Interview

Dr Sheriff Oumarkhan : «Le lupus touche 0,2% de la population»

Le mercredi 10 mai était la Journée mondiale du lupus. Le point sur les maladies auto-immunes avec le Dr Sheriff Oumarkhan, consultant en rhumatologie à l’hôpital national sir Seewoosagur Ramgoolam à Pamplemousses.

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Les maladies auto-immunes sont le résultat du dysfonctionnement du système immunitaire qui s’attaque aux constituants normaux de l’organisme. Parmi il y a le lupus. Pouvez-vous nous dire un peu plus sur cette maladie ?
Le lupus est une maladie qui peut affecter plusieurs systèmes du corps : la peau, provoquer des inflammations des joints, toucher les reins, le cœur, poumon, foie, cerveau, etc. Puisque la maladie ne s’attaque pas à un seul organe, cela rend le diagnostic difficile.

Il faut souligner que tous les patients n’ont pas toutes ces manifestations de la maladie. Pour certains ce n’est que quelques organes qui seront affectés comme la peau et les joints. La maladie peut être fatale pour d’autres, surtout si c’est le cœur qui est affecté. Mais de nombreuses personnes vivent avec le lupus depuis de nombreuses années.

Lorsqu’il s’agit de problème de peau et d’alopécie, il est possible de gérer assez convenablement la maladie. Dans des cas plus compliqués, quand ce sont les organes vitaux qui sont touchés (les reins, le cerveau ou le cœur), il faut prendre beaucoup de précautions. 

Quelles sont les causes des maladies auto-immunes ?
Cela survient souvent à la suite d’une infection. Un microbe peut pénétrer le corps d’une personne qui par réaction développe des anticorps pour résister à l’envahisseur. Mais à la suite d’un dysfonctionnement, au lieu de protéger le corps contre les infections ou microbes, les anticorps s’attaquent à ses propres antigènes qui sont considérés comme un corps étranger.

Parmi les maladies auto-immunes, il y a le lupus, le rhumatisme, la thyroïde.

Quels sont les traitements disponibles pour le lupus ?
Tout dépend de la sévérité de la maladie. Il y a des traitements légers pour contrôler la maladie comme la cortisone. Mais si c’est plus sévère et que des organes importants pour le bon fonctionnement du corps sont touchés, on administre un plus fort dosage de médicaments. 

Peut-on espérer guérir d’une maladie auto-immune ?
Non. Une fois qu’il y a un dérèglement du système, on ne peut rien faire que de contrôler la maladie à travers des médicaments. 

Quelles peuvent être les conséquences du lupus ?
Là encore cela dépend de la sévérité de la maladie. S’il s’agit d’un cas de lupus léger, la personne peut mener une vie plus ou moins normale et avoir une espérance de vie similaire aux autres. Elle doit cependant prendre des précautions spécifiques comme ne pas s’exposer au soleil ou doit appliquer une crème solaire, afin de se protéger contre les rayons ultra-violets. Cela pour ne pas aggraver la maladie.
Certains peuvent être très sensibles à l’eau froide. Leur main peut gonfler ou devenir bleue et ressentir des sensations de brûlure. Cela peut causer une aggravation de leur maladie. Ils doivent aussi surveiller leur tension artérielle et l’état de santé de leurs reins. Ceux dont les organes vitaux sont affectés peuvent se retrouver en situation de mobilité réduite.

Dans le cas du lupus, est-ce que le facteur génétique entre en jeu ?
Cela n’a pas encore été déterminé tout comme les causes de cette maladie.

Le lupus affecte davantage les femmes que les hommes, qu’est-ce qui explique cela ?
C’est difficile de l’expliquer. Il en est de même pour d’autres maladies. Pour le lupus, cela n’a rien à faire avec les hormones. Les hommes aussi sont touchés par le lupus, mais les cas sont bien moins que les femmes comme c’est le cas pour le cancer du sein. Environ 0,2 % de la population est touché par le lupus.

Dans beaucoup de maladies, on parle de prévention. Est-ce que c’est possible dans le cas des maladies auto-immunes ?
Il est possible de le faire uniquement en cas d’infection. Le traitement approprié est administré rapidement avant que l’organisme ne développe des anticorps. Ce sont surtout les enfants qui sont les plus vulnérables, par exemple quand ils ont des maux de gorge. Si on leur donne les antibiotiques à temps, il est possible de prévenir une maladie auto-immune. Le développement des microbes débute souvent dans la gorge d’où l’importance de traiter rapidement avec des antibiotiques quand cela s’avère nécessaire.

Est-il facile de diagnostiquer une maladie auto-immune ?
Il y a des examens qui peuvent être effectués pour poser un diagnostic. Mais parfois il est difficile de déterminer qu’elle est la maladie tout de suite comme c’est le cas pour le lupus par exemple. Il arrive des fois que les analyses que nous effectuons montrent des résultats négatifs. Il faut alors passer à d’autres critères, afin de se prononcer sur ce dont souffre la personne. Le diagnostic ne dépend pas uniquement des tests biologiques, mais aussi du vécu de la personne. 

Est-ce que les symptômes sont les mêmes pour ces différentes maladies auto-immunes ?
Non, tout dépend, quel organe a été affecté. Dans le cas du lupus ce sera des douleurs tout comme pour le rhumatisme. Mais si c’est le rein qui est affecté, il n’y aura pas de douleurs, mais une montée de l’urée et il va gonfler. Les reins ne vont pas fonctionner convenablement. Si c’est le cœur et que les valves ont été affectées, il y aura un dysfonctionnement de cet organe.

Comment déterminer dans ce cas si on souffre d’une maladie auto-immune ?
Dans le cas du lupus, certains peuvent avoir des maux de tête. Le problème peut être traité de façon symptomatique avec des antidouleurs. Il est difficile de penser du premier coup qu’il peut s’agir d’une maladie auto-immune. On ne peut pas non plus procéder à de grandes analyses pour ce qui se présente comme de simples maux de tête.

Ce n’est que si cela devient récurrent qu’on doit songer à faire de plus grandes investigations pour essayer de déceler les causes en examinant les symptômes qui y sont associés. Associer à cela, connaître les antécédents médicaux d’une personne peut être déterminant dans ce genre de situation pour avoir un bon diagnostic. Tout commence par des tests de routine avant d’aller vers des analyses plus spécifiques et spécialisées.

Les médecins doivent être de plus en plus avertis par rapport aux symptômes du lupus et ainsi avoir en tête cette maladie quand ils font faire des analyses à leurs patients en fonction des symptômes qu’ils présentent. 

Est-ce que ce type de maladie se manifeste à un âge spécifique ou cela peut survenir n’importe quand ?
Il n’y a pas d’âge pour que survienne une maladie auto-immune. Une fois qu’une personne a eu le microbe et qu’il y a un dérèglement, la maladie peut se développer.

Peut-on évoquer des facteurs de risque, environnementaux ou génétiques ?
Certaines personnes ont des prédispositions pour ces maladies. Une fois qu’ils ont le microbe, ils peuvent être plus affectés que les autres qui ont eu la même maladie. Prenons le cas du chikungunya. Certaines personnes se sont remises assez rapidement alors que d’autres portent encore les séquelles de la maladie.

Ils développé un vrai rhumatisme avec des douleurs persistantes ou d’autres symptômes. Cela en raison d’une prédisposition à cette maladie. C’est-à-dire qu’il a simplement fallu qu’ils aient le microbe pour que la maladie se développe. Ainsi en faisant l’historique des maladies au sein de la famille de cette personne, on peut déceler d’autres cas de rhumatisme. Dans ce cas il n’y a pas une transmission génétique d’une maladie, mais on va plutôt dire qu’il y avait des prédispositions chez cette personne. Une autre personne qui n’a pas cette prédisposition va guérir rapidement avec les mêmes traitements.

 

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