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Dérèglement climatique : près de Rs 900 M pour améliorer les prévisions et les interventions

Un JCB réquisitionné pour détruire un mur lors d’une inondation.

Mieux prévoir et se préparer à répondre aux urgences en cas de catastrophes naturelles. C’est avec cet objectif que le gouvernement a consacré Rs 890 millions dans le Budget 2023/24.

Classé 14e parmi les pays les plus à risque en 2014, Maurice a pu améliorer son rang au fil des années en se hissant à la 107e place en 2022, sur un total de 193 pays. Afin d’accroître la capacité de l’île à se préparer et à répondre aux urgences en cas de catastrophes, surtout climatique, le Budget 2023/24 a fait provision d’environ Rs 890 millions. 

Cette somme a été répartie entre trois départements tombant sous le ministère des Collectivités locales et de la gestion des risques de catastrophe, soit le Mauritius Fire & Rescue Service (MFRS), le Mauritius Meteorological Service (MMS) et le National Disaster Risk Reduction and Management Centre (NDRRMC).

Mauritius Fire & Rescue Service - Asok Kumar Kehlary : «Reduire notre temps de réaction de 9 à 5 minutes»

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Asok Kumar Kehlary, Chief Fire Officer du MFRS.

Offrir une assistance aux personnes en danger, le plus rapidement possible et avec un personnel efficient. Tel est l’objectif que souhaite atteindre le Mauritius Fire & Rescue Service (MFRS).

Le MFRS effectue entre 10 000 à 11 000 interventions annuellement, dont 3 000 à 4 000 qui sont considérées comme des « special assistance ». Parmi, des interventions en cas de catastrophes naturelles telles que des pluies torrentielles, des inondations, des glissements de terrain, entre autres. 

Asok Kumar Kehlary, Chief Fire Officer (CFO), dit avoir constaté que les ‘flashflood’, par exemple, peuvent survenir aux quatre coins du pays. Une situation durant laquelle les pompiers sont parfois appelés à évacuer des personnes en difficulté. « Parce que chaque seconde compte, nous estimons que pour être plus efficients, nous devons réduire notre temps de réaction. Actuellement estimé à neuf minutes en moyenne, nous voulons le réduire à cinq minutes. Et pour y arriver, nous venons avec le concept de ‘satellite fire stations’ », indique-t-il. 

Pour Kehlary, il s’agit d’un concept révolutionnaire et Maurice serait, selon ses dires, le premier pays en Afrique à l’implémenter. Avec une population d’environ 1,2 million d’habitants et presque autant de touristes sur l’année, le CFO considère que ce projet revêt toute son importance. « En cas de sinistre, une première équipe issue de ces satellite stations se rendra sur les lieux et en cas de besoins, l’équipe basée à la caserne la plus proche sera appelée en renfort », fait-il ressortir.  

« Moins coûteuse »

Asok Kumar Kehlary soutient que la mise en place de ces mini stations sera moins coûteuse que la construction d’une ‘full fledge fire station’. Les mini stations seront construites sur des terrains de 500 mètres carrés en moyenne et seront stratégiquement situées. Une dizaine de pompiers seront postés dans chacune d’elles et il y aura au minimum un camion par station, bien que celle-ci pourra en accommoder jusqu’à deux. Ce qui nécessitera, selon notre interlocuteur, des investissements à la fois pour le recrutement de plus de personnel, mais aussi pour l’achat des équipements. 

D’après les plans du gouvernement, 16 de ces ‘satellite fire stations » devront voir le jour. Mais dans un premier temps, huit de ces mini stations seront construites, notamment à La Gaulette, Chemin Grenier, Bambous Virieux, Bel Air, St Pierre, Bambous, Grand Bois et l’Escalier.

En sus des 11 casernes existantes, le MFRS en fera construire trois nouvelles, soit à Montagne Blanche, Goodlands et JinFei. Kehlary indique qu’une nouvelle caserne sera construite à Quatre-Bornes en remplacement de l’actuelle. « Le site identifié devrait aussi abriter le siège administratif du MFRS », avance-t-il.

Les projets du MFRS :

  • La construction de deux nouvelles casernes de pompiers à Goodlands et Montagne Blanche.
  • La relocalisation de la caserne de Quatre-Bornes et la construction d’un nouveau siège administratif sur le même site. 
  • La construction de 16 « satellite fire stations » à travers l’île.

Pleins feux sur la Station Météo

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Dr Prithiviraj Booneeady, Directeur p.i du MMS.

Bien que le Mauritius Meteorological Service (MMS) dispose d’équipements sophistiqués, avec le dérèglement climatique, les prévisions doivent être plus précises. C’est dans cette optique que le Dr Prithiviraj Booneeady, directeur par intérim du MMS, indique que l’organisme compte investir dans de nouveaux appareils et remettre à jour les systèmes actuels. 

Parmi, le système « Synergie », une « workstation » qui permet aux prévisionnistes de visionner différents modèles sur plusieurs écrans simultanément. L’actuelle version serait ‘outdated’, selon notre interlocuteur. Le réseau informatique, qui daterait de plus de 10 ans, sera aussi remis à neuf. Idem pour le système de téléphonie qui n’a pas été changé depuis trois décennies. 

Enfin, le MMS compte ériger un nouveau Head Quarters. « Le bâtiment actuel date des années 80. Au fil des années, le nombre d’employés a augmenté et nous prévoyons de recruter encore plus de personnel à l’avenir. Nous envisageons également de créer un centre de formation. Et il faudra de l’espace aussi pour installer les nouveaux serveurs que nous comptons acquérir », énumère-t-il. 

Les projets du MMS :

  • Acquisition de Synergie-Web, un système d'information de prévision météorologique moderne. 
  • Une remise à niveau du réseau informatique pour une meilleure communication et une utilisation optimale des nouveaux serveurs reçus dans le cadre du projet ClimSA, à savoir un serveur pour l'action climatique et un serveur pour intégrer le système d'alerte.
  • Acquisition de serveurs pour l’utilisation du High-Resolution Limited Area Model (HRLAM) qui permettra d’améliorer la capacité du MMS à fournir des prévisions précises, que ce soit par rapport au temps ou aux inondations.
  • Une amélioration du « storm surge model » pour une meilleure prévision des fortes houles et des raz de marée lors du passage de cyclones.
  • La construction d’un nouveau siège social à Vacoas permettant d’accommoder tous les équipements utilisés par le MMS afin d'offrir un meilleur service.
  • Acquisition de trois stations météorologiques automatiques. Une sera déployée à St Brandon. Les deux restantes remplaceront les stations météorologiques automatiques devenues obsolètes à Maurice.

NDRRMC : réception de messages d’alerte sur les smartphones

Le National Multi-Hazard Emergency Alert System (NMH-EAS) est considéré comme un système « unique en son genre ». Son implémentation en phase, par le National Disaster Risk Reduction and Management Centre (NDRRMC), permettra à terme d’émettre des alertes localisées en cas de catastrophe naturelle. 

Le but : avertir plus efficacement les habitants lorsqu’une région fait face à ce type de catastrophe. Outre passer des messages à travers les radios, la télévision, les réseaux sociaux, il s’agit d’alerter les gens à travers leur smartphone. C’est justement ce que va permettre l’implémentation de la phase 2 de ce projet, à travers la mise sur pied d’un Cell Broadcast Centre (CBC) qui permettra d’envoyer des messages d’alerte sur les téléphones portables dans des zones choisies en cas de catastrophe.

À noter que le projet prévoit aussi un système d’alerte dédié aux premiers secours pour permettre une meilleure coordination des différents services concernés par l’aide aux habitants de régions sinistrées ou sous la menace d’une catastrophe immédiate.

Un budget de Rs 890 M pour le MFRS, le MMS et le NDRRMC

Quelque Rs 890 millions ont été consacrées pour l’année financière 2023/24 aux départements du Mauritius Fire & Rescue Service, du Mauritius Meteorological Service et du National Disaster Risk Reduction and Management Centre. De ce chiffre, environ Rs 107 millions seront consacrées à la concrétisation de divers projets. Le montant restant, soit environ Rs 783 millions, ira aux dépenses courantes.

    2023/24 2024/25 2025/26
MFRS
 
 
Recurrent Rs645,000,000 Rs670,000,000 682,000,000
Capital Rs90,000,000 Rs142,000,000 182,000,000
Total Rs735,000,000 Rs812,000,000 864,000,000
         
MMS 
 
 
Recurrent Rs112,600,000 Rs111,600,000 107,600,000
Capital Rs14,400,000 Rs13,400,000 3,400,000
Total Rs127,000,000 Rs125,000,000 111,000,000
         
NDRRMC
 
 
Recurrent 23,800,000 24,300,000 24,700,000
Capital 2,500,000 1,900,000 1,700,000
Total 26,300,000 26,200,000 26,400,000

 

Prof. Chandradeo Bokhoree : «Pour un département de gestion des désastres dans chaque collectivité locale»

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Professeur Chandradeo Bokhoree.

Le Professeur Chandradeo Bokhoree, Head of Doctoral School à l’University of Technology of Mauritius (UTM), laisse entendre qu’il est agréablement surpris par des mesures prises pour améliorer la préparation et la réponse lors de désastres. Il estime que le gouvernement réalise toute la nécessité d’investir davantage dans le combat contre les catastrophes naturelles et les effets du changement climatique.  

MMS. Le professeur Chandradeo Bokhoree se dit conscient que la station météo de Vacoas ne jouit pas d’une bonne image auprès d’une partie de la population, les prévisions n’étant pas toujours précises. Le professeur estime toutefois que la population doit aussi comprendre que le changement climatique est un phénomène complexe et qu’il faut des équipements et des logiciels de pointe pour pouvoir faire des prévisions plus précises. « Je constate que le Budget 2023/24 va dans ce sens », soutient-il. 

Pour le professeur Chandradeo Bokhoree, le logiciel TRANSMET qu’utilise le MMS a fait son temps. Selon lui, la remise à niveau du réseau informatique et l’acquisition de nouveaux équipements et de logiciels permettront une utilisation efficace du Synergie-Web, un système d'information de prévision météorologique moderne que le MMS compte utiliser. « Cela va de soi. Toutefois, l’acquisition du Synergie-Web doit être accompagnée d’une formation pour les techniciens et les prévisionnistes afin qu’ils puissent utiliser efficacement le système et améliorer les prévisions météorologiques », souligne-t-il. Et la construction d’un nouveau Head Quarters pour accommoder tous ces équipements et personnel va dans la bonne direction. « Il se peut que les inexactitudes des prévisions du passé étaient liées à ce manque d’équipement, de logiciel et de formation. Mais maintenant, les prévisionnistes auront à leur disposition les moyens nécessaires pour améliorer leurs prévisions », considère-t-il. 

MFRS. Si le professeur Chandradeo Bokhoree accueille favorablement l’idée de mettre sur pied 16 « satellite fire stations » dans le but d’améliorer le « reaction time » des pompiers lors des interventions, notre interlocuteur fait toutefois ressortir que pour les exercices d’évacuation, par exemple, le MFRS n’opère pas en isolation. « Souvent, d’autres unités rentrent en jeu, comme la Special Mobile Force, par exemple », fait-il remarquer. 

Dans cette même veine, le professeur est d’avis qu’il faut former davantage les officiers qui font la coordination dans les collectivités locales sur la gestion des désastres et du changement climatique. « Ainsi, lorsqu’il y a un désastre, ils pourront être présents sur le terrain et s’occuper efficacement de leur juridiction. Et pourquoi ne pas venir avec un département ‘full-fledge’ dans chacune des collectivités locales ? » demande-t-il. Des formations sur la gestion des catastrophes, rappelons-le, sont offertes à l’University of Technology of Mauritius (UTM) depuis 2019.

NDRRMC. Le professeur Chandradeo Bokhoree indique que le système de messages d’alerte en cas de catastrophes existe déjà dans de nombreux pays et aurait fait ses preuves. S’il juge louable que le National Disaster Risk Reduction and Management Centre (NDRRMC) vienne avec ce système, il attire toutefois l’attention sur son efficacité. « Le ‘major stakeholder’ dans ce système est le public. Nous connaissons l’incivisme de certains qui n’hésitent pas à braver les interdits pour sortir lors de périodes cycloniques, quitte à aller se baigner en mer. De ce fait, une évaluation de l’efficacité du système sera primordiale une fois celui-ci en place », suggère-t-il. 

Le profil de risque de Maurice : Collectons nos propres données

Le professeur Chandradeo Bokhoree est d’avis que Maurice gagnerait à enregistrer ses propres données pour mesurer son niveau de risque aux catastrophes naturelles. Actuellement, précise-t-il, ce sont des organisations internationales qui s’en chargent, lesquelles sont venues avec un classement des pays les plus à risque. Il explique que de nombreuses données sont nécessaires pour établir ce classement et elles ne sont pas forcément toujours précises. « D’où la nécessité de collecter nos propres données et de venir avec notre propre indice en matière de changement climatique et de désastres », affirme-t-il. Le professeur Chandradeo Bokhoree considère que le National Disaster Risk Reduction and Management Centre (NDRRMC) peut entreprendre ce travail avec l’aide de certaines institutions tertiaires. 

 

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