
Depuis le 13 mai, une hausse de 5 % du prix du ciment à Maurice pèse sur les budgets des ménages et des entreprises. Quel surcoût faut-il prévoir pour construire ? Cette augmentation annonce-t-elle une envolée des prix d’autres matériaux ? Éléments de réponse.
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Depuis le mardi 13 mai, le prix du ciment a augmenté de 5 % à Maurice. Désormais, un sac de 25 kg coûte entre Rs 178 et Rs 188, selon les régions. À Port-Louis, le prix est passé de Rs 169,80 à Rs 178, et à Savanne, de Rs 179 à Rs 188. Cette hausse, bien que qualifiée de modérée, ravive les inquiétudes concernant l’accessibilité à la construction dans un contexte d’inflation généralisée. Selon Suttyhudeo Tengur, président de l’Association pour la Protection de l'Environnement et des Consommateurs (APEC), cette hausse était prévisible. « Les prix des matières premières, comme le calcaire, ont fluctué dans les pays exportateurs. S’y ajoutent les coûts accrus du carburant et de l’électricité », dit-il. Il souligne également une demande mondiale en hausse de 4 à 5 %, ce qui exerce une pression supplémentaire sur les prix.
Deepak Doolooa, directeur de RD Construction et membre du board de la Construction Industry Authority (CIA), confirme que cette augmentation était inéluctable au niveau local. En revanche, Rishi Kowlessur, directeur de Kosari Contracting Ltd, estime que la hausse aurait pu être évitée. « Le coût du fret est en baisse et la roupie s’est appréciée face au dollar. Le gouvernement aurait pu intervenir pour stabiliser les prix »,
soutient-il. Ce dernier alerte aussi sur une baisse de la demande résidentielle. « Au premier trimestre de l’an dernier, nous avons concrétisé six projets sur dix demandes. Cette année, seuls deux projets ont été finalisés sur dix », précise-t-il. Pour lui, la hausse du prix du ciment risque d’aggraver cette tendance.
Les contracteurs s’accordent à dire que toute hausse des matériaux impacte inévitablement le coût des projets. Même une hausse de 5 % du ciment, un composant clé, disent-ils, peut avoir des conséquences significatives (voir encadré). Deepak Doolooa explique que les contrats déjà signés ne permettent pas de réviser les prix. « Ainsi, les entreprises doivent absorber les coûts supplémentaires, ce qui réduit leurs marges bénéficiaires. Pour les nouveaux projets, ces hausses seront répercutées, augmentant la facture finale des clients », fait-il ressortir. De son côté, Rishi Kowlessur ajoute que les projets résidentiels, souvent financés par des prêts bancaires, sont particulièrement touchés. « Si un prêt est déjà accordé, il est difficile de le réévaluer.
Les entrepreneurs devront accepter des marges réduites », dit-il. Mais pour les projets à venir, il avance que les clients devront supporter la hausse.
Suttyhudeo Tengur s’inquiète pour les ménages modestes. Pour lui, ces derniers pourraient devoir interrompre leurs projets, tandis que les classes moyennes pourraient devoir ralentir leurs chantiers. Il recommande de simplifier les conceptions architecturales, en optant pour des modèles modulaires, plus simples et moins coûteux.
Vif mécontentement
Le post de Defimedia.info intitulé « Ciment : le prix de la pochette de 25 kilos augmente de 5 % » publié sur Facebook le 13 mai dernier a atteint 249 000 vues. Il a généré 3 400 likes, 1 700 commentaires et 358 partages, reflétant un vif mécontentement des Mauriciens face à cette hausse.
Attentes dans le Budget 2025/26
Rishi Kowlessur, directeur de Kosari Contracting Ltd
« Face à la hausse constante des coûts de construction, le gouvernement doit prendre des mesures dans le Budget 2025/26. Il faut d’abord réguler les prix des matériaux. Actuellement, seul le ciment est contrôlé, mais d’autres matériaux cruciaux échappent à tout contrôle. Par ailleurs, il est nécessaire de revoir les taux d’intérêt et les conditions d’accès aux prêts immobiliers. De nombreux Mauriciens voient leurs demandes rejetées par les banques. Plus de souplesse en matière de financement serait bienvenue. »
Deepak Doolooa, directeur de RD Construction : «Il faudrait revoir la TVA sur la construction résidentielle»
« Il faudrait revoir, voire supprimer, la TVA sur la construction résidentielle. Par exemple, pour une maison de 1 500 pieds carrés coûtant Rs 5,25 millions, la TVA représente environ Rs 780 000. Les clients refusent souvent de la payer, ce qui nous oblige à l’inclure dans le prix final, rendant le coût total plus élevé et moins compétitif. Certains entrepreneurs illégaux n’incluent pas la TVA, attirant ainsi plus de clients au détriment des entreprises enregistrées. Par ailleurs, nous attendons un contrôle des prix des matériaux, notamment des barres de fer. »
Ciment
Rs 16 000 de plus à prévoir sur le coût de construction
Pour construire une maison de 1 500 pieds carrés, les entrepreneurs estiment qu’il faut au moins 20 palettes de ciment, soit 1 600 sacs de 25 kg (chaque palette contenant 80 sacs). À Rs 175 par sac, le coût du ciment s’élevait à Rs 280 000. Avec le nouveau prix moyen de Rs 185, ce coût passe à Rs 296 000, soit Rs 16 000 de surcoût dû à la hausse.
Hausse anticipée du prix des blocs dans les prochaines semaines
Rishi Kowlessur explique que, de manière générale, une augmentation du prix du ciment entraîne une hausse du prix des blocs. « En effet, les blocs sont fabriqués à partir de ciment. Ainsi, lorsque le coût des intrants augmente, l’impact sur le prix final devient inévitable », souligne-t-il. Deepak Doolooa partage cet avis. « Chaque hausse du prix du ciment se répercute sur celui des blocs. Une augmentation est donc à prévoir dans les semaines à venir », affirme-t-il.

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