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Allocation de Rs 1 000 aux employés : extension et hausse d’au moins Rs 500 attendues

Jayen Chellum, Jane Ragoo et Suttyhudeo Tengur

L’allocation mensuelle de Rs 1 000 à toute personne percevant un revenu brut allant jusqu’à Rs 50 000 prend fin en juin. Cette mesure annoncée dans le dernier Budget doit-elle être étendue pour encore une année ? Quel en serait l’impact sur l’économie ? Éléments de réponses. 

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350000C’est le nombre de salariés qui touchent une allocation de Rs 1 000 de la Mauritius Revenue Authority chaque mois. Une mesure annoncée dans le dernier Budget pour compenser la perte du pouvoir d’achat des Mauriciens. Cependant, la mesure budgétaire prend fin le mois prochain. Suttyhudeo Tengur, président de l’Association pour la protection de l’environnement et des consommateurs (APEC), est d’avis que cette allocation doit non seulement être étendue, mais le quantum doit aussi être revu à la hausse. « Avec le coût de la vie réel qui ne cesse d’augmenter, les consommateurs ont besoin de cette allocation.

D’ailleurs, je pense qu’il faut que cela soit revu d’au moins Rs 1 500 pour pouvoir joindre les deux bouts », avance-t-il. Ce dernier concède que certains produits alimentaires coûtent moins cher. « Mais les prix des médicaments et des carburants sont toujours élevés », prévient-il. 

Jayen Chellum, secrétaire général de l’Association des consommateurs de l’île Maurice (ACIM), avance pour sa part que malgré la compensation salariale, les consommateurs ne sont pas en mesure de faire face à la perte du pouvoir d’achat. « Ainsi, une allocation du gouvernement apporte un soulagement », dit-il. Selon lui, avec un taux d’inflation élevé prévu cette année, il faut certainement prolonger la mesure. 
Toutefois, il est d’avis qu’il faut revoir le montant accordé en fonction des revenus. « L’allocation de ceux au bas de l’échelle, soit qui touchent un salaire minimum, doit être d’au moins Rs 1 500. Ceux qui gagnent Rs 50 000 par mois peuvent avoir une allocation mensuelle de Rs 500 », propose-t-il. 

La secrétaire de la Confédération des travailleurs des secteurs public et privé (CTSP), Jane Ragoo, affirme que la prolongation de l’allocation a été l’une des principales propositions soumises au ministère des Finances dans le cadre du prochain budget. « En sus d’étendre la mesure pour une prochaine année, nous avons aussi proposé que le montant soit revu à la hausse », soutient-elle. Cette dernière pense que le quantum doit être au moins Rs 1 500 pour compenser la perte du pouvoir d’achat des Mauriciens. 

La capacité de l’État 

Le président de l’APEC estime que le gouvernement a les moyens de financer cette allocation mensuelle. « Ce faisant, il assure la stabilité sociale dans le pays, ce qui est primordial pour le développement économique », souligne-t-il. Un avis que partage Jane Ragoo. « Cependant, il faut que le gouvernement ait le courage de prendre des mesures fortes. Par exemple, augmenter le taux d’impôt sur les grandes entreprises. C’est ainsi que l’écart entre les revenus des ménages sera réduit », affirme-t-elle. De son côté, Jayen Chellum est d’avis qu’avec le maintien des prix élevés des carburants et la hausse du tarif d’électricité, l’État a amplement les moyens d’étendre la mesure. 

Ce que dit le ministère des Finances 

Au niveau du ministère des Finances, on explique que, vu que c’est une mesure annoncée dans le Budget 2022-23, la fin de cette allocation est prévue en juin. « Ainsi, les employés éligibles obtiendront leur allocation de Rs 1 000 pour le mois de juin », précise-t-on. Concernant une éventuelle extension de cette mesure, le ministère indique que les travaux de consultations avec les parties prenantes sont toujours en cours. « Nous sommes en train de travailler sur le cadre du Budget et ensuite les mesures qui seront annoncées. À ce jour, on ne peut se prononcer sur une probable extension de l’allocation ou pas. Il faut attendre la présentation du prochain Budget pour le savoir », dit-on. 

Trois questions à…Eric Ng, économiste : «Je crains fort que l’allocation soit étendue et devienne même permanente» 

ericL’allocation mensuelle de Rs 1 000 à toute personne percevant un revenu brut allant jusqu’à Rs 50 000 devrait prendre fin en juin prochain. Compte tenu du contexte économique actuel, pensez-vous que la mesure doit être étendue pour l’année financière suivante ?
Milton Friedman disait : “Nothing is more permanent than a temporary government programme.” Cette allocation mensuelle est censée être exceptionnelle, temporaire, accordée dans un contexte particulier lié à la Covid, mais je crains fort qu’elle soit étendue et devienne même permanente. Les élections générales sont proches, et le gouvernement ne ferait rien qui le rendrait impopulaire. Or, la pandémie est derrière nous et l’exception ne saurait devenir la règle. Mais politiciens, syndicalistes et employeurs trouveront toujours une crise quelconque, une excuse, pour que le gouvernement distribue des prébendes sans regarder le fardeau fiscal et l’endettement public.

Quelles seront les implications de l’extension de cette allocation sur les dépenses du gouvernement et sur l’économie en général ?
Le coût annuel de cette allocation est de l’ordre de Rs 5 milliards, soit près de 1 % du Produit Intérieur Brut (PIB). C’est énorme compte tenu de l’état des finances publiques avec une hausse du déficit budgétaire et un fort endettement public. À vrai dire, on ne fait que prendre de l’argent des poches des salariés, à travers la contribution sociale généralisée (CSG), pour le redistribuer. Or, cette contribution est censée financer la pension de vieillesse de demain, soit une consommation différée. Donc, c’est encore une politique d’encourager la dépense plutôt que l’épargne. Comme toujours, la consommation fait croître les importations, accentue la pression sur la roupie et alimente l’inflation.

Quelles sont les alternatives que vous proposez pour compenser la perte du pouvoir d’achat des Mauriciens ?
Évidemment, une hausse des salaires compensera la perte du pouvoir d’achat. Mais il faut attaquer le mal à sa racine, c’est-à-dire empêcher la perte du pouvoir d’achat en luttant contre l’inflation. Pour cela, il faut une politique monétaire crédible. Or, quelle crédibilité peut-on accorder à un comité de politique monétaire qui ne s’est pas réuni depuis cinq mois, tandis que la Réserve fédérale, la Banque centrale des États-Unis, s’est rencontrée trois fois depuis le début de l’année pour augmenter son taux directeur par un total de 75 points de base. 

Entre dire et faire, il existe un fossé géant en matière de lutte contre l’inflation à Maurice. La fuite en avant dans l’inflation se traduit par un enchaînement prix-salaire. Alors que le gouverneur de la Banque de Maurice avait cru que l’inflation était « transitoire », elle devient en fait permanente.

  • salon

     

 

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