Actualités

Violence à l’égard des femmes : le Pr. Chinkin revient sur le cadre juridique international

femme L’assistance prêtant une oreille attentive à l’exposé du Pr. Chinkin.
Publicité

Quels sont les cadres juridiques internationaux pour lutter contre la violence à l’égard des femmes ? Une question sur laquelle s’est appesantie Christine Chinkin, Professeur de droit international à la London School of Economics & Political Science. Invitée du Mauritius LES Society Trust Fund, elle a animé deux causeries à l’UoM, mardi 12 février.

«Les femmes connaissent mal leurs droits et les mécanismes de plainte disponibles », c’est ce qui ressort des observations de The Convention on the Elimination of All Forms of Discrimination against Women (CEDAW), en vigueur depuis 1981. Christine Chinkin a expliqué toute la fonction du CEDAW. C’est un comité qui condamne la discrimination à l’égard des femmes et oblige les parties (Maurice a adhéré à la convention en juillet 1984), à poursuivre, par tous les moyens appropriés, une politique visant à éliminer la discrimination à l’égard des femmes.

Que ce soit au niveau de la participation politique, sur le lieu de travail, de l’accès aux soins de santé et à l’éducation, la discrimination est marquée dans nombre de domaines. Des mesures particulières sont alors nécessaires pour éliminer ces discriminations. Deux questions cruciales sont toutefois posées : Qu’est-ce que la violence à l’égard des femmes et la violence sexiste ? Ou encore, quelles sont les obligations de l’État à cet égard ?

anushka
Anushka Virahsawmy et Christine Chinkin.

Violence sexiste

Le CEDAW définit la violence sexiste comme « une violence dirigée contre une femme parce qu’elle est une femme, ou qui affecte les femmes de manière disproportionnée. » Cela inclut les actes qui causent des souffrances physiques, mentales ou sexuelles, les menaces, la contrainte et d’autres privations de liberté. D’autres formes de violence à l’égard des femmes sont décriées, par exemple des actes de violence commis au nom de l’honneur, des actes de violence à l’encontre de travailleurs migrants, la traite des êtres humains, le mariage forcé, le harcèlement criminel, le harcèlement.

Pour le Professeur Christine Chinkin, la violence peut être profondément enracinée dans les normes culturelles et sociales et est souvent perpétuée par une culture de déni et de silence.

Autre question soulevée par le Professeur : quelles sont les obligations des États en matière de violence sexiste? Elle fait valoir que les États doivent avant tout respecter le droit des femmes de ne pas subir de telles violences et ainsi garantir que leurs agents  : ceux de la fonction publique, notamment l’armée, la police et les forces de sécurité, agents de l’Immigration, agents de l’administration pénitentiaire et même le personnel diplomatique ne commettent pas d’actes de violence à l’égard des femmes. Il incombe également à l’État de veiller à ce que toutes les lois et les politiques publiques soient non discriminatoires. En résumé, l’obligation de diligence requise oblige les États à prévenir la violence à l’égard des femmes, à protéger les femmes contre de telles violences, à enquêter sur les incidents de violence à l’égard des femmes, à poursuivre les auteurs présumés et à punir les personnes reconnues coupables, et à lutter contre l’impunité. Cependant, le plus important reste aujourd’hui, des actions qui pourront être prises pour réduire la violence envers la femme.


Anushka Virahsawmy : «Certains sujets restent tabous»

La deuxième partie du séminaire était axée sur la mise en vigueur des droits des femmes à Maurice. Anushka Virahsawmy, directrice de Gender Links, (ONG qui milite pour l’égalité et la justice), explique que les chiffres sont alarmants. Pour elle, il s’agit avant tout de comprendre le statut des femmes dans le pays.

« Pourquoi certains sujets sont-ils tabous à Maurice ? » s’étonne la directrice. À titre d’exemple, le Sexual and Reproductive Health and Rights’, qui est un concept des Droits de l’homme, appliqué à la sexualité et à la reproduction. Il prend en compte des sujets comme la menstruation, la grossesse précoce, le mariage des enfants, les infections sexuellement transmissibles et le HIV/AIDS, entre autres.

Pour elle, ce sont des sujets qui ne sont strictement pas abordés en la présence des garçons, alors que cela reste important pour ces derniers de comprendre ce qui se passe dans le corps humain.


Pas de traité international sur la prévention

Il n’existe pas de traité international sur la prévention des violences à l’égard des femmes, même si des appels ont été lancés pour qu’une telle convention soit négociée. Même en l’absence d’un traité global, les pratiques étatiques et institutionnelles démontrent l’acceptation des obligations juridiques internationales en matière d’élimination de la violence à l’égard des femmes et l’interdiction de la violence sexiste à l’égard des femmes, qui est devenue un principe du droit international coutumier.


Vite dit

Autres points abordés

  • Des femmes ne sont pas admises à certaines cérémonies religieuses parce qu’elles sont considérées comme sales, impures. Mentalité qui doit changer.
  • La stigmatisation et la discrimination à l’égard de la grossesse précoce. Bien que la loi n’empêche pas les jeunes filles qui tombent enceinte à aller à l’école, elles ressentent cette stigmatisation et préfèrent rester à la maison.
  1. En 2016 – 214 cas de grossesses précoces
  2. En 2017 – 207 cas
  3. De janvier à juillet 2018 – 170 cas
  • Maurice s’en sort très mal quand il est question de la femme en politique. Le nombre de femmes parlementaires est de 8 sur un total de 70 (11,5 %). Par ailleurs, les femmes ne sont pas représentées dans toutes les sphères de la société.
  • Le mariage des enfants – Alors que Maurice adhère aux protocoles de la SADC, qui interdit le mariage des enfants,  le pays rend possible le mariage à 16 ans, avec le consentement des parents. 805 mariages d’enfants âgés entre 15 à 19 ans sont répertoriés à Maurice, avec une majorité de filles.
  • Le portrait des femmes dans les médias, sur les affiches publicitaires et autres qui sont stéréotypés. La femme est considérée comme un objet sexuel, réduite à la femme ménagère par exemple. Par ailleurs, Anushka Virahsawmy dénonce des articles qui ne sont souvent pas balancés dans les journaux, qui souvent visent le sensationnalisme.
  • La communauté des LGBT qui voit ses droits bafoués sur le territoire. Ils ne sont même pas cités dans le Gender Equality Bill, ou la Domestic Violence Act.
 

Notre service WhatsApp. Vous êtes témoins d`un événement d`actualité ou d`une scène insolite? Envoyez-nous vos photos ou vidéos sur le 5 259 82 00 !