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Dans le rétroviseur : les variants ralentissent le rythme de la reprise

2021 devait être l’année de l’espoir en une reprise soutenue après une contraction de près de 15 % l’an dernier. Mais les performances sont en dessous des attentes. Six économistes livrent leurs opinions sur ce qu’ils retiennent de 2021.

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Une année…

...de lent démarrage

Azad JeetunAzad Jeetun

« Il y a eu le redémarrage de l’économie, mais il est assez lent.  C’est compréhensible car la pandémie est toujours là et la situation reste toujours difficile sur les plans international et local. Par ailleurs, il n’y a pas eu beaucoup de politique appropriée pour pouvoir relancer l’économie. »

Points positifs

  • La réouverture des frontières.
  • Une croissance positive cette année, même si le taux n’est pas élevé.

Point négatif

  • L’inflation est de retour et le chômage reste présent.

À surveiller

  • La dépréciation de la roupie est à surveiller et est à gérer.

…de lente reprise

Georges Chung

Georges Chung

« Après l’année de la grande dépression en 2020, nous connaissons en 2021 l’année de la lente reprise. Après une contraction d’environ 15 % l’an dernier, l’année qui s’ensuit est celle de la récupération. Or, s’il y bien une reprise, elle est très lente. C’est en raison de la fermeture des frontières et de la persistance du virus ».

Point positif

  • Il n’y a pas eu vraiment de points positifs car le pays n’a pas su innover et lancer de nouvelles activités, affirme Georges Chung.

À surveiller

  • Le variant Omicron que Georges Chung espère va ressembler à un rhume, malgré sa grande contagion tout en souhaitant que les autorités lanceront de nouveaux projets en 2022.

Point négatif

  • La persistance du virus, soutient l’économiste, n’a pas aidé à fouetter la machine économique.

… de l’espoir

Manisha Dookhony

 « 2021 symbolise l’année de l’espoir, l’espoir sur la vaccination, sur la reprise économique et sur la réouverture des frontières. Ceci dit, on reste sur notre faim, car malgré les vaccins, le virus continue à se propager. En dépit du soutien du gouvernement, beaucoup d’entreprises rencontrent toujours des difficultés. Les coûts de production ont augmenté en raison de l’augmentation du fret et des prix des matières premières. On retient aussi cette année la perte du pouvoir d’achat des Mauriciens ».

Points positifs

  • Les hôtels fonctionnent de nouveau et certains établissements sont en train de recruter.
  • Le pays n’est plus sur la liste grise du Groupe d’action financière (GAFI). Ce qui vient soulager le secteur financier.
  • Maurice n’est plus en dépression économique. La situation demeure difficile, mais plusieurs activités continuent d’opérer.

À surveiller

  • L’inflation qui prend l’ascendant. « Actuellement, nous connaissons une inflation importée, mais le risque que les entreprises, ne pouvant plus de rogner sur leurs marges, passent les coûts aux consommateurs est là. Nous connaîtrons alors une spirale inflationniste », appréhende l’économiste.
  • La situation au niveau de l’emploi. Certes, certains secteurs recrutent, mais d’autres licencient, observe Manisha Dookhony.

Points négatifs

  • Tout est cher : les produits de consommation tout comme les matières premières.
  • L’omniprésence des variants rend les déplacements plus difficiles.

...de perdue

Sudesh Lallchand

Sudesh Lallchand

 « 2021 est une année de perdue, car économiquement, la croissance reste très faible. Or, il faut une augmentation de la croissance pour qu’il y ait création d’emploi et de richesse. Cette situation est due au fait que la pandémie est toujours une menace et qu’il y a une mauvaise gestion de l’économie du pays. Par ailleurs, une leçon majeure sur le plan économique à retenir en 2021 est que les prix des produits de base à Maurice ont augmenté de manière abusive, sans justification dans la plupart des cas. Cela a gravement touché la classe ouvrière, et les autorités n'ont pas réussi à protéger les consommateurs de cet abus généralisé. Les pauvres et la classe moyenne se sont appauvris. C'est un fait ! »

Points positifs

  • Les compagnies ont revu leur fonctionnement et ont réduit les dépenses et les gaspillages.
  • Le télétravail et les avancées technologiques ont pris de l’ampleur.
  • Les consommateurs font plus attention à leurs dépenses.

À surveiller

  • La gestion sanitaire.
  • Les conditions à créer pour permettre au secteur privé de prendre son envol.

Points négatifs

  • Le pays n’a pas beaucoup avancé sur le plan économique.
  • Une mauvaise gestion de l’économie.

…de la nouvelle normalité

Rajeev Hasnah

Rajeev Hasnah

« 2021, c’est l’année de la nouvelle normalité. Le pays est sorti de sa bulle ‘Covid-19 free’ et a appris à vivre avec la pandémie. Nous avons pu relancer l’activité économique et nous adapter afin de pouvoir vivre et travailler avec la Covid-19 ».

Point positif

  • L’ouverture des frontières.

À surveiller

  • Continuer à s’adapter à la nouvelle normalité.
  • Bâtir une bonne image du pays.

Point négatif

  • Le retour en force de l’inflation couplé avec une croissance anémique.

…de chamboulements

Dr Takesh Luckho

Dr Takesh Luckho

« Les variants Delta et Omicron sont venus chambouler les plans de relance pour 2021. Les estimations avancées en termes de croissance ou encore d’arrivées touristiques se sont avérées inférieures aux prévisions initiales ».

Points positifs

  • Le pays s’est mieux adapté à la deuxième vague. « Le confinement a été moins strict cette année et certaines activités ont été maintenues malgré le deuxième lockdown », fait ressortir l’économiste.
  • Les opérateurs ont pu avoir un aperçu du tourisme local. « C’est un créneau, avec le tourisme régional, à exploiter davantage », ajoute-t-il.
  • Le pays est sorti de la liste grise, une inclusion qui avait fait perdre des clients au secteur financier.

À surveiller

  • Revoir notre stratégie pour vivre avec le virus et adapter notre économie en conséquence.
  • Créer de nouveaux pôles de croissance, dynamiser les industries existantes et miser davantage sur les secteurs à fort potentiel comme les Tic, par exemple. « Ce qui permettra aussi d’absorber les 2 000 à 3 000 gradués qui se retrouvent sur le marché de l’emploi chaque six mois », ajoute l’intervenant.

Points négatifs

  • Sur le plan sanitaire, Maurice n’a pas appris des erreurs des autres pays, affirme Takesh Luckho. Ce qui a permis au variant Delta de se propager dans le pays.
  • Les mesures contenues dans le Budget sont du déjà-vu. « Il n’y a pas eu les reformes qui nous auraient permis de rebondir. Or, c’était le moment de venir avec des changements structurels et des stratégies spécifiques pour le tourisme par exemple », se désole l’économiste.
  • Pour Takesh Luckho, il y a beaucoup de scandales de mauvaise gouvernance qui affectent l’image du pays et le niveau de confiance.

Kevin Ramkaloan

Kevin Ramkaloan, CEO de Business Mauritius : « Malgré les incertitudes liées aux variants, nous enregistrons une progression de notre économie »

« Il est temps de permettre aux entreprises de retrouver leur agilité au plus vite. »

Après une année 2020 extrêmement éprouvante, 2021 a été synonyme d’espoir. Car elle a été marquée par une série de bonnes nouvelles : réouverture des frontières, succès de la campagne de vaccination et sortie de Maurice de la liste grise du GAFI. Telle est l’observation de Kevin Ramkaloan, Chief Executive Officer de Business Mauritius qui, cependant, fait un appel à tout un chacun pour rester vigilant. « Le variant Omicron est une menace à ne pas prendre à la légère », tient-il à faire ressortir.

L’an 2021 tire à sa fin. Comment les entreprises ont-elles vécu cette année marquée par une mutation du Coronavirus donnant naissance à divers variants, un deuxième confinement et la réouverture des frontières ?
2021 a été une année en dents de scie. Malgré les incertitudes liées aux variants, nous enregistrons une progression de notre économie. D’une part, nous avons favorablement accueilli la réouverture des frontières qui était essentielle pour notre économie. Et ce, en respectant les règles sanitaires et les campagnes de vaccination. Suite à cette réouverture, il y a eu une belle reprise dans le tourisme. Toutefois, cet élan a été perturbé par l’arrivée d’Omicron.

D’autre part, le pourcentage de vaccinés à deux doses est une réussite. Il s’agit maintenant de passer à la booster dose qui est d’une plus grande efficacité. Outre la vaccination et la réouverture des frontières, l’autre bonne nouvelle de cette année est la sortie de Maurice de la liste grise du Groupe d’action financière (GAFI) et de la « High-risked countries list » du Royaume-Uni. Maintenant, nous attendons notre sortie de la liste noire de l’Union européenne.

Pour ce qui est de la performance des entreprises cette année, la situation est plutôt mieux que prévu si l’on se base sur un sondage que nous avons effectué à la mi-2021 en collaboration avec l’United Nations Development Programme (UNDP) et Statistics Mauritius. Ainsi, 70 % des entreprises sondées ont déclaré qu’elles étaient à un niveau normal des opérations et qu’il y a même des perspectives de croissance, notamment pour le secteur d’exportation.

Et pour ce qui est des difficultés encourues par les entreprises, elles sont liées particulièrement à l’augmentation du coût du fret. Quant à la dépréciation de la roupie, elle a contribué à rendre le secteur d’exportation plus compétitive. Mais d’un autre côté, elle a rendu plus cher le coût de nos intrants. Il y a aussi le problème de manque de main-d’œuvre. À titre d’exemple, en cette fin d’année, le tourisme et le secteur manufacturier ont dû mal à recruter.

J’aimerai aussi ajouter que la biomasse est une très bonne initiative qui nous permettra de nous rapprocher de nos ambitions d’atteindre un niveau de 60 % d’énergies renouvelables d’ici 2030.

Peut-on dire que l’économie mauricienne a amorcé sa phase de reprise depuis le second semestre ?
Nous avons entamé la reprise, mais il y a des « downsides » qui ne jouent pas en notre faveur en ce moment. Nous faisons face, notamment à deux pressions externes : le variant Omicron et son impact sur nos marchés principaux, notamment l’Afrique du Sud et l’Europe.

En dépit du différend sur la Contribution sociale, le gouvernement et le secteur privé ont collaboré étroitement sur des dossiers prioritaires, telle la réouverture des frontières. Dans quelle mesure la coopération public-privé devrait-elle participer à la relance de l’économie ?
Cette collaboration public-privé est une condition sine qua non pour une reprise. Nous avons consolidé cette coopération cette année pour la réouverture des frontières, la campagne de vaccination et la sortie de Maurice de la liste rouge écarlate de la France. Il y a aussi le travail enclenché par le ministère des Finances pour les commissions économiques qui a pour but de structurer les fondamentaux d’une reprise plus pérenne. Nous proposons une intensification de cette collaboration autour des enjeux sur le développement durable et inclusive ainsi que pour le secteur de la santé en ces temps de pandémie.

Face aux incertitudes sur le marché de l’emploi, le gouvernement a décidé d’étendre la dérogation empêchant les licenciements économiques jusqu’à juin 2022. Comment Business Mauritius accueille-t-elle cela ?
Nous avons pris note de cette extension. Pour nous, il est temps de permettre aux entreprises de retrouver leur agilité au plus vite, surtout que cette mesure a été mise en place pour des secteurs, tels que le tourisme et l’exportation qui, aujourd’hui, font face eux-mêmes à un manque de main-d’œuvre.

L’année 2022 s’annonce-t-elle sous de meilleurs auspices ?
Il est difficile à ce moment précis de se prononcer sur 2022. L’impact du variant Omicron reste à être vu. Idem pour son effet sur nos marchés principaux. Il faudrait rester prudemment optimistes et certainement s’atteler aux enjeux que nous pouvons contrôler, telle la compétitivité, la productivité et la diversification de nos produits et de nos marchés.

 

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