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Privy council dans le cas Pravind Jugnauth/ Suren Dayal : le jugement qui aurait pu changer la scène politique

Pravind Jugnauth écoutant le verdict du Privy Council en compagnie de son épouse, Kobita, de son avouée Shamila Sonah-Ori et de son avocat Ravind Chetty. Pravind Jugnauth lors de son discours au Sun Trust après l’annonce du verdict du Privy council.

« Tout était prêt pour organiser des élections générales au cas où nous perdions l’affaire », dira un membre du cercle proche du Premier ministre. En cas de défaite en justice, Pravind Jugnauth allait être de nouveau proposé comme candidat au poste de Premier ministre dans une « snap election ».

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Le jugement émis par les cinq Law Lords du Privy Council, le 16 octobre, aurait pu marquer un tournant décisif dans l'histoire de Maurice. Toutefois, cela n'a pas été le cas. Malgré les contestations entourant l'élection de Pravind Jugnauth en novembre 2019, ainsi que celle de ses colistiers Leela Devi Dookun-Luchoomun et Yogida Sawmynaden par Suren Dayal, candidat malheureux de la circonscription No 8 (Quartier-Militaire/Moka), aucune transformation concrète n'a été observée. Néanmoins, cela pourrait avoir des implications majeures lors des prochaines élections générales.

« À l'unanimité, le Conseil a rejeté l'appel sur tous les motifs. Basé sur ses analyses des faits présentés, le Privy Council a confirmé que la Cour suprême de Maurice avait correctement déterminé que les premier, deuxième et troisième défendeurs (les élus) n'étaient pas impliqués dans des actes de corruption », a statué le Privy Council. Toutefois, il n'a pas émis de recommandations concernant la conduite d'une campagne électorale. Les Law Lords ont strictement interprété les faits qui leur étaient présentés, bien qu'ils aient, d'une certaine manière, ouvert une voie à interprétation. 

« Selon moi, le jugement n'aura pas d'impact direct sur le déroulement de la prochaine campagne électorale », déclare l'avocat Kishore Pertab. « Il est probable que le gouvernement exercera une plus grande prudence, en particulier en ce qui concerne le timing de ses annonces. S'il envisage de faire des promesses électorales, il pourrait les intégrer dans le Budget 2024/25 afin d'éviter toute perception de tentative de corruption électorale.» 

Ils favorisent une approche flexible concernant les promesses électorales émises

Pour Kishore Pertab, le Privy Council a essentiellement affirmé que « les promesses électorales sont permises ». Dans l'ensemble, il estime que cela équivaut à maintenir le statu quo. Promesses électorales, en veux-tu en voilà ! Un avocat, proche du camp gouvernemental et souhaitant conserver l'anonymat, estime que le jugement du Privy Council se révèle en réalité très instructif. « Il délimite essentiellement les frontières de ce qu'un gouvernement peut légitimement faire lors d'une campagne électorale.

Selon les indications du Privy Council, ces marges sont plutôt larges », déclare-t-il. Le camp de Suren Dayal avait invoqué, entre autres arguments, la section 64 de la Representation of the People Act de 1958, qui vise à prévenir les pratiques corrompues comme l'achat de votes. Dans son verdict, le Privy Council précise qu'il « doit y avoir une forme de négociation entre le candidat et l'électeur, où de l'argent est échangé (ou une autre forme de compensation de valeur est offerte) à l'électeur en retour de son vote en faveur d'un parti ou d'un candidat spécifique. Les activités courantes d'une campagne électorale ne relèvent pas de la Section 64. Le simple fait de promettre des avantages financiers à l'électorat dans le but d'obtenir des votes ne constitue pas nécessairement un acte de corruption ».

Les Law Lords vont plus loin en indiquant que « la détermination d'une corruption illégale (…) dépendra toujours des faits spécifiques et de leur gravité. Dans certaines situations, la corruption sera clairement établie. Toutefois, dans d'autres contextes, il sera crucial d'examiner minutieusement tous les éléments factuels et les circonstances environnantes. Il n'existe pas de critère rigide ou universel. Une approche adaptable, en fonction des spécificités de chaque situation, est primordiale ». Ainsi, ils favorisent une approche flexible concernant les promesses électorales émises par un gouvernement.

« L'interprétation littérale de la loi avancée pour M. Dayal rendrait impossible à tout candidat de faire campagne sur une politique générale qui procurerait un avantage financier à un groupe d'électeurs (comme la fiscalité). Cela produirait des résultats absurdes et minerait le principe d'élections libres et équitables. Un tribunal sera réticent à conclure qu'un candidat politique est coupable de corruption sans preuve convaincante à cet effet, en particulier s'ils ont fait campagne en soutien à un engagement du manifeste du parti. Dans le cas présent, la Cour suprême de Maurice était tout à fait en droit de conclure que la corruption n'était pas établie sur les faits et que cela relevait d'une campagne électorale normale », ont-ils encore spécifié. Suren Dayal a également soutenu que la fourniture de nourriture, de boissons et de divertissement lors d'un événement organisé par le ministère de la Sécurité Sociale pour les personnes âgées, où le Premier ministre a pris la parole, constituait également un « bribe électoral ». 

Sur cette question spécifique, le Privy Council a statué que « l'événement en question s'est déroulé bien avant la date du scrutin, et les rafraîchissements ont été fournis par le ministère de la Sécurité Sociale, et non par les premier, deuxième ou troisième défendeurs (c'est-à-dire Pravind Jugnauth, Leela Devi Dookun-Luchoomun et Yogida Sawmynaden). Il s'agissait d'un événement annuel rassemblant des électeurs de l'ensemble de l'île Maurice, et non uniquement d’une circonscriptions spécifique. Aucune preuve ne suggère qu'un électeur a été influencé par ces rafraîchissements. À la lumière des conclusions factuelles de la Cour suprême de Maurice, il était clair qu'aucun des défendeurs ne pouvait être considéré comme ayant agi illégalement ». L'avocat proche de Pravind Jugnauth a déclaré : « Il est manifeste, à la lecture de ce jugement, que les promesses faites par un gouvernement ne peuvent être assimilées à un acte de corruption électorale. Ces actions relèvent simplement des pratiques courantes d'une campagne électorale normale. »

 

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