C’est un grand oublié dans l’histoire de la préservation de notre système écologique. Un nom qui aurait dû susciter admiration et exemplarité dans les pays du Sud, surtout en Afrique. René Dumont (13 mars 1904 - 18 juin 2001) a connu la notoriété avec un livre qui a fait date dans l’histoire agricole de l’Afrique. Intitulé ‘L’Afrique noire est mal partie’ (1962), l’ouvrage, très répandu dans les cercles militants à Maurice, dans les années 70, a réveillé des consciences en raison de sa pertinence et du regard très critique de René Dumont, ingénieur agronome, sur les pratiques agricoles en Indochine (aujourd’hui Vietnam) et en Afrique.
Publicité
Ancien ambassadeur au Mozambique et observateur politique, Alain Laridon se souvient de la portée du livre à Maurice. « C’était une période de débats sur le rôle de l’agriculture dans les pays du tiers-monde. Le livre de René Dumont était porteur d’espoir pour les militants du Tiers-monde, d’autant qu’il était un ardent pacifiste, opposé à la guerre du Vietnam. Plus d’un demi-siècle après la publication de ‘L’Afrique noire est mal partie’, la question de la gestion foncière reste encore d’actualité en Afrique et à Maurice et cet aspect est étroitement lié à celui de la sécurité alimentaire. »
Alain Laridon voit en René Dumont une des grandes figures de l’écologie avant la lettre. Foncièrement laïc, franc-maçon, René Dumont, issu d’une famille d’intellectuels, a d’abord travaillé en Indochine, car il s’intéressait à l’agronomie tropicale. Cela va le conduire d’abord en Indochine avant de partir en mission au Rwanda, au Mali, au Tchad, au Congo, au Benin, à Madagascar et au Cameroun. C’est durant ses voyages et ses différentes expériences avec les pratiques culturales de ces pays qu’il y pointera du doigt l’exploitation intensive des terres en raison des choix issus du système colonialiste.
Dan son ouvrage intitulé ‘Pour L’Afrique, j’accuse’, René Dumont fit cette terrible réquisition : « J’accuse la majorité des dirigeants africains d’avoir profité des privilèges du pouvoir ; j’accuse la coopération française d’avoir accepté de financer des projets somptuaires ; j’accuse la Banque mondiale et le Fonds monétaire international d’acculer ces pays à une austérité payée par les pauvres ; j’accuse, surtout, tous les responsables d’avoir, par leurs politiques, ignoré, ruiné, et méprisé les paysans africains. »
En 1974, il est candidat écologiste à l’élection présidentielle, réussissant à obtenir le nombre de soutiens nécessaires pour se présenter. Le but n’est pas tant d’être élu que de susciter dans les médias une prise de conscience écologique parmi les Français. « Pour René Dumont, le développement n’était pas une question d’argent, de système sociale ou de technique, mais un ensemble de ces trois facteurs. C’était quelqu’un qui était fortement attaché au monde des paysans, car il considérait la terre comme un facteur social capable d’unifier les hommes. En cela, il est le précurseur des idées d’un Jose Bové, un des apôtres de l’alter-mondialisme. Il a vu venir les catastrophes engendrées par une urbanisation démesurée, dont la pollution, la pauvreté et l’exclusion », fait ressortir Alain Laridon.
Notre service WhatsApp. Vous êtes témoins d`un événement d`actualité ou d`une scène insolite? Envoyez-nous vos photos ou vidéos sur le 5 259 82 00 !