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Élections : la presse face aux défis et aux opportunités

Les panélistes invités par l’ambassade américaine
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Le sujet est d’actualité et c’est l’ambassade des États-Unis qui s’en est emparée, d’autant que des élections présidentielles y sont prévues en novembre. Le thème donné en réflexion le 3 mai 2024 à la résidence de l’ambassadeur américain était : « Challenges and Opportunities for Journalists Covering Elections : Perspectives from two democracies ». Les intervenants étaient Roukaya Kasenally, Kris Kaunhye, Touria Prayag, Rabin Bhujun et Ashok Beeharry.

Roukaya
Roukaya Kasenally,
universitaire et CEO à African
Media Initiative.

Maurice est-il classé par Reporters sans frontières, comme la pire des autocraties dans le monde, avec une presse mise sous tutelle de l’État et la démocratie totalement confisquée ? Existe-t-il une réelle crainte de voir les futures élections manipulées par l’intelligence artificielle, la désinformation et les forces de l’argent ?


hanry
Henry Jardine, ambassadeur
américain à Maurice

Aux États-Unis, la finalité des élections tient à la capacité des candidats de s’acheter des heures d’antennes dans des stations audiovisuelles de
chaque État et au soutien des célébrités.


À Maurice, le contexte est différent. Depuis ces vingt dernières années, les sociétés religieuses, la capacité de l’argent du secteur privé, les offres d’emplois et les réseaux sociaux influent sur les élections. Dans un tel contexte, comment les journalistes parviennent-ils à s’acquitter de leurs responsabilités ? Et comment juger de leur impartialité ? Quel doit être la posture équilibrée, entre la passivité et la proactivité ?

ATTACHÉS DE PRESSE

Touria Prayag, rédactrice en chef de Weekly
Touria Prayag, rédactrice en
chef de Weekly

Lors des élections générales de 2014, il existait une grande proximité entre l’alliance conduite par feu sir Anerood Jugnauth et certains reporters. Et au moment de désigner des attachés de presse, des ministres de cette alliance avaient choisi des reporters.

Cette situation fait dire à Roukaya Kasenally que « elections is harvest time » avant de s’interroger : « Why choose the right side? ». Sans doute parce que la grande majorité des journalistes sont sous-rémunérés à Maurice et le métier lui-même s’en est trouvé démonétisé depuis ces dix dernières années.

Que certains journalistes très médiatisés se joignent à un parti politique à la veille des élections générales n’est pas nouveau. Dans les années 70, la presse dite indépendante et ses journalistes étaient proches de l’opposition incarnée par le Mouvement militant mauricien (MMM). Et de nombreux journalistes avaient obtenu des investitures aux élections de 1976.

Plus près de nous, lors des législatives de 2019, des animateurs et animatrices des radios privées ont eux été investis par l’alliance au pouvoir. L’explication tient sans aucun doute à la proximité entre les journalistes et les politiciens, à l’étroitesse de notre pays et à l’attrait qu’exercent le pouvoir, les avantages et les privilèges qui y sont attachés.

CORRUPTION MORALE

C’est là une forme de corruption morale tout à fait légale et qui, à première vue, peut provoquer une certaine déception au sein de la population. Mais elle finit par se dissoudre dans une société de plus en plus gagnée par l’individualisme et l’opportunisme. Est-ce que la politisation des organismes est une entrave à l’exercice de la démocratie et à l’embauche ?

Pour Subhash Gobin, un des intervenants, journaliste et ex-directeur de communication à l’ICTA, la mainmise autoritaire sur les institutions s’est renforcée depuis 2019 et les règles du jeu ont changé. Toutefois, les élections sont ‘free and fair’ à Maurice.

kris
Krish Kaunhye,
directeur de Top FM.

Il a échoué à Kris Kaunhye, directeur de Top FM, de partager ses déboires avec la classe politique. « L’indépendance de tout groupe de presse passe par l’indépendance économique. Nous en avons fait les frais. Nous avions quelques-uns des plus gros annonceurs, mais lorsque nos ennuis avec le gouvernement ont commencé, ils nous ont laissés tomber. Nous avions dit que Narendra Modi était un raciste. Nous avions le public avec nous, mais notre appel pour des fonds publics n’a rien donné. ‘No one gave one penny, not even in the diaspora’ », confie Krish Kaunhye.

Les rapports entre la presse et les journalistes ont toujours été analysés sous la double perspective de la complaisance et de la critique. Certains journaux refusent par exemple d’embaucher d’anciens attachés de presse. D’autres les acceptent avec l’objectif de mettre à profit leurs connexions avec d’anciens ministres.

Mais, la question du financement des journaux se déclarant indépendants pose un sérieux handicap à leurs capacités de recruter des professionnels de la communication. Nous vivons une ère durant laquelle circulent allègrement les ‘fake news', une tendance en progression qui nécessite également le recours à des professionnels de l’informatique.

 

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