- Vers une inflation de 11,4 % cette année
Si la situation économique à Maurice s’est améliorée depuis la pandémie, la reprise se fera à un rythme plus lent que prévu en raison de la guerre en Ukraine et des pressions inflationnistes, prévient le Fonds monétaire international (FMI) dans ses conclusions sur l’Article IV Consultation, publiées le 17 juin dernier.
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«L’économie mauricienne se remet de la pandémie après une contraction substantielle en 2020 (Ndlr : la contraction était de l’ordre de 14,9 %). L’impact sanitaire de la pandémie a été géré avec succès, notamment par une campagne de vaccination couvrant plus de 90 % de la population éligible en mai 2022 », indique le FMI. L’institution de Bretton Woods observe que la croissance a commencé à se redresser. La plupart des secteurs a globalement retrouvé son niveau de production d’avant la pandémie, à l’exception du tourisme, où l’activité reste modérée, observe le FMI.
D’ailleurs, le FMI a maintenu ses estimations pour la croissance, soit de l’ordre de 6,1 % en 2022. « Le rebond économique sera principalement tiré par le tourisme. Les arrivées touristiques devraient atteindre 60 % de leur niveau pré-pandémique. Le chômage devrait diminuer à mesure que l’économie se redresse », souligne FMI.
S’agissant de l’inflation, le FMI table sur un taux à deux chiffres, soit de l’ordre de 11,4 % en 2022, en raison de la flambée des prix des produits de base, de la dépréciation passée de la roupie et de la reprise de la demande intérieure.
Ce qui pousse le FMI à dire que le principal défi de Maurice sera de poursuivre sa reprise économique, tout en contrôlant l’inflation dans un environnement mondial caractérisé par des prix élevés des carburants et des denrées alimentaires et une reprise plus lente. « La reprise à Maurice devrait se poursuivre, mais à un rythme plus lent que prévu avant la guerre en Ukraine, en raison d’une croissance plus faible chez les partenaires commerciaux, de perspectives moins optimistes pour les flux touristiques et d’une détérioration au niveau des échanges commerciaux. L’inflation a fortement augmenté en raison des goulots d’étranglement de l’offre mondiale, de la hausse des prix des carburants et des denrées alimentaires, des coûts de transport et de la dépréciation passée de la roupie », résume l’institution de Bretton Woods.
Le FMI a conclu son rapport en recommandant à Maurice de s’engager dans la transformation structurelle pour poursuivre sur la voie d’une croissance durable et résiliente à long terme. « Les priorités devraient être le renforcement de la diversification et de la compétitivité, y compris une plus grande numérisation de l’économie, et des politiques d’adaptation et d’atténuation pour faire face aux vulnérabilités du changement climatique », préconise-t-elle.
Les prévisions du FMI
2022 | 2023 | |
---|---|---|
Croissance | 6,1 % | 5,6 % |
PIB | Rs 520,1 milliards | Rs 581,3 milliards |
Dette publique (% du PIB) | 88,1 % | 86,1 % |
Réserves internationales du pays (en dollars) | 6,8 milliards | 6,37 milliards |
Inflation | 11,4 % | 5,8 % |
Chômage | 7,8 % | 7,5 % |
Vers une croissance de 3 % à 3,5 % sur le moyen terme
Le FMI indique que l’économie mauricienne devrait converger vers sa croissance pré-pandémique de 3 % à 3,5 % sur le moyen terme.
Ce que dit le FMI sur…
…la dette
« La trajectoire d’assainissement budgétaire doit être soigneusement calibrée afin de trouver un équilibre entre le redressement après la pandémie et la viabilité à long terme du budget et de la dette. Le respect des règles budgétaires reste essentiel pour préserver la viabilité budgétaire et réduire la vulnérabilité de la dette à moyen terme. »
« La dette publique est élevée après avoir augmenté pendant la pandémie. La performance budgétaire continue d’être affectée par la pandémie et les pressions renouvelées sur les dépenses courantes. Si l’économie continue de se redresser, les recettes devraient augmenter et les dépenses être réduites, notamment par une réforme du système de retraite, afin de placer la dette sur une trajectoire descendante à moyen terme. »
…la politique monétaire
« Le cycle de normalisation de la politique monétaire doit se poursuivre afin de minimiser les effets secondaires potentiels des chocs sur l’offre et de maîtriser l’inflation à moyen terme. Les pressions de l’offre sur l’inflation et les anticipations inflationnistes ont représenté un défi après la pandémie. La guerre en Ukraine ajoute à ces pressions et nécessitera une politique plus rigoureuse dans un environnement de plus en plus compliqué. »
« Le cadre de la politique monétaire doit être modernisé et la crédibilité et l’indépendance de la Banque centrale doivent être préservées. Le nouveau cadre de politique monétaire doit être mis en place rapidement afin de soutenir l’efficacité de la politique. Conformément au cadre de ciblage de l’inflation, la stratégie d’intervention en devises de la Banque de Maurice devrait viser à atténuer la volatilité, tout en permettant généralement une flexibilité du taux de change, facilitant ainsi l’ajustement macroéconomique. »
La soumission du rapport sous un « lapse-of-time basis » fait débat
L’Executive Board du Fonds monétaire international dit avoir conclu les consultations de l’Article IV avec Maurice sur la base d’un délai de grâce (lapse-of-time basis). Le FMI précise que son Executive Board prend des décisions sous la procédure de délai de grâce, quand le Board accepte qu’une proposition peut être examinée sans qu’il soit nécessaire d’organiser des discussions formelles. Or, en vertu des accords tombant sous l’Article IV, le FMI organise des discussions bilatérales avec ses membres, généralement chaque année. Une équipe du FMI se rend dans le pays, recueille des informations économiques et financières, et discute avec les responsables de l’évolution et des politiques économiques du pays. De retour au siège, les services du FMI rédigent un rapport qui sert de base aux discussions de l’Executive Board. Un moyen de procéder qui fait tiquer. « L’Executive Board du FMI n’a pas eu le temps d’examiner le rapport sur un pays africain ‘devenu ordinaire’. Ce qui fait que le Staff Report a été approuvé sur le principe de lapse-of-time basis. C’est dire que nous sommes tombés bien bas. Et cela même dans la ligue africaine, depuis que le MSM a pris le pouvoir et a transformé notre pays en kleptocratie… », commente Rundheersing Bheenick, l’ancien gouverneur de la BoM.
Le FMI maintient sa position sur la BoM, la MIC et le ciblage
Le FMI persiste et signe : il faudrait interdire des transferts de la Banque centrale au gouvernement. Il fait notamment référence au transfert de Rs 60 milliards. « Le gouvernement doit recapitaliser la Banque de Maurice conformément à la législation existante pour que la Banque centrale puisse supporter les coûts de la politique monétaire. Pour renforcer l’indépendance opérationnelle et la position financière de la BoM, la réforme de la loi sur la BoM doit interdire les transferts de la Banque centrale au gouvernement et le financement quasi-fiscal. L’abandon de la propriété de la Mauritius Investment Corporation (MIC) par la BoM serait également utile à cet égard », avance le FMI. L’institution de Bretton Woods insiste aussi sur le ciblage afin de soulager directement les plus vulnérables. « Le ciblage pourrait être nécessaire face à la forte augmentation des prix des denrées alimentaires et des carburants », ajoute-t-elle.
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