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Concilier travail et vie privée : les avocats mis à l’épreuve

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Il est possible d’avoir une carrière enrichissante tout en passant du temps avec sa famille. Mais c’est difficile dans certains cas, font comprendre des hommes et femmes à la toge. En cette période de fête, ils partagent leurs expériences et anecdotes. 

Me Nirmal Busgopaul : « Je n’oppose pas ma vie professionnelle à ma vie privée »

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Me Nirmal Busgopaul.

Me Nirmal Busgopaul, qui exerce depuis janvier 2013, est catégorique. Sa vie professionnelle ne prend pas l’ascendant sur sa vie privée et vice versa. Car une vie, l’on en a qu’une. « Bien que ce soit deux aspects distincts, cela reste ma seule et unique vie », précise-t-il. 

Ainsi, l’avocat souligne qu’au moment où chaque aspect est d’actualité, il lui accorde l’importance nécessaire pour produire le meilleur résultat. « Je le fais afin de garder un équilibre entre mon engagement envers ma famille que j’aime et aussi envers les citoyens que j’ai promis de défendre », maintient l’homme de loi.  

Néanmoins, Me Nirmal Busgopaul concède que ce n’est pas toujours facile. « Un jour de fête en famille, ça se respecte. Et personnellement, je fais de mon mieux. Mais des fois, il faut également respecter les engagements qu’on a pris au niveau professionnel. S’il y a une urgence et que je dois être présent avec mon client, je dois impérativement respecter mes obligations », précise l’avocat. 

Malgré tout, il essaie tant bien que mal de consacrer du temps à sa famille. « Dans mon cas, j’ai une planification très stricte que je m’efforce de suivre à la lettre, même si cela n’empêche pas quelques écarts. »

En cas d’imprévus, l’homme de loi souligne qu’il est alors nécessaire de pouvoir s’adapter rapidement. « Être avocat, c’est l’exemple d’une profession qui est très agitée, très lourde en pression. Mais une fois qu’on intègre cette profession si noble, il y a des principes qu’il faut respecter », soutient Me Nirmal Busgopaul. 

L’avocat dit pouvoir compter sur le soutien de sa famille qui s’intéresse également à son travail. « Cela permet de renforcer les liens et apporte une certaine stabilité dans sa vie professionnelle et sociale. »

Il est toutefois conscient qu’il y a des choses que l’on ne peut compenser. « Je suis incapable de compenser mon absence auprès de mes proches. Alors, je m’assure que nos moments ensemble soient les meilleurs et mémorables. »

Me Rouben Mooroongapillay : « C’est difficile de s’investir dans la parentalité »

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Me Rouben Mooroongapillay et son fils.

Il a été impliqué dans des « high profile cases », notamment l’affaire Soopramanien Kistnen et plus récemment le cas de Bruneau Laurette. Lui, c’est Me Rouben Mooroongapillay. Il est d’avis qu’il est essentiel de trouver un équilibre entre la pratique du droit et la vie personnelle. 

« Être avocat est un métier aussi passionnant qu’exigeant et peut induire une difficile conciliation entre vie professionnelle et vie privée. Surtout si on exerce dans le domaine du pénal, où il y a bien souvent la crainte que les droits humains puissent être bafoués », explique Me Rouben Mooroongapillay.

Passionné par ce qu’il fait, il lui arrive souvent de faire des recherches et des enquêtes hors du tribunal, aux dépens de sa vie privée. C’est, en effet, très « time consuming ». « Mais quand on vit sa passion, il n’y a rien de meilleur et plus beau que la satisfaction du travail bien fait. »

Père célibataire, l’avocat raconte que pour chaque occasion, que ce soit pour les fêtes, un anniversaire, le Nouvel an et autres, toute une planification est effectuée pour marquer l’occasion. Or, il peut arriver que ce jour-là, il termine la journée ou la nuit au poste de police pour assister un client arrêté par la police.

L’homme de loi admet qu’il est difficile de s’octroyer un temps de pause satisfaisant, que ce soit pour soi ou pour s’investir dans la parentalité. Raison pour laquelle il est d’avis que s’il est important d’être disponible pour les clients, il faut que cette disponibilité soit dans la limite du raisonnable. Généralement, le client peut attendre s’il n’y a pas urgence, souligne-t-il. 

Me Rouben Mooroongapillay raconte qu’il a dû repousser à trois reprises un voyage prévu avec son fils, étant pris par le cas de Bruneau Laurette et deux autres « high profile cases ». Son fils, dit-il, s’impatiente de se retrouver avec lui, lui rappelant que les jours de vacances s’écoulent. 

Le père célibataire confie aussi qu’il lui est déjà arrivé de se rendre à un dîner organisé pour son anniversaire avec deux heures de retard. Ces situations sont stressantes pour sa famille qui doit tout le temps attendre. « Dès fois, la famille ne comprend pas quand je suis toujours en retard à cause de ma vie professionnelle. Cela se voit sur leur visage. Mais mon fils surtout s’impatiente pour avoir un ‘one to one quality time’ avec moi, surtout quand il est chez moi. »

L’homme de loi essaie tant bien que mal de compenser son absence auprès de ses proches. D’ailleurs, c’est devenu une coutume que les dîners lors des fêtes chez lui ne commence qu’après 21 heures. Il réunit les parents, la famille, les amis. Ou s’il rentre tôt, ils passent à table ensemble car c’est vraiment le seul moment où ils arrivent à discuter de tout et de rien. Il tente aussi de faire des sorties pendant les week-ends. « Principalement pour mon fils, j’essaie d’organiser un voyage autant que possible chaque année, pendant les vacances scolaires, afin qu’on se retrouve entre père et fils. »

Me Nushumi Balgobin-Kandhai : « Mes enfants sont habitués aux situations improvisées… »

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Me Nushumi Balgobin-Kandhai et son époux Ashwin Kandhai, également avocat.

Mariée à l’avocat Ashwin Kandhai et mère de famille, Me Nushumi Balgobin-Kandhai compte plus d’une vingtaine d’années d’expérience au barreau. Concilier le travail et la vie de famille, surtout en période de fête, n’est pas quelque chose d’impossible pour cette avocate. 

« Évidemment, quand on est avocat pénaliste, il peut est légèrement compliqué de faire la part des choses entre la vie privée et la vie professionnelle. Cela, compte tenu du fait qu’on est quelques fois appelé à travailler les jours fériés ou hors des horaires habituels », déclare Me Nushumi Balgobin-Kandhai. 

L’avocate pénaliste dit se rappeler avoir déjà assisté à l’interrogatoire d’un père de quatre enfants en bas âge au poste de police un 31 décembre jusqu’à environ 23 h 30. Ou encore, un 1er janvier où une douzaine de personnes s’étaient amassées devant sa porte pour un cas de rébellion. Il y avait également, raconte l’avocate, un jour férié où elle avait reçu des clients à 5 heures du matin. Ils étaient venus retenir ses services pour leur proche qui avait été arrêté dans le cadre d’un meurtre.   

Tout cela lui fait dire qu’il faut de la persévérance et beaucoup de patience pour faire ce métier. Dans son cas, elle le fait avec passion, bien qu’il lui faille un mental d’acier pour affronter les contraintes horaires.

Me Nushumi Balgobin-Kandhai concède néanmoins qu’il existe un empiétement de la vie professionnelle sur la vie privée, d’autant que son époux et elle sont tous deux avocats. « De nos jours, il arrive que mon époux Ashwin et les enfants m’accompagnent au poste si l’entretien avec un client n’est pas long. Les enfants sont ainsi habitués à des situations improvisées, même les jours de fête », souligne l’avocate. Il lui arrive même de devoir se déplacer après minuit pour se rendre au poste de police et d’autres fois, elle réveille son époux pour qu’il s’y rende à sa place, confie-t-elle dans un éclat de rire.

N’empêche, elle reconnaît qu’il faut également trouver un certain équilibre entre sa vie professionnelle et sa vie privée. « Comme la profession légale est libérale, on peut toujours disposer d’une grande latitude dans la gestion de notre temps », soutient l’avocate. Travaillant à son compte, elle a la flexibilité de gérer son emploi du temps en fonction de ses priorités du jour. « S’il y a un débordement de travail pendant plusieurs jours, je décroche les autres jours », fait ressortir la mère de famille. Elle révèle aussi avoir déjà pris un long congé sabbatique pour se concentrer à plein temps sur ses enfants en bas âge.

Me Nushumi Balgobin-Kandhai confie, d’autre part, qu’elle se fait un devoir d’organiser chaque année (avant la pandémie de Covid-19) un voyage d’environ un mois pour faire profiter les enfants. « Ce temps de qualité passé en famille est revigorant. »

Me Taij Dabycharun : « Je suis un accro du travail… »

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Me Taij Dabycharun en compagnie de sa mère et ses frères.

Pour Me Taij Dabycharun, fête ou pas fête, c’est le travail qui prime. Il ne s’en cache pas. Ce qui le motive, c’est de faire taire ses détracteurs et se faire un nom. « Je suis un accroc du travail. Et je suis convaincu que plus vous travaillez dur, plus vous progresserez et réussirez dans la vie. Ce qui vous permettra de donner à votre famille une vie aisée », soutient l’homme de loi.  

Il concède qu’il lui est difficile des fois de trouver un juste milieu entre sa vie professionnelle et ses proches durant un jour de fête. « La fête peut se faire à n’importe quel moment mais un client perdu ne retourne jamais », affirme l’homme de loi. Il y a plus de 1 000 avocats inscrits au barreau mauricien, rappelle-t-il. « Alors, si votre téléphone sonne et que vous obtenez un client, vous avez de la chance. Mais si vous ne décrochez pas, il se rendra chez un autre et vous serez le perdant. »

Cependant, cela dépend des circonstances également. « S’il y a une fête de famille et que celle-ci a déjà commencé et que je reçois un appel d’un client, cela dépendra si je n’ai pas consommé de boissons alcoolisées (rires). Si je l’ai fait, je ne pourrai pas assister mon client en vue de ma situation et je l’en informerai en conséquence. Ou sinon je l’assisterai, puis je reviendrai plus tard pour rejoindre mes proches », déclare l’avocat. Avant de préciser que, souvent, des problèmes peuvent être résolus par téléphone. 

D’autre part, l’homme de loi admet que le fait de partir travailler tôt le matin et de rentrer tard le soir agace un peu ses proches, mais rien n’y fait, le boulot avant tout ! Quant à compenser son absence auprès de ses proches, Me Taij Dabycharun évoque une chose qui ne peut être retenue : le temps. « Le temps écoulé ne reviendra jamais, donc j’essaie du mieux que je peux de m’organiser pour être avec ma famille. Surtout, je ne rate jamais les anniversaires. »

Me Neeven Parsooramen : « Ma vie familiale est et sera toujours ma priorité »

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Me Neeven Parsooramen, son épouse et ses enfants.

Père de jumelles de quatre ans et d’un fils de deux ans, Me Neeven Parsooramen jongle au quotidien entre le travail et la vie familiale. C’est toujours difficile, avance-t-il, de concilier le travail et la vie familiale, d’autant que les enfants sont en bas âge. Et encore plus durant les périodes de fête. « Il est nécessaire de pouvoir évaluer l’urgence de la situation et donner priorité à ce qui est le plus urgent, même si la famille reste la priorité », déclare le père de famille. 

Ce n’est pas facile de gérer les imprévus professionnels, poursuit-il. Il est d’avis qu’il faut mettre en place une logistique adéquate qui permette d’amortir les imprévus afin de pouvoir décaler les exigences professionnelles. « Malheureusement, des fois on ne peut pas faire grand-chose pour le client et on n’a d’autre choix que de le référer à un collègue du barreau. »

L’avocat se dit chanceux d’avoir à ses côtés une épouse compréhensive, également avocate, Me Ashwina Rangasamy-Parsooramen. 

« Elle comprend les imprévus du métier, étant elle-même avocate ayant pratiqué au privé pendant quelques années. Elle a maintenant fait le choix d’être au sein d’une institution régulatrice. Cela fait que nous avons trouvé un équilibre », fait savoir Me Neeven Parsooramen. Il ne manque pas de faire ressortir qu’il bénéficie également de l’aide des grands-parents. Vu que les enfants sont encore petits, il va falloir qu’ils s’adaptent au fur et à mesure qu’ils grandissent. 

L’avocat s’assure d’être impliqué à fond durant les moments dédiés à la famille. « Je suis généralement de nature à vivre au maximum le temps présent. Du coup, comme avec les dossiers que je traite, quand je suis avec la famille, mon épouse et mes enfants, je leur consacre 101 % de moi-même. » 

Il essaie au maximum de diviser les 24 heures de la journée en trois parties. Soit 8 heures pour le travail, 8 heures pour la famille et 8 heures pour le repos. 

Anecdote

Quitter le déjeuner de famille en trombe un 1er janvier 

Les anecdotes ne manquent pas dans la carrière de Me Neeven Parsooramen. Un 1er janvier, raconte-t-il, il avait dû quitter en trombe le déjeuner de famille pour porter assistance à un touriste brésilien. 

Ses services avaient été retenus par un des directeurs d’un groupe hôtelier pour lequel il travaille. Le touriste brésilien, qui y séjournait, s’était fait arrêter par l’Immigration le 31 décembre. Il avait en sa possession un « baby-gun » qu’il avait acheté comme cadeau de Noël pour son fils, quelques jours plus tôt en Afrique du Sud. N’étant pas au courant de nos lois, le touriste est arrivé à Maurice avec l’article. Et au moment de son départ, il a été arrêté. 

Ainsi, le 1er janvier, l’homme de loi avait dû se rendre à l’aéroport et prendre contact avec le consulat du Brésil à Maurice. Son client avait par la suite pu regagner l’hôtel le jour de l’An et est rentré chez lui au Brésil après s’être acquitté d’une amende. 

 

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