Le cyclone tropical Freddy, qualifié de « monstre », par sa longévité, sa trajectoire et sa force, ne cesse de nous étonner. Après son périple, de l’Australie à l’océan Indien jusqu’au Mozambique, il semble avoir suffisamment de ressources pour influencer le temps à Maurice, voire revenir dans la région.
Freddy refuse de mourir ! Depuis sa formation, vers le 6 février dernier au nord-ouest de l’Australie, le désormais célèbre cyclone tropical continue de faire parler de lui. Évoluant actuellement dans le canal du Mozambique, il fait circuler de l’air chaud et humide depuis la région équatoriale. Cette interaction entre le flux d’air équatorial et le flux d’air de l’est, associée à un anticyclone au sud de Madagascar, crée des nuages convectifs actifs dans la région sud des îles des Mascareignes.
C’est ce qui a incité la station météorologique de Vacoas à émettre une nouvelle alerte de veille de fortes pluies samedi après-midi, 4 mars, valide jusqu’au lundi 6 mars. Pour cause, des averses généralisées, d’intensité modérée à forte parfois, et accompagnées d’orages sont prévues.
Pris en tenaille entre Madagascar et le Mozambique
Les systèmes cycloniques qui suivent une trajectoire presque droite de l’est vers l’ouest ou qui passent deux fois sur la même ligne sont rares. C’est pourtant ce qu’il s’est produit avec le cyclone tropical Fantala en avril 2016. Quant à Freddy, il est difficile de prédire sa trajectoire, indique Ram Dhurmea, assistant directeur de la station météorologique de Vacoas.
« Les dernières informations indiquent qu’il va se rapprocher à nouveau de la côte est de l’Afrique et va rester dans le bassin du canal de Mozambique pour encore quelques jours. Cependant, il est difficile de prédire sa trajectoire, car cela dépend de plusieurs facteurs », fait-il comprendre.
Pour sa part, Vassen Kauppaymuthoo, ingénieur en environnement et océanographe, indique que Freddy tourne en rond dans le canal du Mozambique en raison de sa lutte avec l’anticyclone au sud de Madagascar. « Les cyclones et les anticyclones ne se repoussent pas directement. Ce sont deux phénomènes météorologiques différents qui se forment en fonction de la pression atmosphérique et des vents », indique-t-il.
Ainsi, Freddy est « coincé ». Il ne peut aller que d’ouest en est et vice versa ou légèrement vers le nord, sans pouvoir descendre vers le sud. « Il se trouve comme dans un enclos, entre Madagascar et le Mozambique, et tourne en rond sans savoir quelle direction prendre », renchérit Ram Dhurmea. D’où sa présence prolongée dans la région.
Des records à la pelle
Le cyclone Freddy a battu plusieurs records, dont ceux de longévité, puissance et distance parcourue. Quand il s’est approché de Maurice le 20 février dernier, il y avait des vents de plus de 300 km/h près de son centre. Selon Vassen Kauppaymuthoo, les conditions atmosphériques font que les systèmes battent des records au niveau de la puissance en termes d’énergies emmagasinées et survivent plus longtemps.
Freddy a aussi battu le record de distance parcourue, avec plus de 9 000 kilomètres au compteur. Il s’agit de l’une des plus longues distances enregistrées dans l’océan Indien pour un phénomène tropical.
Quant à la durée de vie de Freddy, bien malin celui qui pourrait le prédire ! « Au lieu d’avoir de brefs phénomènes, nous sommes désormais confrontés à des systèmes qui durent et, par conséquent, à des dangers sur une plus longue période », souligne-t-il.
Pour Vassen Kauppaymuthoo, le monde est en train de découvrir le vrai visage du changement climatique. « Des phénomènes plus violents étaient prévus, mais il était difficile de prédire qu’ils allaient durer plus longtemps », explique-t-il.
« Les systèmes tropicaux ou cyclones durent quatre à cinq jours avant de passer au stade de système extratropical quand ils vont vers le sud », poursuit l’océanographe. Or cela fait pratiquement un mois que Freddy a pris naissance et semble avoir suffisamment de force et d’endurance pour rester en vie pour encore quelques jours. Avant Freddy, il y a eu le cyclone tropical Éline (ex-Léon), de février à mars 2000, qui avait pris naissance en Australie pour atterrir au Mozambique.
Freddy, l’invincible ?
Il est clair que Freddy se trouve dans un environnement propice pour assurer sa survie, ajoute l’océanographe. « Pour qu’un système dépressionnaire ou un cyclone se forme et puisse évoluer, des conditions océanographiques très particulières doivent être réunies, notamment avec de l’eau à plus de 26 degrés sur plus de 60 mètres de profondeur », fait savoir Vassen Kauppaymuthoo.
De plus, toutes les conditions atmosphériques doivent être plus ou moins stables pour que le cyclone puisse se développer et être alimenté. En général, les conditions changent très souvent quand le cyclone passe dans des eaux plus froides, ce qui le fait perdre de son intensité ou puissance.
« Mais avec le changement climatique, il y a des vagues de chaleur au sud de l’équateur qui favorisent la survie d’un cyclone. Les conditions atmosphériques propices dont a bénéficié Freddy et l’absence de cisaillement ont aussi contribué à le maintenir en vie », fait ressortir l’océanographe.
Et malgré sa distance à plusieurs centaines de kilomètres à l’ouest de Maurice, Freddy, qui semble invincible, influence indirectement le temps sur notre région en nous apportant de la pluie.
Averses modérées à fortes jusqu’à lundi
La station météorologique de Vacoas a émis une veille de fortes pluies valide jusqu’au lundi 6 mars en raison de l’influence du cyclone tropical modéré Freddy qui se trouve dans le canal du Mozambique. La masse d’air sur notre région, étant très humide et instable, est favorable à la formation de nuages actifs sur l’île qui apporteront de la pluie jusqu’à demain. Ces averses seront accompagnées d’orages.
Il fait chaud, certes, mais nous sommes loin des records de chaleur. « Le thermomètre affiche un maximum de 31 à 33 degrés sur le littoral. Avec la couverture nuageuse qui règne actuellement sur l’île, il est peu probable que le mercure atteigne les 34 degrés ou plus », estime Ram Dhurmea.
Il explique que la présence de Freddy entraîne un flux de masse d’air de la zone équatoriale qui vient sur notre région et apporte beaucoup d’humidité, d’où la sensation de chaleur inconfortable qui prévaut depuis quelques jours.
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