
Après la découverte d’un nourrisson abandonné dans un sac à Rose-Hill, plusieurs questions sont soulevées. Vidya Charan, directrice de la Mauritius Family Planning Welfare Association (MFPWA), évoque un manque de soutien parental, la pauvreté et l’ignorance des moyens contraceptifs. La hausse des grossesses précoces souligne l’urgence d’introduire une éducation sexuelle complète dans les collèges, dit-elle.
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Maurice a recensé quelque 233 enfants abandonnés entre 2021 et 2024. Le dernier cas remonte au début de cette semaine à Rose-Hill. Comment expliquer ce phénomène ?
Lorsqu’une famille – le père et la mère – décide d’un commun accord d’abandonner son bébé, c’est à la fois triste et déplorable. Un nourrisson a besoin d’affection, d’attention et surtout de l’amour de ses parents.
Souvent, si une mère se voit obligée d’abandonner le bébé qu’elle a porté pendant neuf mois, c’est par manque de soutien de la part de son partenaire. Parfois aussi, elle découvre sa grossesse trop tard, ce qui l’empêche d’envisager un avortement, même si cette pratique reste illégale à Maurice. Comment, alors, faire face seule à cette réalité dans le regard de la société ?
À cela s’ajoute la cherté de la vie : élever un enfant coûte cher aujourd’hui. Il faut également composer avec le regard des autres, à commencer par celui des proches.
Devant cette problématique, l’enfant deviendrait-il un fardeau pour la maman?
L’enfant peut être considéré, malgré l’amour de la mère, comme un fardeau, surtout si celle-ci ne travaille pas et qu’il y a une absence de ressources financières et de soutien de la part de l’entourage. Il faudrait renforcer la responsabilisation des femmes, en particulier des adolescentes et des mineures, car il existe des moyens de contraception gratuits et accessibles dans les services de santé publique.
Même pour les mineures ?
Souvent, le service de santé publique ne demande pas de carte d’identité pour offrir des contraceptifs. Dans le secteur privé, ces produits sont en vente libre. Cependant, certaines jeunes filles ressentent de la gêne à l’idée de se rendre dans un dispensaire pour demander la pilule contraceptive, en raison des jugements ou du regard des autres.
Il y a une impression de libéralisation de la sexualité chez nos jeunes…
Il ne faut pas se voiler la face. Le nombre de grossesses précoces, souvent non désirées, est en constante augmentation. Les jeunes d’aujourd’hui sont sexuellement très actifs. Certaines jeunes filles banalisent les rapports sexuels, recherchant le plaisir sans mesurer les conséquences sur leur santé, leur éducation et leur avenir. Il est essentiel de les préparer à avoir une vie sexuelle active, mais surtout responsable.
N’y aurait-il pas un manque d’information chez les jeunes, qui ignorent souvent les moyens de protection existants ? Ne pensez-vous pas qu’il serait temps d’introduire l’éducation sexuelle dans nos collèges ?
La MFPWA organise des causeries et nous sommes sollicités dans de nombreux établissements, mais il nous est impossible de couvrir toute l’île. Nous animons des sessions d’éducation sexuelle complète (Comprehensive Sexuality Education), mais cela reste insuffisant.
Pourquoi ne pas intégrer un module d’éducation sexuelle en tant que matière dans le syllabus ?
C’est précisément ce qu’il faudrait : un module à part entière dispensé dans les collèges.
Ce module est longtemps resté tabou pour nos gouvernants. Pourquoi ?
Le tabou commence à s’estomper. Une demande officielle pour l’introduction d’un module sur l’éducation sexuelle dans les collèges a déjà été soumise au gouvernement. Actuellement, il existe une matière appelée « Health Education », mais celle-ci ne couvre pas suffisamment les compétences essentielles pour faire comprendre les dangers des relations sexuelles non protégées, les conséquences d’une infection sexuellement transmissible (MST), du VIH/sida, entre autres risques.

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