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Anil Bachoo, ministre de la Santé : «Un manque important de médecins dans tous les hôpitaux» 

Face à une pénurie criante de médecins et à l’absence de recrutements depuis sept ans, le système hospitalier public est au bord de la rupture.  Anil Bachoo, ministre de la Santé, annonce le lancement d’un recrutement contractuel en urgence. 

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Pénurie aiguë, absence de recrutements depuis sept ans, départs massifs en spécialisation à l’étranger… Le système hospitalier public est à bout de souffle. « Nous accusons une grosse pénurie de médecins dans tous les hôpitaux. Cela fait sept ans que nous n’avons pas recruté. Aujourd’hui, ce sont les patients qui en souffrent », a déclaré sans détour Anil Bachoo, ministre de la Santé et du Bien-être, dans un entretien téléphonique accordé au Défi Quotidien. 

Outre l’absence de recrutement depuis plusieurs années, environ quarante médecins ont récemment obtenu des congés sans solde (« leaves without pay ») pour poursuivre leur spécialisation à l’étranger. « On ne peut pas leur refuser ce droit. Mais du coup, il y a des postes vacants à responsabilité qu’il faut absolument remplir », explique le ministre.

Pour pallier ce manque de médecins dans les établissements de santé publique, le ministère enclenche exceptionnellement une campagne de recrutement contractuel annuel. Cet appel à candidatures d’urgence vise uniquement les médecins déjà enregistrés à Maurice et âgés de moins de 70 ans. Aucune ouverture à l’international n’est envisagée, a insisté Anil Bachoo : « Non, cette campagne s’adresse uniquement aux médecins déjà enregistrés localement. » Les médecins contractuels devront assurer une présence 24 heures sur 24, y compris les week-ends, les jours fériés et lors de cyclones. Ils seront affectés dans divers départements des hôpitaux : médecine générale, urgences, pédiatrie, gynécologie/obstétrique, chirurgie, orthopédie ou encore anesthésie.

Dans les centres communautaires, leurs missions incluront la prévention, les soins curatifs, la réhabilitation, la formation et la mobilisation communautaire. Les médecins recrutés percevront un salaire mensuel de Rs 41 250 et une indemnité de transport de Rs 13 200, s’ils utilisent leur propre véhicule pour les déplacements liés au travail. 

Anil Bachoo a souligné un autre déficit critique : environ 1 500 infirmiers font également défaut dans les hôpitaux publics. Un appel à recrutement contractuel est prévu là aussi, en attendant que 300 étudiants infirmiers actuellement en formation viennent renforcer les équipes d’ici trois ans.  

Le ministre souhaite que cette campagne de recrutement attire aussi des spécialistes de haut niveau : chirurgiens, oncologues et neurochirurgiens. « Nous avons besoin de médecins capables de mener des opérations complexes ici même. Cela permettrait aux patients d’éviter les déplacements à l’étranger pour se faire soigner », a-t-il détaillé. 

Un spécialiste d’un centre hospitalier confirme que le manque de médecins est palpable sur le terrain. « Plusieurs praticiens quittent temporairement le pays pour poursuivre leur spécialisation à l’étranger.

Certains pays, comme la Chine, proposent des programmes de spécialisation aux médecins étrangers », explique-t-il.  Mais pour y accéder, poursuit le spécialiste, il faut d’abord être reconnu comme médecin dans le pays d’accueil. « Or, un diplôme de médecine mauricien n’est pas automatiquement reconnu en Chine. » Résultat : les médecins doivent refaire une partie de leur parcours académique avant d’être autorisés à se spécialiser. Ce qui les pousse à prendre de longs congés sans solde. 

Manque de reconnaissance

Mais les raisons de ce désengagement vont au-delà des motifs avancés. Selon ce même spécialiste, beaucoup de médecins refusent de rester à l’hôpital à cause du manque de reconnaissance, de statut et de conditions décentes. « Ils estiment qu’ils sont mieux rémunérés et mieux considérés dans le secteur privé. Dans les cliniques, ils bénéficient d’un meilleur statut, tandis qu’à l’hôpital, ils n’ont ni reconnaissance, ni traitement équitable. Le système public n’est tout simplement pas accueillant », déplore-t-il. 

Une autre réalité vient aggraver la situation dans les hôpitaux publics : la hausse constante du nombre de patients souffrant de maladies non transmissibles, notamment chez les jeunes. C’est ce qu’explique un professionnel de la santé, qui observe de près cette évolution inquiétante. « Ce que je constate, c’est que le profil des patients a changé. On voit de plus en plus de jeunes atteints de diabète, d’hypertension, de troubles mentaux ou encore de dépendances diverses. Ces cas sont devenus beaucoup plus fréquents qu’il y a quelques décennies. »

Cette transformation du paysage sanitaire exerce une pression durable et structurelle sur un système hospitalier déjà sous tension. Le problème, selon lui, n’est pas seulement le nombre croissant de patients, mais aussi la vitesse à laquelle cette population augmente.  « Si on continue à fonctionner uniquement en mode curatif, sans repenser notre stratégie, on risque un effondrement progressif de notre capacité à soigner. Il devient impératif de changer de cap », dit-il.  Pour ce professionnel, la clé réside dans un recentrage sur la prévention, l’éducation à la santé et la promotion du bien-être, afin de freiner l’apparition de nouvelles maladies chroniques et, à terme, soulager les structures hospitalières. 

 

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