affaires et font fréquemment preuve de distraction. L’enfant passe son temps à bouger, même quand il est assis et peut courir partout, tout le temps. Il a du mal à jouer silencieusement et il est souvent décrit comme étant ‘tout le temps en marche’ ». Le psychiatre ajoute que l’enfant hyperactif éprouve des difficultés à s’exprimer et crie pour se faire entendre et, en même temps, peut interrompre les autres. De surcroît, il est difficile de veiller à la sécurité de l’enfant à cause de son impulsivité et de ses difficultés. Le simple fait de traverser la route est un risque pour lui. « À tout moment, il peut faire quelque chose de dangereux », note encore le praticien. Selon lui, le TDAH (ou hyperactivité) touche une population de 3 à 5 enfants sur 100 et 60 % d’entre eux continuen’d’avoir des symptômes à l’âge adulte.

L’hérédité mise en cause

L’hérédité est un facteur important. Souvent, on retrouve dans les antécédents familiaux de l’enfant hyperactif, un parent ayant présenté les mêmes symptômes,  comme l’explique le Dr Anjali Bungalee, docteur en psychologie de la recherche. Il existe également d’autres causes, comme des complications pré- ou périnatales, infections ou intoxications (foeto-alcoolique, tabagisme de la mère) ou encore anoxie néonatale au cours de la première enfance.

Au cours des visites dans des poches de pauvreté à Maurice, il arrive souvent que l’on constate les symptômes hyperactifs chez des enfants. Une telle situation découle des conditions socio-économiques défavorables, d’intoxication, du manque de vitamine B ou encore d’un retard dans la maturation cérébrale dû à un ou plusieurs facteurs nocifs et de négligence.


Témoignages

Fariha, mère de Kiyaan, 4 ans  : « Il est toujours le centre de l’attention »

Fariha, qui habite la capitale, raconte le quotidien de son fils de 4 ans. « Kiyaan est un enfant très actif. Quand il était petit, cela ne nous a pas échappé. Il doit être constamment surveillé. Un jour, il a essayé de se couper les cheveux comme son oncle. Une autre fois, il a utilisé de la mousse à raser pour imiter son papa. À l’école, il est connu comme le ‘patron’ parmi ses amis et il très apprécié. Il est populaire dans toute l’école. Félicité pour ses talents de danseur, il a été réprimandé pour son manque de concentration en classe. Une des tâches les plus difficiles : les devoirs, car chaque petite chose est une distraction pour lui ». La stratégie adoptée par Fariha est la limitation de l’utilisation de la tablette et de la télévision. Les petites conversations à l’heure du coucher sont très utiles. « Durant ces moments, tous les jours, je lui fais comprendre ses actions, je lui prodigue des conseils dont il a besoin et je le complimente sur son bon comportement. C’est notre temps spécial mère-enfant »

Comment faire le diagnostic 

« Le diagnostic se fait à travers un historique de développement de l’enfant au fil des années. Il est important de récolter des informations de l’école, des parents, des endroits et du lieu où l’enfant passe le plus clair de son temps. Le diagnostic peut être fait par un pédiatre, un psychologue ou un psychiatre/pédopsychiatre », explique Naazim Mohungoo, psychiatre des enfants et des adolescents. On peut utiliser des échelles appropriées en cas de confusion pour aider le diagnostic. Si les difficultés ne sont pas sévères, on inclut l’enfant et les parents en travaillant ensemble sur le comportement. Si nécessaire, des médicaments appropriés seront prescrits, avec un suivi continu, préconise-t-il.

Quelques conseils pour les parents

Les parents sont appelés à surveiller constamment leur enfant hyperactif. En classe, l’enfant requiert une attention particulière. La plupart du temps, qualifié de turbulent, il se retrouve à l’arrière de la classe ce qui n’est pas correct. Le mieux pour l’enfant est de demander au professeur de le placer auprès de lui afin de faciliter son encadrement. Un enfant hyperactif peut rencontrer des soucis avec le bruit ou lorsqu’il est entouré de trop de camarades. À ce moment, il devient difficile à gérer. Le placer dans une classe avec moins d’enfants et de bruit est très efficace. Le soir, l’aider à se calmer et à maîtriser sa respiration le permettra de dormir plus facilement, car les enfants hyperactifs souffrent d’insomnie.


Dr Anjali Bungalee, docteur en psychologie de la recherche : «Les écoles spécialisées sont importantes»  

Dr Anjali Bungalee
Dr Anjali Bungalee

Quels sont les signes qui doivent alerter ?
Pour pouvoir diagnostiquer l’hyperactivité ou le TDAH, les symptômes doivent apparaître avant l’âge de 7 ans. Ils doivent se manifester dans au moins deux cas de figure différents, par exemple à l’école et à la maison.

Parfois, les symptômes se reconnaissent dès la naissance. Les nouveau-nés pleurent sans cesse, crient et s’agitent. Ils souffrent de coliques idiopathiques violentes et durables. Durant la première année, ils dorment mal et pleurent très souvent.

À partir d’un an, ces enfants bougent sans cesse, grimpent partout, donnent des coups de pieds, tombent sans arrêt, ouvrent les portes puis les font claquer, entre autres.

Ces enfants n’acceptent aucune discipline. Ils font de véritables crises de nerfs et hurlent. Ils ne supportent pas de rester assis à faire un puzzle, à crayonner ou à regarder des images. Leur capacité d’attention est très limitée.

Une fois que l’enfant atteint l’âge scolaire, il est fréquent que les parents commencent à comprendre qu’il ne réagit pas comme les autres enfants de son âge. Dans ce cas, on utilise le terme d’instabilité psychomotrice.

L’enfant a du mal à rester assis. Son attention est détournée par le moindre petit bruit et il n’arrive pas à se concentrer sur ses activités scolaires. Il y a des  écoles spécialisées pour le repérage des enfants souffrant de TDAH. Malheureusement, souvent les parents ignorant les comportements envoient leur enfant hyperactif dans une école conventionnelle. Ils ne comprennent pas l’importance des écoles spécialisées, et c’est ainsi que le développement de l’enfant est mis en péril. C’est là tout le problème ! Tout dépend de la tolérance des parents et de l’instituteur.  Les enfants souffrant d’hyperactivité sont souvent connus pour être plus « créatifs  » que les autres, mais sans prise en charge adéquate, ils n’auront sans doute jamais la possibilité de découvrir et d’exploiter cette capacité par peur de l’échec.

Quelles sont les conséquences de l’hyperactivité ?
Elles se reflètent sur la vie sociale et scolaire.  L’enfant devient de plus en plus susceptible et tout ce que les autres diront ou feront, même si ce n’est pas intentionnel, pourra le blesser, le vexer ou l’énerver. Il devient donc impossible de garder une relation stable et de qualité.  L’enfant développera plus tard une instabilité émotionnelle à deux sens. Soit, il érigera des barrières et gardera ses distances, ou alors, il aura tendance à s’attacher rapidement comme une éponge émotionnelle et ne saura pas garder une distance raisonnable par rapport aux autres.

D’autant plus que l’enfant peut développer ce que l’on appelle le « syndrome de l’imposteur  ». Imposteur, parce qu’en quête de la satisfaction des autres pour être satisfait, il va commencer à définir ses objectifs en fonction des attentes des autres (de ses parents ou de son enseignant), et non en fonction de ses besoins et de ses propres capacités.

Si l’hyperactivité n’est pas diagnostiquée et prise en charge correctement, cela va impacter sur sa vie d’adolescent, voire sa vie d’adulte et se traduira par un grand stress psychique.

Comment venir en aide aux enfants hyperactifs ?
Il est nécessaire d’apporter des conseils à la famille, une éducation contrôlée, une modification du comportement par des thérapeutiques non médicamenteuses telles que la psychothérapie, la psychodynamique, des approches psycho-éducatives, des approches cognitives comportementales ou la thérapie de conseil. Le traitement médicamenteux est en deuxième intention.

Une évaluation psychologique est nécessaire avant de réaliser une thérapie. Les tests doivent évaluer l’intelligence, le niveau scolaire, la perception visuelle, la perception auditive, la mémoire, le langage, la fonction motrice et les émotions.

Le plus important c’est le coaching parental ou coaching d’enfants. La prise en charge rapide du trouble du déficit de l’attention, avec ou sans hyperactivité, est indispensable lorsque le diagnostic est confirmé.

Jean Claude : «Toujours des répercussions à 15 ans»

Jean Claude, qui habite Pointe-aux-Sables, raconte que sa fille de 15 ans a toujours été hyperactive depuis son plus jeune âge… et jusqu’à présent ! « Quand elle était petite, elle était agitée. Elle n’arrêtait jamais de parler, grimpait partout et pleurait souvent avant de s’endormir. Elle était fréquemment énervée. À l’école, elle apprenait bien, mais les reproches étaient continuels, car elle dérangeait souvent la classe. Elle courait de droite à gauche et grimpait sur les arbres durant la recréation. Pour manger, c’était un casse-tête puisqu’elle ne restait jamais en place… Il nous fallait courir derrière elle pour qu’elle termine son repas. Pour la calmer nous la laissions choisir elle-même ses livres et les chaînes télévisées ou les DVD », relate le papa qui est tout fier de sa fille. Toutefois, il constate quelques répercussions chez sa fille même à 15 ans.

 

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