« Notre histoire de peuplement est fondée sur l’accès aux terres… ». C’est en ces termes, parmi tant d’autres, que Jean Claude de L’Estrac résume l’histoire économique et sociale de Maurice, à l’occasion du lancement de son ouvrage intitulé ‘Terres-Possession et Dépossession’, lundi 14 décembre 2020 à Ébène.
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C’était le livre attendu en cette fin 2020, à un moment où Maurice vient de célébrer le créole, cette langue née de l’esclavage, de la proximité des colons français et de leurs esclaves. Mais l’ouvrage de Jean Claude de L’Estrac trouve son origine dans la grève de la faim 2019, menée par des personnes descendant de l’esclavage et de l’engagisme, dont les ancêtres ont été dépossédés de leurs propriétés foncières.
Préfacière de l’ouvrage, la romancière Ananda Devi résume ainsi cet exercice : « Cette histoire de la terre, de notre terre, racontée par Jean Claude de L’Estrac, puisant dans des sources avérées, est le fruit d’une recherche assidue et exigeante, d’un travail jusqu’ici sans doute jamais entrepris. »
Fidèle à son style mais sans doute devenu plus curieux et refusant toujours le manichéisme auquel un tel sujet pouvait se prêter, il s’est emparé de cette longue saga des terres, pour dénoncer la profonde injustice qui, à cause de l’infâme ‘Code Noir’, « aucune personne de couleur Noir ou Métis ne peut obtenir une concession ou une donation de terrain ». Et pourtant, ajoute-t-il, « il n’en sera pas de même, plus tard, pour les immigrés venus de l’Inde labourer les champs des grands propriétaires terriens. »
Traitement distinctif
« Cette hiérarchie de possession et de non- possession, dit-il, explique aujourd’hui la précarité sociale et économique de certains des descendants venus de Madagascar et d’Afrique. C’est la couleur – le noir -, qui est déterminant dans le traitement distinctif qu’établit le colon français entre l’homme africain et le coolie issu des montagnes du Bihar. C’est une « histoire à double volets (où) la formidable ascension des héritiers des immigrés du Bihar qui, à force de sacrifices et de sueur certes mais aussi de bienveillance patronale intéressée, deviennent en si peu de temps, propriétaires de presque la moitié des terres cultivables du pays. Une épopée de déracinement douloureux devenue une histoire d’enracinement glorieux. » Jean Claude de L’Estrac a terminé, avec le « sentiment d’avoir écrit un livre utile », après avoir conclu que « la répartition très inégale des terres, tout au long de notre histoire, est la principale raison encore, des profondes inégalités de notre société. »
Où en est la réclamation des membres de l’Association Commission Justice et Vérité en 2020, après le rapport de la commission en 2011 qui souhaitait la création d’une Land Court pour fermer la bouche sur son immense travail de recherches sur les cas de spoliation ? Il a échu à Steven Obeegadoo, DPM et ministre du Logement et de l’Aménagement du territoire et ministre du Tourisme, de rassurer tout le monde à l’effet que des instances ont été mises sur pied par le gouvernement et assorties d’un budget de plusieurs centaines de millions de roupies, le seul hic demeurant des problèmes d’ordre juridique qui posent de multiples problèmes, reconnaît-il.
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