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Tout savoir sur les lois contre la violence conjugale 

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Exceptionnellement, l’invitée de l’émission thématique du jeudi 12 septembre était Me Melany Nagen. Elle a répondu aux questions des auditeurs aux côtés de Caroline Djillalinarrainen. Les auditeurs étaient nombreux à témoigner mais aussi à demander des conseils à l’avocate. 

  • Quelle est la différence entre la violence conjugale et la violence domestique ? 

On a tendance à penser que la violence conjugale et la violence domestique sont la même chose. La violence conjugale est définie comme étant une violence présente dans un couple marié. Par exemple, si l’époux fait subir une quelconque violence à son épouse ou alors l’inverse, bien que cela soit relativement rare et tabou à Maurice. La violence domestique est, elle, quelque chose de plus élargie et touche plusieurs personnes. La violence domestique englobe les personnes vivant sous le même toit, les personnes victimes de violence par leurs ex-conjoints, les personnes vivant en concubinage, les parents battus par leurs enfants ou l’opposé. Tous types de violence par des personnes vivant sous le même toit sont considérés comme étant une violence domestique.

  • Quelles sont les personnes touchées ? 

Nous voyons dans la société que ces actes sont de plus en plus perçus comme étant des faits normaux. Les insultes, les menaces ou même le harcèlement, le dénigrement sont considérés comme étant des actes de violence. Dans plusieurs cas, nous avons constaté que la majorité des personnes ayant été victimes de violences conjugales sont des personnes qui ont grandi dans ce milieu ou qui ont dû faire face à des parents violents, que ce soit pour l’homme ou la femme. 

  • Que faire lorsqu’on est victime de violences ?

La personne peut saisir la cour de district et la personne lésée peut faire une demande pour obtenir un ordre de protection. Cependant, dans la majeure partie des cas, ces personnes hésitent à faire le premier pas. Il faut aussi noter que les hommes peuvent également bénéficier d’un Protection Order. Les victimes peuvent aussi se diriger vers le ministère où plusieurs mesures ont été mises en place. Au cas contraire, ils/elles peuvent se tourner vers les différentes associations à travers l’île. 

  • Quels faits sont-ils poursuivis sous le terme violence ?

La loi à Maurice est réglementée par la Protection from Domestic Violence Act qui a été introduite en 1997 suite à une conférence à Beijing. Il faut faire ressortir que cette loi a été introduite il y a 22 ans. Maurice a été le premier pays en Afrique qui a introduit cette loi pour protéger davantage les femmes. Cette loi a été introduite et a été amendée quatre fois afin de protéger la famille. Mais ce que l’on constate, c’est que la violence continue à augmenter. En 2017, 1542 Protection Orders ont été demandés, 1375 ordres intérimaires de protection ont été émis. 709 applications n’ont pas abouti ou alors les victimes ont retiré leur plainte.

  • Qu’est-ce qu’un Protection Order ?

C’est un ordre de protection émis par la cour pour empêcher un agresseur de causer du tort à une victime qu’il a l’habitude d’agresser ou de prévenir une éventuelle nouvelle violence à l’encontre d’une personne qu’il a l’habitude de violenter. Comme il a été précisé plus tôt, cela s’applique aux victimes de violences sous le même toit, que ce soit une violence conjugale ou une violence domestique. Pour obtenir un ordre de protection, les potentielles victimes doivent se munir de leur pièce d’identité, se présenter à la magistrature de leur localité et faire la demande d’un ordre de protection. Ils devront jurer un affidavit pour stipuler les violences qu’il/elle a subies ; si le cas est grave, il/elle obtiendra un ordre intérimaire ; au cas contraire, le présumé agresseur devra se présenter en cour pour qu’une décision soit prise. Malheureusement. un Protection Order ne garantit pas à 100% à une personne d’être protégée. Afin de mieux se protéger, les personnes doivent porter plainte à la police ou se diriger vers le ministère, la Family Protection Unit, SOS Femmes, Media Watch Organisation ou encore Passerelles.

  • Comment peut-on détecter qu’une personne est victime de ces actes ?

Que ce soit chez les jeunes ou les adultes, c’est pratiquement impossible de détecter cela, à moins que la victime vienne dénoncer qu’elle a été victime d’agression. Cela est dû au fait que la victime va penser au regard que les autres membres de la famille porteront sur elle, ou encore que la victime va penser que le mieux serait de résoudre soi-même le problème ou même dans certains cas qu’elle va se culpabiliser et, par conséquent, rester dans cette relation abusive en se disant : « Il va changer ».

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Me Melany Nagen aux cotés de Caroline Djillalinarrainen.

Les cas les plus communs

Il est clair dans la loi que le recours à la violence dans les couples est interdit. Les actes de violence les plus recensés demeurent les actes de violence physique. Toutefois, on constate que le harcèlement ou les cas de dénigrement sont de plus en plus recensés ces derniers temps.

Relations sexuelles sans consentement 

« Je suis ton mari j’ai le droit ». Il est à noter qu’une relation sexuelle sans consentement est considéré comme étant un viol conjugal. Souvent, on a tendance à considérer que, lorsqu’un couple est marié, la femme doit tout accepter, en quelque sorte qu’elle est obligée, même sans son accord. Un être humain possède des droits et elle a le droit de refuser à tout moment de par sa volonté, et ne pas consentir à d’autres. 

Questions des auditeurs

Prakash – Souillac : « La violence conjugale ne date pas d’aujourd’hui, d’après moi la loi ne rétablit pas les choses. Un homme ne frappe pas la femme et doit respecter la femme, il faut comprendre la femme avant de s’engager. Après l’acte, ce sont les enfants qui paient les pots cassés. Selon moi, si chaque homme et chaque femme prennent leurs responsabilités, ces choses pourront être évitées ; il faut bien apprendre de son prochain avant de s’engager ; de nos jours, il n’y a plus de respect dans la société, c’est pour cela que ces problèmes surgissent »
Je félicite ce père de famille pour sa façon de penser, je partage la même opinion, un homme qui se respecte ne frappe pas sa femme. Je suis aussi d’avis qu’il y a beaucoup de problèmes relationnels dans les couples qui provoquent ces violences.  

Stéphanie – Port Louis : « Souvent dans certains cas la police tarde à réagir, il faut savoir que si une personne se tourne vers la police c’est qu’elle a besoin d’aide. Dans le cas de cette dame la semaine derrière, si la police avait réagi rapidement, elle serait peut-être toujours en vie. Il faudrait prendre des sanctions contre ces policiers »
On ne peut pas le nier que ça arrive, le devoir des policiers en cas de plainte serait de porter secours car c’est leur devoir et aussi de rappeler les lois et en cas de Breach of Protection Order, de prendre la déposition de la victime et aussi d’effectuer une arrestation. 

Linley – Goodlands : « Je fête cette année 10 ans de mariage. Avec le temps, j’ai eu des difficultés, j’ai perdu mon travail ce qui a impacté sur ma colère envers elle, nous étions séparés et elle a même porté plainte. Au final, j’ai pu la reconquérir ainsi que mes enfants. Mais la plainte existe toujours. Que faire ? Le message que j’ai à passer aux hommes serait de ne pas oublier la tendresse et l’amour du premier amour et ne pas laisser la colère nous envahir »
Si les choses vont bon train, quand l’affaire sera appelée en cour, la femme sans aucune pression de son époux pourra volontairement dire qu’elle ne veut pas aller de l’avant pour témoigner contre son époux et qu’ils sont un couple de nouveau heureux. 

Cindy - Chamarel : « J’ai une amie qui est étrangère et mariée à un Mauricien depuis 5 mois ; depuis son mariage, au bout de deux mois son époux l’empêche de travailler et elle s’est même fait agresser. Elle a peur pour sa sécurité et elle n’a de contact avec personne ; j’ai dû l’accueillir chez moi et elle veut rentrer chez elle dans son pays. »
À l’heure actuelle, elle peut faire la demande d’un Protection Order ou, si la maison lui appartient, de demander un Occupation Order, c’est un ordre par lequel la cour autorise la victime à occuper la maison sans que l’agresseur ne puisse approcher la maison. Entre-temps, elle peut faire la demande d’un divorce pour rentrer dans son pays. 

Anne – Flacq : « J’ai subi des violences assez graves de mon conjoint dans le passé. Le policier m’a dit : C’est la première fois, pas la peine de porter plainte. J’ai été encore plus rabaissée ; si la force policière refuse d’aider, c’est inadmissible. La première fois est la fois de trop. Souvent les policiers refusent de donner de l’aide »
Les policiers doivent prendre la déposition d’une victime. D’ailleurs, ils ont l’obligation de le faire, car c’est leur devoir. Malheureusement, beaucoup de policiers sont des agresseurs et nous avons beaucoup de cas où des policiers abusent de leur pouvoir, sans pour autant vouloir généraliser. Ce n’est pas le devoir de la police de dissuader une personne de porter plainte. C’est selon moi un manque de formation, car la police a beaucoup plus de pouvoir d’agir dans ce type de cas depuis les derniers amendements de la loi. 
 

 

 

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