Live News

Allégations d’abus sur l’acquisition des voitures du CP : aux Casernes centrales, on parle d’ «accusations gratuites» 

Le commissaire de police se retrouve au cœur d’une polémique.
  • Selon un haut gradé, « les véhicules sont la propriété de l’État »

Le commissaire de police (CP) Anil Kumar Dip est confronté à des accusations sérieuses concernant l’acquisition de voitures de fonction, selon une lettre de dénonciation adressée à la Financial Crimes Commission (FCC) : « Anil Kumar Dip utilise trois voitures de fonction neuves financées par l’argent des contribuables, d’une valeur de Rs 22 870 880, pour ses proches et lui-même » (voir plus loin). Il s’agit notamment d’une Range Rover, une Porsche Macan et une BMW X6. Mais au niveau des Casernes centrales, on affirme que ce ne sont que des « accusations gratuites ».

Publicité

Selon un gradé des Casernes centrales, les luxueuses voitures mentionnées dans cette lettre de dénonciation sont « la propriété de l’État » et « non des acquisitions personnelles » du CP : « C’est facilement vérifiable auprès de la National Land Transport Authority. » Il ajoute que l’un des véhicules mentionnés, notamment le Range Rover, est utilisé par d’autres hauts gradés des Casernes centrales lors des déplacements professionnels. « Le Range Rover est stationné ‘en ready position’, des hauts gradés l’utilisent lors des déplacements d’urgence », fait-on comprendre.

Dans l’entourage du CP, on explique que dans le cadre de l’ouverture d’une enquête de la FCC, les « log books » du département des transports des Casernes centrales, ainsi que les caméras du dispositif Safe City, aideront les enquêteurs à faire la lumière sur toute cette affaire. On rejette aussi ces « accusations gratuites » contre le patron de la police.

Concernant la lettre de dénonciation, le CP n’était pas disponible pour réagir face à ces accusations. Du côté du Police Press Office, on s’est aussi refusé à commenter ces allégations. Contacté, un syndicaliste attaché à la Police Officers Solidarity Union  a affirmé, vers midi, qu’il n’était pas au courant de cette lettre. Il est demeuré par la suite injoignable.

Au niveau de la FCC, il est souligné que toute dénonciation qui parvient à ses bureaux doit faire l’objet d’une enquête préliminaire. Ensuite, la FCC décidera de donner suite à l’affaire ou non, en fonction de la véracité des informations obtenues. On précise que des lettres de dénonciation arrivent quotidiennement au siège de la FCC, et qu’il existe une procédure standard à suivre lorsqu’une dénonciation est reçue.

Par ailleurs, selon Me Taij Dabycharun, la FCC peut initier une enquête sur la base d’une dénonciation anonyme, tout comme son prédécesseur, l’Independent Commission Against Corruption (Icac). « À partir de là, s’il y a matière à enquêter, elles devront agir en conséquence. »

Selon l’auteur de la lettre de dénonciations, il existerait un délit potentiel en vertu de l’article 22 du FCC Act de 2023, notamment pour abus de pouvoir. Il s’agit du délit de « Public official using his office for gratification », dit l’avocat Dabycharun. « Il s’agit d’un délit passible de dix ans de prison et d’une amende pouvant aller jusqu’à Rs 20 millions. » 

L’article 43 du FCC Act pourrait également être applicable, à savoir la « fraude par abus de pouvoir », ajoute-t-il. Délit sanctionné par une peine de prison de pas plus de dix ans et une amende ne dépassant pas Rs 20 millions.

Me Golamaully : «le CP connaît la source de ces allégations»

• Me Hack: « le chef de la police doit parler ou ‘step down’ le temps de l’enquête»

Selon Me Samad Golamaully, proche et conseiller juridique du CP Dip, après avoir discuté avec ce dernier, il ne voit « aucune raison justifiant son intervention à ce stade ». Pour le CP, dira-t-il, « il n’est pas nécessaire de se défendre contre des accusations dénuées de fondement. (…) Il a des responsabilités plus importantes à assumer ».

Une personne occupant un poste constitutionnel n’a-t-elle pas le devoir de rendre des comptes face à des accusations aussi graves ? Pour Me Golamaully, « la personne accusée doit aussi avoir le temps de réfléchir. Pour l’instant, en l’absence de preuves concrètes, une explication immédiate n’est pas nécessaire ».


Cependant, la lettre de dénonciation a été transmise à la FCC, qui est légalement tenue d’initier au moins une enquête préliminaire sur ces allégations. « Si une institution décide d’ouvrir une enquête, le CP collaborera. Toutefois, il est important de noter que le CP est au courant de la source de ces allégations », ajoute-t-il.


Pour sa part, l’avocat Penny Hack estime que, compte tenu de la gravité des accusations et de la position d’Anil Kumar Dip qui exige une intégrité sans faille, le CP a un devoir moral envers la population de fournir des explications. « Dans de telles circonstances, il n’y a que deux choix moraux : soit le CP décide de s’exprimer, soit il se retire pendant l’enquête. »

La lettre de dénonciation 

Selon la lettre de dénonciation, le CP Dip a droit à une voiture de fonction, dans la limite de la valeur plafond prescrite, pour un usage officiel ainsi que privé, avec le versement d’une allocation mensuelle pour le carburant et une indemnité pour chauffeur ou les services d’un chauffeur. « Il peut aussi opter pour le versement d’une allocation mensuelle pour voiture en lieu et place de la voiture de fonction. »

Après sa nomination, Anil Kumar Dip a, selon la lettre, opté pour plusieurs voitures de fonction avec services de chauffeur. « La voiture est destinée à des déplacements officiels et à usage privé. Cependant, M. Dip doit supporter les coûts de l’entretien de routine et fournir un abri pour la voiture (paragraphe 16.2.101 du rapport du PRB). À ce jour, M. Dip utilise une voiture de fonction, un Range Rover Velar d’une valeur de Rs 5 950 000, immatriculée 4574. La voiture est abritée chez M. Dip à Rose-Belle. Il se rend de Rose-Belle à Port-Louis dans cette voiture qui est aussi utilisée pour ses déplacements au Bureau du Premier ministre quotidiennement. La caméra de vidéosurveillance enregistre l’image de la Range Rover », écrit le dénonciateur.

Selon lui, suivant la recommandation 40 du rapport PRB, le CP aurait « fait croire » à qu’il avait acquis une Porsche Macan, immatriculée KD 452, à son propre nom pour un usage privé pour sa famille. Le véhicule, exonéré de droits de douane, a coûté Rs 6 430 880. « Cette voiture est abritée chez M. Dip. Elle est principalement utilisée par les proches du CP En réalité, elle n’est pas enregistrée au nom de M. Dip, mais plutôt au nom de la Police de Maurice ». 

Aussi, selon la lettre, en janvier 2024, Anil Kumar Dip aurait laissé croire qu’il avait acquis une BMW modèle X6 M neuve, d’une valeur de Rs 10 490 000 pour son usage privé. « Le numéro d’immatriculation initial était 451 Jan 24, et il a maintenant changé pour 8452. »

Dans ce cas aussi, il est allégué que cette voiture est utilisée par un des proches du CP, « mais aussi par un homme d’affaires ayant plusieurs affaires criminelles en cours devant les tribunaux ». « Cette voiture n’est également pas enregistrée au nom de M. Dip, mais plutôt au nom de la Police de Maurice », peut-on lire. 

En résumé, selon le dénonciateur, « Anil Kumar Dip utilise trois voitures de fonction neuves financées par l’argent des contribuables, d’une valeur de Rs 22 870 880, pour ses proches et lui-même ». La lettre fait aussi ressortir que l’allocation mensuelle de carburant perçue par Anil Kumar Dip était censée être utilisée pour le carburant et les coûts de « l’entretien de routine » de sa voiture de fonction uniquement. 

Cependant, le CP aurait fait en sorte que les trois voitures mentionnées soient ravitaillées en carburant en utilisant différents formulaires de commande de carburant de la police dans les stations-service Engen. « Des agents de police dédiés effectuent ces tâches pour M. Dip. Ils ont récemment été promus. Ces agents incluent ceux en charge de la salle de garde des transports et ses chauffeurs », allègue le dénonciateur.

Ainsi, selon lui, il est clair que le CP a utilisé son poste ou sa position pour obtenir des gratifications pour lui-même et ses proches, en violation de l’article 22 du Financial Crimes Commission Act. 

  • LDMG

 

Notre service WhatsApp. Vous êtes témoins d`un événement d`actualité ou d`une scène insolite? Envoyez-nous vos photos ou vidéos sur le 5 259 82 00 !