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Court of Investigation sur l’échouement du MV Wakashio : un sac de nœuds à défaire 

Le second (Chief Officer) du MV Wakashio avait affirmé avoir suivi les ordres du capitaine alors que c’était lui qui manœuvrait. Il dit n’avoir pas contesté les ordres de son supérieur.

Depuis le 19 janvier siège la Court of Investigation sur l’échouement du Wakashio. À ce jour, une quarantaine de personnes ont été appelées à témoigner. Cependant, certains témoignages ne corroborent pas avec l’enquête préliminaire menée par la police et le ministère de l’Économie océanique, à travers le capitaine, Asiva Coopen, numéro deux du département de la navigation. D’autres témoignages sont contradictoires. Il y a même des incriminations mutuelles.  

Les travaux du président de la cour d'investigation, l’ancien juge Abdurafeek Hamuth, assisté de Jean Mario Geneviève, Marine Engineer et Marine Surveyor et de Johnny Lam Kai Leung, Marine Surveyor, ont permis de relever plusieurs contradictions. La majeure partie est survenue lorsque les marins du MV Wakashio ont été auditionnés. Cependant, les plus grosses contradictions proviennent de la thèse de captage de réseau, des appels entre la National Coast Guard et le MV Wakashio et la responsabilité de la manœuvre par le capitaine et son second.  

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Le captage du réseau 

Le 25 janvier, deux marins : Antony Rabosa Baja, troisième officier, et Jomar Unica, quatrième ingénieur, soit le « birthday boy » du 25 juillet 2020, avaient évoqué qu’ils ne peuvent pas capter de réseau à Maurice. 

Dans sa déposition, le capitaine Sunil Kumar Nandeshwar avait affirmé que suite à l’échouement, les membres de l’équipage avaient demandé à ce que le capitaine rapproche le MV Wakashio des côtes pour qu’ils captent le réseau internet. Mais Antony Rabosa Baja et Jomar Unica lui avaient contredit : « Avec les cartes SIM que nous utilisons, nous ne captons pas de connexion à Maurice. Je ne sais pas si les autres ont demandé, mais je ne suis pas au courant d’une telle demande. D’ailleurs, c’est le Capitaine qui décide », avait affirmé le troisième officier. Euliogio Espellarga et d’Amisto Sarausos, second et troisième ingénieur du MV Wakashio, avaient aussi affirmé que leurs cartes SIM ne captaient pas le réseau à Maurice. 

Durant la deuxième semaine de février, Hitihamillage Subodha Janendra Tilakaratna, le second du capitaine (Chief Officer) avait été auditionné. Ce dernier avait affirmé que le capitaine avait pour habitude de faire des déviations pour capter le réseau.  

Qui voulait capter le réseau ? 

Sunil Kumar Nandeshwar avait, lui, affirmé que c’est le Chief Officer qui voulait capter le réseau Internet. Pour sa part, le Chief Officer avait dit que c’est le capitaine qui voulait capter le réseau mobile à Maurice et que Sunil Kumar Nandeshwar lui, même, aurait demandé de lui prêter son téléphone.

Prise de décision – à qui la faute ? 

Le Chief Officer avait cité de mauvaises décisions du capitaine qui a mené à l’échouement. Le capitaine Sunil Kumar Nandeshwar avait, lui, rejeté la faute de l’échouement sur son second. Ce dernier n’aurait pas suivi les ordres, selon le capitaine. Cependant, Hitihamillage Subodha Janendra Tilakaratna devait rejeter la faute sur le capitaine en affirmant qu’il a utilisé les mauvaises cartes et donné les mauvais ordres. 

Des données dysfonctionnelles  

Hitihamillage Subodha Janendra Tilakaratna a expliqué que « le capitaine a pour habitude de passer à cette distance des côtes pour capter le réseau. Il avait dit qu’il avait navigué dans les eaux mauriciennes plusieurs fois. C’est lui qui avait modifié les coordonnées. Je ne pouvais pas le contredire, il est comme un dieu à bord ». 

D’ailleurs, le second a affirmé que dans la soirée du 25 juillet 2020, son capitaine lui avait demandé de poursuivre la route indiquée sans se fier aux appareils alors que ces derniers affichaient la distance du fond marin. Arrivé un moment, l’alarme de proximité avec le sol s’était déclenchée. 

Il a aussi raconté que trois minutes avant l’incident, l’alarme de l’échosondeur (un appareil qui mesure la profondeur sous le navire) avait retenti. Pourtant le second avait tenté de corriger la trajectoire, mais le capitaine lui aurait exhorté de maintenir le cap. Le second a affirmé que le capitaine avait donné l’ordre de tourner de 2,30 degrés alors que le navire était à moins de 17 miles de Maurice et filait à 11 nœuds. 

Le capitaine qui incrimine son second 

Autre contradiction relevée, c’est la responsabilité de la manœuvre. Si le second a affirmé qu’il a obéi au capitaine, cependant Sunil Kumar Nandeshwar a dit le contraire. « C’est à la requête du ‘Chief Office’ que j’avais accosté l’île Maurice, mais personne n’en était au courant ». Le 16 février 2021, lors de son audition, le capitaine avait révélé qu’il n’y avait pas d’Internet à bord du navire et qu’il avait accepté de s’approcher de Maurice à la requête des marins. Toutefois, il devait affirmer que le Chief Officer n’avait pas respecté le trajet du MV Wakashio. Selon le capitaine, il avait donné des directives à son second. Et d’ajouter qu’il avait remarqué que le Chief Officer n’avait pas suivi ses instructions en consultant le Voyage Data Recorder (VDR).  Il avait même dit qu’il n’avait pas pris les commandes du navire, car il avait bu. « C’est vous le capitaine !  Vous aurez dû éviter de consommer de l’alcool au point de perdre le contrôle », lui avait, alors, lancé l’ancien juge Abdurrafeek Hamuth. 

Le capitaine accepte son erreur lors de l’enquête préliminaire 

« Le capitaine du MV Wakashio a accepté son erreur. » C’est ce qu’avait affirmé le capitaine Asiva Coopen, Deputy Director of Shipping, le 19 janvier 2021. Ce dernier avait mené une enquête préliminaire sur l’échouement du MV Wakashio. Toutefois, devant la Court of Investigation, le capitaine était revenu sur sa déposition pour incriminer son second. 

L’enregistrement des appels – la pagaille 

Hitihamillage Subodha Janendra Tilakaratna avait affirmé n'avoir jamais reçu d'appel de la National Coast Guard et qu'au moment où l'alarme s'est déclenchée, le capitaine visionnait un film. Pourtant le 20 janvier, lors de l’audition de l’ex-chef de la NCG, le Commandant Manu, le relevé des appels avait été épluché. Des appels ont été passés des postes de la NCG de Mahebourg, Blue-Bay et Pointe-du-Diable. Cependant, seul l’appel passé par le poste de la NCG de Blue-Bay avait été enregistré par le MV Wakashio le jour du naufrage. Mais le commandant Manu n’avait pas pu répondre à cette question. Il avait été auditionné le 20 janvier 2021. Pourtant, cinq appels avaient été enregistrés dans le Log Book du poste de la NCG de Pointe-du-Diable alors que les appels étaient enregistrés au nom de Blue-Bay. 

Pour ajouter à cela, le 23 juin 2021, le constable Jean Alvinio Latour de la NCG de Mahebourg devait affirmer à la cour que son collègue qui opérait la radio dans la nuit du 25 juillet 2020 lui avait parlé d’un navire qui ne répondait pas et que la situation avait été jugée « pas importante ». 

Des cartons de whisky et de bière avaient été embarqués."

Une bouteille au poste de commande

Il y avait une bouteille d’alcool au poste de commande. C’est ce qu’a confirmé Hitihamillage Subodha Janendra Tilakaratna. Le capitaine était parti pour la salle commune des marins vers 16h55 (là où se tenait la fête d’anniversaire). Hitihamillage Subodha Janendra Tilakaratna a raconté que le « mess boy » avait apporté des verres au poste de commande. 

La consommation d’alcool à bord 

Jaime Hiplito Jr, oiler, Lindre Decastillo Bajon, bosun (deck master), Arwin Ken Cuaton, wiper, et Roel Decrepito Santuyo, matelot, avaient tous déposé en janvier/février. La révélation était venue de Lindre Decastillo Bajon. Lors du ravitaillement à Singapour, Lindre Decastillo Bajon avait avoué que des cartons de whisky, contenant six bouteilles par carton, et cinq cartons de bière, contenant 24 cannettes par carton, avaient été embarqués. Selon le bosun, c’est le capitaine qui aurait ordonné l’achat de ces boissons et que le fonds proviendrait de lui. Pourtant, autant d’alcool n’est pas autorisé à bord du Wakashio avait affirmé le Bosun (deck master), Lindre Decastillo Bajon. 

 

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