
- Publication du Blueprint avant la fin de l’année
À la suite des Assises de l’Éducation, tenues en avril dernier, le gouvernement mauricien s’apprête à franchir une étape décisive dans la transformation du système éducatif. Un Blueprint stratégique est en cours d’élaboration et sera publié avant la fin de l’année. Il sera fondé sur les recommandations issues de consultations nationales inclusives.
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Le Cabinet ministériel a officiellement pris acte des orientations stratégiques qui sous-tendent le Blueprint pour l’éducation. Ce document, en cours de finalisation, s’appuie sur les recommandations formulées lors des Assises de l’Éducation 2025. Ces rencontres ont réuni un éventail représentatif d’acteurs : enseignants, élèves, parents, membres de la société civile, employeurs, universitaires et partenaires internationaux du développement.
Ces échanges ont permis de dresser un diagnostic du système éducatif : ses forces, ses faiblesses, mais aussi les aspirations profondes. L’objectif du ministère de l’Éducation est clair : une refonte en profondeur, indispensable pour relever les défis d’un monde en mutation, où l’éducation doit être à la fois inclusive, durable et centrée sur l’humain.
Le Blueprint, qui servira de document de référence nationale pour les cinq prochaines années et au-delà, propose une approche holistique couvrant tous les niveaux d’enseignement — de la petite enfance au secondaire. Trois axes majeurs sont privilégiés :
La refonte des programmes scolaires, pour mieux intégrer les compétences du XXIe siècle, favoriser la pensée critique et encourager la créativité.
Le renforcement des systèmes de soutien, incluant la formation continue des enseignants, le soutien psychopédagogique et l’amélioration des infrastructures.
L’amélioration du cadre légal, afin de garantir une gouvernance plus transparente, équitable et adaptée aux réalités contemporaines.
Cette transformation s’inscrit dans le cadre des Objectifs de développement durable, notamment l’ODD 4, qui vise à assurer une éducation de qualité, inclusive et équitable pour tous. Le Blueprint ambitionne de faire de l’école mauricienne un levier de cohésion sociale, de citoyenneté active et de développement économique.
Les points à retenir
Le ministre de l’Éducation, le Dr Mahend Gungapersad, évoque les contours d’un système scolaire « à visage humain », où l’inclusion, le bien-être et la réussite ne s’opposent plus, mais se renforcent. Dans ses récentes déclarations, il insiste sur une transformation profonde, en phase avec les réalités contemporaines et attentive aux besoins spécifiques des élèves.
Au primaire, l’un des chantiers majeurs concerne le Primary School Achievement Certificate (PSAC), dont la réforme entrera en vigueur en janvier 2027, avec des ajustements progressifs dès cette année.
Le système de notation actuel (Grade 1 = 75 à 100 points) sera resserré, afin de mieux refléter les écarts de performance entre élèves.
Les critères d’admission en Grade 7 pourraient être revus : la proximité géographique ne serait plus prioritaire, ouvrant la voie à une plus grande liberté de choix pour les familles.
Le Modular Assessment en sciences et en histoire-géographie sera supprimé dès le Grade 5. Ces matières seront désormais évaluées dans les examens finaux, dans un souci d’équité.
Autre tournant décisif : la fin du passage automatique en classe supérieure à partir de 2026. L’objectif est de rehausser le niveau académique et d’offrir un soutien réel aux élèves en difficulté. Le redoublement, souvent perçu comme une sanction, sera repensé comme une opportunité pédagogique, avec des groupes réduits et un encadrement ciblé.
Ces mesures, bien que saluées par certains, soulèvent des interrogations chez les syndicats et les pédagogues. Vishal Baujeet, président de la Government Teachers Union (GTU), pointe l’absence d’examens formels en Grades 1 à 3, ce qui complique l’évaluation des acquis. Le pédagogue Basheer Taleb, quant à lui, estime que la promotion automatique a contribué à une baisse du niveau général, en instaurant des attentes minimales chez enseignants et élèves.
Attentes
Les partenaires de l’éducation partagent leurs idées pour l’amélioration du système éducatif mauricien.
Simla Potavadoo, secrétaire du headmasters Union
Le blueprint prône le développement intégral de l’enfant. Il faut penser à recruter un support teacher par classe pour mieux encadrer et pour pallier les manquements pédagogiques des jeunes apprenants. Cette proposition aura un impact sur le taux de réussite à la longue.
Le pupils teacher ratio doit être revu, surtout dans les grandes écoles. Nous sommes en 2025 et les enseignants travaillent toujours avec des classes bondées de 40 élèves.
Un autre point important : il faut valoriser des matières comme la musique. Je pense que le ministère de l’Éducation doit sponsoriser les instruments de musique également.
Arvin Bhojun, président de l’Union of Private Secondary Education Employees (UPSEE)
- Il est important d’apporter des changements du préscolaire au secondaire. Pour ce faire, une bonne planification est nécessaire. Il n’est pas bon de le faire à la va-vite.
- Les responsabilités des uns et des autres dans la mise en place des changements sont à prendre en compte. Des recherches sont essentielles pour apporter les changements au moment opportun. Un ‘time frame’ doit être fixé pour l’élaboration des projets.
- La mise en application des projets nécessite le financement et elle doit être faite de façon ordonnée. Pour l’UPSEE, la formation des enseignants ne doit pas être négligée.
Vishal Baujeet, président de la Government Teachers’ Union (GTU)
Les assises de l’éducation visent à améliorer la qualité de l’enseignement. Le ministre veut assurer une éducation de qualité à tous les niveaux : préscolaire, primaire et secondaire. À la GTU, ce qui nous concerne le plus, c’est le secteur du primaire.
- Nous voulons connaître les changements que le ministre de l’Éducation veut apporter aux examens du primaire. Avec l’abolition des Modular Assessments pour la Grade 5, nous avançons vers l’abolition en Grade 6 ? Et quels autres changements à venir au niveau du Primary School Achievement Certificate (PSAC) ? Se dirige-t-on vers l’abolition du NCE et des académies ?
- On a vaguement entendu évoquer l’abolition de la promotion automatique. On attend des précisions sur la mise en place d’un nouveau système. Les détails sont attendus par tous. Quel sera l’âge limite au primaire ? Si un redoublant en grade 4 ne réussit pas, va-t-il rester en grade 4 ou bouger en grade 5 ? Beaucoup d’autres questions subsistent.
- Comment va-t-on résoudre le problème du manque d’enseignants, en attendant que les recrues rejoignent à l’école ? Les Supply Teachers non formés au primaire sont au détriment des enfants. Il devrait y avoir une étude systématique au ministère pour recruter davantage de personnel et pallier ce manque d’enseignants.
Yugeshwur Kisto, président de la Government Secondary School Teachers’ Union (GSSTU)
- Accès, équité et inclusion : ce premier axe a pour objectif de garantir un accès équitable et inclusif à une éducation de qualité pour tous les élèves, quelles que soient leurs origines socio-économiques, capacités ou situations géographiques. Ce qui implique non seulement la modernisation des infrastructures scolaires pour accueillir les élèves qui ont des besoins spécifiques, mais aussi l’amélioration des ressources pédagogiques et la mise en place de programmes de soutien ciblés. Des initiatives pour les élèves issus de milieux défavorisés et des programmes d’accompagnement pour les élèves en difficulté doivent être mis en place.
- Qualité et pertinence de l’éducation : la deuxième axe se concentre sur l’amélioration de la qualité de l’éducation en développant un curriculum qui répond aux besoins du marché du travail. Et il intègre des compétences du 21e siècle, comme la pensée critique, la résolution de problèmes et la littératie numérique. Il est impératif d’adopter des méthodes pédagogiques centrées sur l’apprenant, qui favorisent l’engagement actif des élèves dans leur apprentissage. De plus, pour garantir un enseignement de qualité, il est essentiel de mettre en place un développement professionnel continu des enseignants. Ce qui leur permet de se former aux dernières innovations pédagogiques et aux meilleures pratiques.
- Gouvernance et partenariats : ce troisième axe souligne l’importance d’une gouvernance transparente, participative et décentralisée qui implique tous les acteurs de l’éducation : enseignants, parents et élèves. La création de partenariats solides entre les organismes éducatifs, le secteur privé et les organisations communautaires est essentielle pour partager les meilleures pratiques et mobiliser les ressources nécessaires à la mise en œuvre des réformes. Des forums réguliers de consultation et de collaboration devraient être établis, permettant à tous les acteurs de contribuer à la prise de décision et à l’évaluation des politiques éducatives.
Ces axes de réforme visent à construire un système éducatif qui est à la fois inclusif, de qualité et bien gouverné. Il répond aux défis contemporains et aux besoins de la société mauricienne. En mettant l’accent sur l’équité, la pertinence et la collaboration, nous pouvons créer un environnement d’apprentissage enrichissant et durable pour tous les apprenants.
Dr Jimmy Harmon, directeur adjoint et responsable de l’unité secondaire du Service diocésain de l’éducation catholique (SeDEC)
- Les heures de classe resteront-elles pareilles ? Si on veut donner plus de temps au sport, aux activités littéraires, à la musique et à la danse. Les profs doivent compléter le syllabus et donner plus de temps à chaque élève dans son apprentissage.
- La qualité de l’enseignement. Aura-t-on un inspectorat pour le suivi pédagogique ?
- Comment donner plus de marge de manœuvre aux écoles pour gérer les enfants beyond control ? À ce jour, on n’a pas le droit d’expulser un enfant. Ni l’Ombudperson, ni le ministère, ni la PSEA ne se mouillent, quand il faut prendre une décision.
Mohammad Akeel Bundhoo, président de l’Union of Rectors and Deputy Rectors of State Secondary Schools
- Le Curriculum - Repenser et remodeler le présent curriculum qui doit tenir en compte les nouvelles donnes au niveau socioéconomique et culturel à Maurice. Ce curriculum doit être approprié et flexible.
Actuellement, il y a un accent trop prononcé pour apprendre par cœur. Le nouveau curriculum doit inclure le modular learning, le Project Based learning et les interdisciplinary subjects. Il faut introduire des avenues pour une carrière dans la science, la technologie, l’ingénierie et les mathématiques, les arts et le vocationnel.
Inclure des softskills comme la communication, les lifeskills et l’éducation civique. - Transformation numérique et équité - un réseau internet à grande vitesse pour tous les collèges, des salles de classe smart et des appareils numériques. Lancer une campagne nationale de l’apprentissage numérique.
- Formation des enseignants et réforme pédagogique - Repenser le Mauritius Institute of Education comme un centre national d’excellence des enseignants pourvoyant une formation adaptée et continue.
Revaloriser le métier d’enseignant et de chef d’établissement avec une meilleure rémunération et des conditions de travail qui attirent les meilleurs talents dans ce domaine dans lequel les jeunes sont désintéressés ! Promouvoir une pédagogie inclusive centrée sur l’élève avec des contrôles continus. Veiller à la santé mentale des élèves et des enseignants.
Pour accompagner cette réforme, le ministère prévoit :
• Des groupes de soutien pour les élèves en difficulté, encadrés par des enseignants formés.
• Un suivi individualisé et des contrôles continus pour éviter toute stigmatisation liée au redoublement.
• Une valorisation du corps enseignant, avec une meilleure formation, un encadrement renforcé et des conditions de travail améliorées.
Mixité repensée dans les Académies
Le ministre a également évoqué une révision du modèle de mixité dans les Académies et des examens du National Certificate of Education (NCE). Les modalités sont actuellement en discussion.
Autorité pour les écoles primaires privées
Les écoles primaires privées auront bientôt un organe de régulation, l’objectif étant de garantir une éducation de qualité conforme aux normes nationales.
Le ministère de l’Éducation prépare actuellement un document pour la mise en place d’une Private Primary School Authority. Cette nouvelle entité aura pour rôle de superviser et d’encadrer les écoles primaires privées payantes à travers le pays.
Au niveau du secondaire privé, la Private Secondary Education Authority (PSEA), qui veille au bon fonctionnement des établissements secondaires privés, existe déjà. La création d’une autorité similaire pour le primaire vise à instaurer un cadre légal et opérationnel spécifique. Elle devrait garantir que chaque école respecte les normes pédagogiques et administratives requises, afin d’assurer aux enfants une éducation conforme aux attentes nationales.
Pour le ministre de l’Éducation, le Dr Mahend Gungapersad, il est essentiel que tous les enfants, quel que soit l’établissement fréquenté, bénéficient d’un enseignement de qualité, structuré et équitable. L’autorité permettra de mieux contrôler les pratiques éducatives des écoles primaires privées et de s’assurer qu’elles répondent aux standards définis par le ministère. Le cadre légal est en voie de finalisation.

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