
Rundheersing Bheenick a occupé à la fois les fonctions de ministre des Finances et de Gouverneur de la Banque de Maurice. Tout comme Renganaden Padayachy et Harvesh Seegolam, il a aussi été arrêté dans le passé avant d’être blanchi par la justice. Il nous livre ses impressions sur cette affaire tout en évoquant la responsabilité d’un Gouverneur.
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Son avis…
…sur l’arrestation de Renganaden Padayachy et d’Harvesh Seegolam : « Généralement, j’accueille ces arrestations et je n’ai aucune raison de croire que les enquêtes préliminaires n’ont pas été menées correctement et que les droits des détenus ont été lésés de quelconque manière que ce soit. Je mentionne cela comme entrée en matière car je suis moi-même passé par là. Et après mon passage, j’avais déclaré à qui voulait m’entendre que je ne souhaite à personne, même pas à mon pire ennemi, d’être traité de la manière dont j’avais été traité par la police instrumentalisée par le régime de Jugnauth. »
…sur sa propre arrestation en février 2015 : « J’ai été cueilli de chez moi un vendredi après-midi sans aucun préavis de quiconque que j’avais gaffé d’une manière ou d’une autre. On m’a emmené dans quelques heures au CCID ou en début de soirée, on m’a informé que j’allais être détenu. Il n’y a eu point d’enquête préliminaire pour confronter mes accusateurs avec mes réponses préliminaires fournies le même jour à toutes les questions que le CCID a bien voulu me poser sans enquête préliminaire des accusateurs. La police politique a décidé de me priver de mes libertés constitutionnelles. Je fais l’économie du temps et de la patience des lecteurs du Défi Media Group pour passer l’éponge sur l’intermède médical où j’ai été quasiment sous arrêt avec une surveillance policière 24 heures sur 24 dans une clinique avant d’être renvoyé au CCID où l’on reprend la soi-disant enquête pour finir par m’arrêter dans la soirée. Et cela toujours sans aucune enquête contradictoire des accusateurs. J’ai dû passer la nuit dans deux centres de détention. J’ai été retiré d’Alcatraz après minuit pour être envoyé au centre de sécurité maximale de Moka. »
…sur les différences qu’il observe : « Premièrement, j’ai été ministre des Finances. Je comprends le sort de M. Padayachy mieux que quiconque. Deuxièmement, j’ai été Gouverneur. Encore une fois, je comprends le sort de M. Seegolam, une personne que je n’ai pas l’honneur de connaître ayant refusé une invitation par le truchement d’un ami commun pour organiser une rencontre à l’endroit et à l’heure qui me conviendrait.
Dans les deux cas, les personnes impliquées suivent mes pas concernant leurs arrestations. Sauf qu’ils avaient été prévenus cinq longs mois à l’avance qu’ils seraient soumis à une enquête et/ou une investigation. Ils avaient ainsi tout le loisir de se préparer à l’avance, soit dans un lapse de temps de cinq mois, à un interrogatoire. C’est un luxe que je n’avais pas. Une expérience à laquelle je ne m’attendais pas du tout puisque je n’avais jamais fait le genre de bêtises/conneries/passe-droit pour lesquelles ils sont accusés. Le genre de liberté qu’ils ont prise d’après les informations qui nous parviennent et que l’on a soupçonné depuis fort longtemps ont déjà conditionné le public à s’attendre à ce genre de dénouement. Il s’agit d’un problème très grave et j’espère que les enquêtes seront menées avec toute la rigueur requise afin de dissiper le sentiment généralisé au sein de l’opinion publique selon lequel « Sinema sa…Zot pou larg li…Lepep ki bet pou aval sa ». Il faut faire comprendre au public que nous n’avons pas l’expérience de ce genre de grand banditisme d’État. C’est grâce au régime de Jugnauth que les Mauriciens découvrent ce genre de ‘misdemeanours, malfeasance, state capture, public finance dilapidation and parallel decision making powers outside cabinet governement’. »
…sur « l’accountability » d’un Gouverneur : « Je vous rappelle qu’en tant que Gouverneur j’ai été traduit devant la Cour suprême pour régler un conflit avec la majorité des directeurs du Board de la Banque de Maurice. Ces derniers étaient soutenus par Mme la secrétaire du Board, M. le conseiller légal interne de la Banque de Maurice, tous deux occupant des planques taillées sur mesure, à la manière du piquet de pantounettes/pouliches essaimées dans divers services tombant sous l’égide de l’ex-ministre Padayachy attendant leurs heures selon les circonstances... Le principal point en litige concernait précisément la responsabilité du Gouverneur devant le Board de la Banque de Maurice. Si vous lisez la grande presse de l’époque, vous verrez surtout après une manifestation des directeurs sur le trottoir devant la BoM que le Gouverneur faisant fausse route. Heureusement, la Cour suprême a trouvé que j’avais raison et que je n’étais pas « accountable » devant le Board agissant à la majorité pour annuler une décision du management avec le Gouverneur. Heureusement que cela soit ainsi car sinon l’héritage que je suis fier d’avoir laissé de mon passage à la BoM sur la politique monétaire et l’inflation n’aurait pas été si reluisant que cela. Et maintenant, on entend dire qu’il y aurait un ancien Gouverneur qui prétend qu’il n’aurait pas eu d’autres options que de suivre les « ordres » émanant du tout puissant ministre ou de la cuisine ! »

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