422 millions souffrent du diabète dans le monde. À Maurice, même si la prévalence de la maladie de 2009 à 2015 a enregistré une légère baisse, la situation demeure préoccupante. 257 442 personnes entre 25 et 74 ans étaient diabétiques en 2015. Dossier en marge de la Journée internationale du diabète le lundi 14 novembre.
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Dr Damien Steciuk, le diabète continue à faire des ravages, malgré les campagnes de sensibilisation. Comment expliquez-vous cela ?
Le diabète est en constante hausse partout dans le monde, mais la courbe a commencé à s’infléchir à Maurice. Cela grâce aux campagnes sensibilisation menées par les autorités et les Organisations non gouvernementales.
Mais le taux de diabète reste préoccupant, parce que nous avons de plus en plus d’enfants obèses. Il y a aussi les facteurs génétiques et environnementaux qui font qu’il faut rester vigilant. Nous observons également que l’activité physique des enfants est nettement moins qu’autrefois. Les enfants d’aujourd’hui sont plus sédentaires. Ils passent plus de temps sur les jeux vidéo et les tablettes que dans des activités physiques et des jeux à l’extérieur. Ce qui produit des enfants et des adultes obèses par la suite.
Il faut aussi une bonne alimentation...
L’alimentation joue un rôle en ce qu’il s’agit du diabète. Il n’y a pas une grande consommation de vitamines présentes dans les fruits et les légumes. Il y a aussi une surconsommation des antibiotiques qui peut être un des facteurs des maladies métaboliques.
«Le diabète est un “silent killer”, il tue à petit feu.»
La prévention du diabète semble difficile à faire entrer dans les mœurs mauriciennes on dirait ?
Cette question est intéressante, car c’est un problème réel en effet. Mais grâce à l’effort de tout le monde, cela va entrer dans les mœurs et les gens vont commencer à se faire dépister. Nous ne sommes pas encore à une situation idéale, mais cela vient petit à petit.
Est-ce que les gens ont peur des résultats qu’ils peuvent obtenir lors du dépistage ?
Il peut y avoir une certaine appréhension en effet. Ce qu’ils doivent savoir c’est qu’un diabétique n’est pas un condamné à mort, il peut bien vivre normalement.
Mais au-delà de l’appréhension, de nombreuses campagnes parlent souvent de l’importance du dépistage précoce pour une meilleure prise en charge, n’est-ce pas ?
Le fait est que le diabète du type 2 ne présente aucun symptôme. C’est un problème majeur. Puisque les gens ne se sentent pas malades, ils ne voient pas l’importance d’aller faire un test de dépistage. Cela alors que la maladie peut être présente depuis plusieurs années. La population devrait réaliser que le diabète est un « silent killer ». Il tue à petit feu. Bien souvent quand on découvre la maladie il a déjà fait des ravages et causé des complications comme des problèmes aux reins et/ou aux pieds. C’est dommage, car cela aurait pu être évité.
Que faut-il faire pour prévenir le diabète ?
J’aime bien dire qu’on va voir le médecin de temps en temps, mais que trois fois par jour on a son assiette devant soi. Il est donc important de manger sainement. Cela ne s’applique pas uniquement aux diabétiques, mais à tout le monde. Évitez la cigarette et l’alcool. Pratiquez une activité physique régulièrement. En cas de transmission génétique du diabète, évitez les complications avec un suivi.
Certaines personnes ont du mal à contrôler leur diabète. Quels conseils pouvez-vous leur donner ?
Le traitement du diabète doit s’adapter au patient. Mais le patient ne devrait pas consulter qu’un seul médecin, car c’est une maladie qui concerne plusieurs professionnels de santé.
Un diabète mal contrôlé entraîne malheureusement des complications. Quelles sont-elles ?
Ce qu’il faut savoir c’est que le diabète n’est pas une maladie du sucre, mais du cœur et des vaisseaux sanguins sont partout dans le corps. C’est ce qui fait que tous les organes peuvent être affectés. Cela peut aller de la perte des cheveux, entraîner un accident vasculaire cérébral. On peut souffrir de vasculopathie, de rétinopathie diabétique, de parodontie diabétique, de sclérose buccale, de gastroparésie diabétique et de trouble digestif. On peut avoir un infarctus, des troubles sexuels des dysfonctionnements érectiles, de la sécheresse vaginale, des difficultés à procréer, souffrir de neuropathie avec des plaies qui ne cicatrices pas ou encore faire une nécrose qui peut mener à une amputation ou avoir une néphropathie diabétique.
C’est pour cela qu’il est important pour les diabétiques de ne pas uniquement voir leur médecin régulièrement, mais aussi leur dentiste, l’ophtalmologue, le cardiologue, le podologue et le nutritionniste, entre autres, pour une bonne prise en charge.
La Journée du diabète est observée le 14 novembre. Quel est votre message à la population ?
Faites vous dépister. Le diabète n’est pas une fatalité.
Maurice en chiffres
Selon les estimations du ministère de la Santé, 257 442 personnes âgées entre 25 et 74 ans étaient atteintes du diabète en 2015. Suivant la méthode standardisée de la prévalence de cette maladie, il y a eu une stabilisation de la situation. La prévalence du diabète est en effet passée de 23,6 % en 2009 à 22,8 % en 2009.
C’est ce qu’indique le dernier rapport sur les maladies non transmissibles (2015). Selon les chiffres disponibles, il a aussi été estimé que la prévalence du diabète du type 2 parmi la population des 20 à 74 ans était de 20,5 %. Soit 19,6 % chez les hommes et 21,3 % chez les femmes.
Mais vu l’obésité en hausse, le vieillissement de la population et la vie sédentaire des Mauriciens, ces chiffres sont à surveiller de très près. C’est dans cette optique que le ministère de la Santé et les Organisations non gouvernementales ne cessent de préconiser un mode de vie sain et des tests précoces de dépistage. Cela pour éviter le surpoids et l’hypertension qui ont une incidence sur le diabète et sont la cause de diverses complications.
Les derniers chiffres disponibles indiquent que 398 417 personnes âgées de 25 à 74 ans étaient obèses ou en surpoids en 2015, ce qui donne une prévalence de 19,1 %. Et en ce qu’il s’agit de la prévalence de l’hypertension elle était de 28,4 %.
Sur le plan mondial
- 422 millions de personnes étaient atteintes de diabète en 2014 selon l’Organisation mondiale de la santé. Le nombre était 108 millions en 1980.
- 1,5 million. C’est le nombre de décès attribué au diabète en 2012. 2,2 millions étaient dû à l’hyperglycémie.
- Le diabète pourrait être la septième cause de décès dans le monde d’ici 2030 selon l’OMS.
Source : Organisation mondiale de la santé
Première cause de décès
Le diabète est la première cause de décès à Maurice. Les chiffres n’ont cessé d’augmenter depuis ces dernières années. En 2015, 2 285 personnes sont décédées en raison du diabète.
Les complications liées au diabète mènent également souvent à des amputations. Selon les chiffres du ministère de la Santé, il y a en moyenne 350 cas d’amputations chaque année. Le chiffre de ceux qui subissent une deuxième amputation est aussi en hausse.
Rétinopathie diabétique
« La situation concernant la rétinopathie diabétique est alarmante ». C’est ce qu’affirme l’optométriste Gaëtan Li. La rétinopathie diabétique survient entre 10 et 12 ans chez une personne atteinte du diabète peu importe si la maladie a été bien contrôlée ou pas explique-t-il.
« Une personne qui est dépistée diabétique à l’âge de 40 ans à 52 ans sera atteinte de rétinopathie avec les risques de complications que cela suppose », explique l’optométriste. Mais la maladie se manifeste dès les premières années (4 à 5 ans) chez une personne qui n’a pas su bien contrôler son diabète. Les personnes sont de plus en plus nombreuses à souffrir de cette maladie selon Gaëtan Li.
La rétinopathie diabétique est une pathologie de la rétine qui provoque une hémorragie de la rétine qui va devenir de plus en plus important au point d’obscurcir la vision fait ressortir Gaëtan Li.
« Comme pour un tuyau qui a une fuite, la pression de l’alimentation des tissues des yeux va diminuer ce qui va provoquer leur détérioration et leur mort », ajoute-t-il.
C’est la nécrose de la rétine qui a pour conséquence une perte de la vision. Et comme c’est le cas pour toute blessure, un tissu cicatrisant va se former après le saignement et va entraîner le décollement de la rétine qui va lui causer une cécité totale et permanente.
Pour prévenir la rétinopathie diabétique, il faut avant tout prévenir le diabète. Cela à travers une alimentation saine et équilibrée. Avec les traitements du diabète qui se sont améliorés et le vieillissement de la population dû à une meilleure qualité de vie, le nombre de personnes souffrant de rétinopathie est en hausse selon Gaëtan Li.
Il préconise un examen régulier des yeux (deux fois l’an) pour ceux qui souffrent de diabète, et une fois par an pour les non-diabétiques. Le dépistage est important souligne-t-il, car le diabète du type 2 est silencieuse et ne présente pas de symptôme.
« Quand les dégâts surviennent, il est déjà trop tard. On ne peut pas empêcher la rétinopathie diabétique, mais on peut prévenir les mauvais effets », dit-il. Cela d’autant plus que la maladie est moins sévère, quand elle survient entre 10 et 12 ans et elle est plus grave quand elle survient entre 3 et 4 ans. Ceux qui ont des antécédents de diabète dans la famille doivent faire des bilans sanguins, une fois l’an.
Le diabète du type 1
Le diabète du type 1 peut survenir subitement et débute le plus souvent pendant l’enfance ou l’adolescence. Dans de rares cas, il commence à l’âge adulte. C’est ce qui le distingue du diabète du type 2 qui est causé par divers facteurs (sédentarité, obésité, manque d’activité physique et l’âge).
Et contrairement au diabète du type 2 qui ne donne aucun signe, le changement est radical pour celui qui est atteint du diabète du type 1, selon le responsable de l’Organisation non gouvernementale Ti-Diams, Abdullah Dustagheer.
« Le diabète du type 1 survient quand le pancréas cesse de fonctionner pour des raisons qui n’ont pas encore pu être déterminées », explique-t-il. Son association s’est engagée depuis une dizaine d’années dans l’encadrement et l’accompagnement psychosocial des enfants atteint de cette maladie.
Le diabète du type 1 n’est pas dû à une mauvaise alimentation ou à un excès de la consommation de sucreries chez les enfants fait comprendre le responsable de Ti-Diams. Mais malgré cela, le sujet reste tabou dans de nombreuses familles déplore-t-il. Ce qui est un obstacle à la prise en charge. « Certains parents n’aiment pas que leur entourage soit au courant de l’état de santé de leur enfant. C’est un problème pour l’enfant, pour son intégration sociale et pour son traitement », dit-il.
Mais avec les campagnes de sensibilisation sur le diabète, le tabou s’est un peu estompé et semble être en régression. Les campagnes d’explication et de sensibilisation sont importantes, afin que l’entourage du malade puisse comprendre sa situation et ce qu’il fait pour la gestion de sa maladie.
Avec l’encadrement et l’éducation sur le diabète du type 1 dispensé par Ti-Diams, tous les malades sont autonomes et gèrent leur situation. « L’association accompagne la famille pour faire l’éducation thérapeutique des patients. Elle leur donne une connaissance médicale pour qu’ils gèrent le diabète par eux-mêmes. Ils comprennent le fonctionnement de leur corps et le rôle de l’insuline », explique Abdullah Dustagheer.
Symptômes
Quand le pancréas qui produit de l’insuline, afin de métaboliser le sucre présent dans le corps, ne fonctionne plus, il est primordial de faire des injections d’insuline pour la survie du malade. Au cas contraire celui-ci va souffrir d’hyperglycémie qui est une concentration de sucre dans le corps. Les signes et symptômes du diabète du type 1 sont :
- Une envie d’uriner fréquemment (polyurie)
- Sensation de soif (polydipsie)
- Perte de poids rapide chez les enfants
- Faim exagérée
- Fatigue.
Il est important de chercher une assistance médicale dans de telle situation, afin de bénéficier de traitements appropriés. Une fois le diagnostic posé, le malade aura besoin d’une injection d’insuline quatre à cinq fois par jour.
L’insulinothérapie est accompagnée de test de glycémie que le patient peut facilement effectuer lui-même. Tous les patients que l’ONG accompagne sont équipés pour cela. Ils doivent répéter cet exercice jusqu’à trois à quatre fois par jour.
Complications
Les complications de santé sont possibles si le diabète n’est pas géré convenablement. Elles sont les mêmes que celles du diabète du type 2. Parmi : la rétinopathie diabétique et insuffisance rénale pouvant entraîner une nécessité de dialyse, des problèmes cardiovasculaires avec les vaisseaux sanguins qui sont affectés et la mauvaise cicatrisation en cas de blessure.
Ti-Diams accompagne environ 500 enfants. Elle enregistre entre quatre et cinq nouveaux membres chaque année.
Diabète gestationnel
Le diabète gestationnel touche les femmes à n’importe quel âge mais principalement après l’âge de 35 ans selon le Dr Areff Peerally, consultant en gynécologie. Ce type de diabète, comme son nom l’indique, survient pendant la grossesse en raison d’un problème d’obésité chez la femme enceinte.
La maladie peut aussi se manifester si la femme a déjà accouché d’un gros bébé (4 kg) lors d’un précédent accouchement. Le risque est plus grand si la femme a des antécédents de diabète dans la famille. Le diabète gestationnel est aussi causé par le placenta du bébé qui produit des hormones diabétogéniques ce qui fait grimper le taux de glucose dans le sang.
Mais comme c’est le cas pour le diabète du type 2, la mauvaise alimentation et le manque d’activité physique sont des facteurs de risque pour le diabète gestationnel. Il est de ce fait important de faire un bilan de santé et prendre conseil avec son gynécologue avant de songer à concevoir un enfant souligne le Dr Peerally.
Pendant la grossesse, il est recommandé d’éviter les aliments qui contiennent des glucides ainsi que des légumes tels que le riz, la pomme de terre, la carotte et la betterave. Plus que jamais, une alimentation saine et équilibrée doit être observée pendant la grossesse tout comme la pratique d’une activité physique légère. Ce mode de vie sain devrait être déjà de rigueur dès le plus jeune âge fait ressortir le gynécologue, afin d’éviter des complications de santé à l’âge adulte. Une femme atteinte du diabète gestationnel peut accoucher normalement ajoute le Dr Peerally, mais une plus grande attention est accordé à la femme enceinte dans les deux dernières semaines de sa grossesse afin de prévenir toute complication. Au quatrième mois de sa grossesse, des examens doivent être effectués, afin de détecter des anomalies au fœtus.
Le gynécologue affirme que le nombre de cas de diabète gestationnel avait augmenté à Maurice en débit de toutes les campagnes effectuées sur la prévention du diabète. Mais que grâce aux campagnes de sensibilisation du ministère de la Santé avec la collaboration des médias, le nombre de cas a commencé à baisser. L’objectif de zéro cas de diabète gestationnel est dans la ligne de mire des autorités souligne-t-il. Pour lui, avec un minimum de précaution, ce type de diabète peut être évité.
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