Live News

Avis de fortes pluies : faut-il privilégier des alertes météorologiques régionalisées ?

Publicité

Est-il temps d’instaurer un système d’alertes météorologiques régionales pour ne pas « prendre en otage » la partie de l’île qui ne subit pas les intempéries ? Une question qui suscite des débats parmi les internautes et les professionnels de la météo.

sok
Soobiraj Sok Appadu.

Le beau temps sur la moitié ouest de Maurice, alors que l’autre partie a été copieusement arrosée a été diversement commenté par les internautes hier. Certains d’entre eux plaident même pour un système d’alertes « régionalisées ». Vassen Kauppaymuthoo, ingénieur en environnement et océanographe, et Soobiraj Sok Appadu, ancien directeur de la station météorologique de Vacoas, livrent leurs réflexions.

D’emblée, Soobiraj Sok Appadu se dit contre des alertes « localisées ». Il considère néanmoins que cela mérite une réflexion « sérieuse » avant toute prise de décision. Émettre des alertes météorologiques est assez complexe, fait-il ressortir. « Comment peut-on fermer les écoles sur une moitié du pays et laisser les autres opérer normalement ? Ce sera comme de la discrimination », indique-t-il. De plus, Maurice, étant une petite île, témoigne d’une grande mobilité de la masse des travailleurs. De ce fait, il est fort probable qu’un grand nombre d’entre eux habitent la partie de l’île où il fait beau et doivent aller travailler dans des régions frappées par de violentes intempéries ou vice versa. 

L’ancien directeur de la station météorologique de Vacoas ne remet pas en question le système d’alerte national. Cependant, il estime que celui-ci doit évoluer afin d’aider l’économie du pays et le développement social. Il plaide ainsi en faveur d’une réflexion bien sérieuse sur le sujet. Toutes les implications d’un éventuel changement doivent être prises en considération, insiste-t-il, tout en faisant remarquer que les systèmes météorologiques ne sont pas statiques. Ceux-ci sont souvent imprévisibles et évoluent rapidement, d’où la complexité de toute décision.

vassen
Vassen Kauppaymuthoo.

Vassen Kauppaymuthoo partage l’opinion de Soobiraj Sok Appadu sur le problème de la mobilité des travailleurs. Certains d’entre eux risquent de se retrouver coincés par le mauvais temps. « Le système d’alerte doit rester national, car il vaut mieux prévenir que guérir », martèle-t-il. Pour lui, la station météorologique de Vacoas a fait preuve de sagesse en émettant l’alerte de fortes pluies tôt mardi matin, même si cela a déplu aux Mauriciens, eu égard aux inconvénients. 

« Certes, cette décision n’a pas plu aux Mauriciens qui ont été pris au dépourvu et ont dû s’organiser à la dernière minute pour la garde de leurs enfants. Cependant, il faut avant tout prendre en considération l’aspect sécuritaire. Si la station météorologique n’avait pas émis d’alertes et qu’il y avait eu mort d’homme, elle aurait essuyé une pluie de critiques »¸ déclare-t-il. Selon Vassen Kauppaymuthoo, d’autres scénarios similaires peuvent se reproduire avec du beau temps dans une région et de fortes averses localisées dans une autre. Il rappelle que cela a été le cas le 30 mars 2013, quand Port-Louis a connu des « flash floods », alors que le beau temps prévalait ailleurs dans le pays. 

Avec les cellules convectives qui sont instables et évoluent rapidement, il est difficile de prévoir le devenir d’une masse nuageuse et la direction qu’elle va prendre. Quand de tels systèmes sont détectés, il faut simplement prendre ses précautions et se mettre à l’abri. « Nous avons eu deux confinements en raison de la Covid-19. Il faut maintenant se préparer à être en confinement à la suite des intempéries liées au changement climatique », conclut-il.

Réservoirs : taux de remplissage de 32,4 % 

La situation est toujours critique dans les divers réservoirs du pays. De 33,3 % le 6 janvier, le niveau est descendu à 32,4 % en dépit des récentes averses. Une situation causée par le fait que les pluies ne sont pas tombées dans les régions où sont situés les réservoirs. Il faudra attendre quelques jours pour avoir une meilleure idée de leur apport.

eau

124,4 mm de pluie à Plaisance en 12 heures

La pluie est tombée dans diverses parties de l’île le mardi 10 janvier et c’est la région de l’aéroport SSR, à Plaisance, qui a enregistré la plus forte pluviométrie avec 124,4 mm de 4 heures à 16 heures hier. Selon les chiffres de la station météorologique, c’est la moitié est de l’île qui a été le plus arrosé avec 58,6 mm à Queen-Victoria, 56,0 mm à Bambous-Virieux, 54,6 mm à Belle-Mare et 47,0 mm à Mon-Loisir S.E, entre autres.

Pluviométrie (en mm)  de 04h à 16h le mardi 10 janvier 2023
Station mm Station mm
Albion 5,0 Montagne des Signaux 4,8
Bambous-Virieux 56,9 Nouvelle-Découverte 30,7
Beau-Bassin 3,8 Pamplemousses 17,9
Beaux-Songes - Plaisance (SSR Int. Airport) 124,4
Bell-Village 2,6 Port-Louis (Line Barracks) 5,6
Belle-Mare 54,6 Providence 29,2
Bois-Mangues 22,8 Quatre-Bornes 16,9
Champ de Mars 10,4 Quatre-Soeurs 39,4
Chitrakoot 12,7 Queen Victoria 58,6
Domaine Les Pailles 0,4 Riche-en-Eau 36,6
Grand-Bassin 12,2 Riche-Terre 5,0
Le Morne 7,8 Rivière-des-Anguilles 24,3
Mare-aux-Vacoas 11,5 Rivière-Noire 12,8
Moka 9,0 Rose-Belle 39,2
Mon-Bois 22,0 St-Félix 11,2
Mon-Loisir (Rouillard) 26,8 Vacoas 17,5
Mon-Loisir Sugar Estate 47,0 Wooton 20,4

 

Un système d’alerte régional à l’étude

La station météorologique de Vacoas étudie la possibilité d’émettre des alertes météorologiques régionales. Toutefois, Maurice étant un petit pays, ce sera difficile de le mettre en pratique, du moins pour le moment, car la marge d’erreur serait trop grande. C’est ce qu’explique Prithiviraj Booneeady, directeur par intérim de la station de Vacoas. 

En météorologie, tout ne se déroule pas comme prévu et il peut y avoir des changements à la dernière minute. Il prend pour exemple les grosses averses du mardi 10 janvier. Celles-ci, d’après les indications, étaient attendues particulièrement sur le plateau central. Or elles étaient plus concentrées du côté est de l’île. Il faudrait ainsi plusieurs années avant de pouvoir envisager l’application d’un système d’alertes régionales.

La station météorologique devient la risée des internautes 

L’avis de fortes pluies émis par la station météorologique de Vacoas à 4 heures, hier, a laissé pantoise une bonne partie de la population. C’était le cas particulièrement pour ceux chez qui le soleil brillait de mille feux et qui suffoquaient avec la chaleur. Ils avaient, en effet, du mal à comprendre pourquoi ils ont dû s’organiser pour la garde des enfants ou ne pas aller travailler en raison de l’avis de fortes pluies qui, selon les chiffres de la météo, n’a affecté que la moitié est de l’île principalement. 

D’où certains commentaires désobligeants à l’égard de la station de Vacoas. Cette dernière a été la risée des internautes sur les réseaux sociaux, surtout que les pluies annoncées se faisaient désirer. Les critiques ont été exacerbées par le beau temps qui a régné sur la moitié du pays. Entre-temps, plusieurs maisons ont subi les accumulations d’eau en raison des fortes averses sur le versant est de l’île. 

Des critiques qui font réagir Vassen Kauppaymuthoo. Il est d’avis que la station de Vacoas doit se moderniser davantage et améliorer sa communication. Néanmoins, il estime que le public ne devrait pas se fier aux éléments d’informations sur les différents sites. « La météo est une science pour faire des prévisions. L’ordinateur le plus puissant au monde n’arrive pas à modéliser la formation, le développement et l’évolution des nuages », souligne-t-il. 

Il ajoute que le cyclone tropical très intense Fantala a déjoué toutes les probabilités en avril 2016 quand il a emprunté la même trajectoire est-ouest à trois reprises. Une trajectoire statistiquement impossible à prédire, mais qui s’est avérée avec ce cyclone. « Les modèles numériques existent pour donner des éléments d’informations pour évaluer les risques, mais ils peuvent évoluer à tout moment. Et avec le changement climatique, il y a une intensification explosive des systèmes qu’il est difficile de prévoir », ajoute Vassen Kauppaymuthoo. 

Il est d’avis qu’on ne peut pas jeter tout le blâme sur la station météorologique quand les choses ne se passent pas selon les prévisions.

Nouveau système d’alerte

pluie

 

 

Notre service WhatsApp. Vous êtes témoins d`un événement d`actualité ou d`une scène insolite? Envoyez-nous vos photos ou vidéos sur le 5 259 82 00 !