
Une lueur d’espoir se profile pour les familles des victimes, les patients dialysés décédés pendant la période de Covid-19. Le Directeur des Poursuites Publiques (DPP) a décidé d’ouvrir une enquête judiciaire sur les circonstances entourant la mort de 11 patients. C’est Bose Soonarane, secrétaire de la Renal Disease Patients’ Association, qui confirme l’information.
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Dans une déclaration au Défi Quotidien, Bose Soonarane explique avoir eu une communication officielle en ce sens.
“Vendredi dernier, j’ai reçu un mail du bureau du DPP m’annonçant la décision de mettre sur pied une enquête judiciaire concernant les patients dialysés qui sont décédés. Aucune date de début n’a cependant été précisée pour l’instant. J’attends d’avoir d’autres détails également”, indique-t-il.
L’affaire remonte à 2021, lorsque 11 patients dialysés sont décédés dans des circonstances jugées “troublantes”, notamment après avoir été transférés en centres de quarantaine. “Des soupçons de négligence médicale et administrative ont été soulevés. Une commission d’enquête avait été réclamée, en vain. Ce n’est qu’avec l’intervention d’un Fact-Finding Committee (FFC) et du Medical Negligence Standing Committee que des rapports ont été établis. Mais ces derniers sont restés lettre morte jusqu’à la fin du mandat du précédent gouvernement”, s’indigne le secrétaire de la Renal Disease Patients’ Association.
Bose Soonarane rappelle que, lors des dernières élections générales, le nouveau gouvernement avait promis de rendre ces deux rapports publics. “Une promesse tenue. Et c’est à la lumière des informations contenues dans ces documents que j’ai repris contact avec le DPP. Une partie de la vérité a été révélée, il faut maintenant aller jusqu’au bout”, déclare-t-il.
Le secrétaire de l’association affirme avoir reçu des témoignages faisant état de négligence criminelle, bien avant même la publication des rapports.
“Je savais qu’il y avait faute, mais je n’avais pas les éléments suffisants pour que le DPP puisse agir. Il m’avait reçu avec bienveillance et m’avait assuré que, si de nouveaux éléments venaient à émerger, il réévaluerait la situation”, met en avant Bose Soonarane.
Chose dite, chose faite : les rapports qui ont été publiés ont été transmis au DPP, qui les a étudiés conjointement avec des documents du ministère de la Santé. Selon Bose Soonarane, “plusieurs fautes graves y sont clairement mises en lumière, notamment le manque de soins dans les centres de quarantaine, des décisions inappropriées liées à l’alimentation et à la gestion des traitements, et l’abandon de patients souffrant de comorbidités lourdes.”
Il poursuit en précisant que l’enquête judiciaire devrait permettre d’entendre des témoins oculaires qui n’avaient pas été appelés lors du Fact-Finding Committee. Il ajoute que cela offrira aussi l’occasion d’interroger l’ancien ministre de la Santé, Kailesh Jagutpal, ainsi que d’autres responsables administratifs. “Des tentatives de camouflage ont eu lieu. Aujourd’hui, il est temps que la lumière soit faite sur ce drame et que les coupables répondent de leurs actes”, affirme Bose Soonarane.
Il insiste : ce combat n’est pas personnel. “Je n’ai aucun intérêt financier ou politique. Je suis un retraité, sans grands moyens, mais déterminé à aller jusqu’au bout”, avance-t-il. Il remercie les médecins, avocats et bénévoles qui l’ont contacté pour l’aider gratuitement une fois les travaux de l’enquête judiciaire entamés.
“C’est grâce à toutes les personnes qui veulent que la vérité éclate, mais aussi grâce aux médias, que nous avons pu faire entendre notre voix. Cette victoire, si elle aboutit, sera celle de tout un peuple”, lance-t-il.
Par ailleurs, il demande que le gouvernement prolonge la période légale — qui s’est terminée en février 2023 — permettant aux familles des victimes de faire une réclamation, en tenant compte de la date récente de publication des rapports.
“Le silence a trop duré. Maintenant que l’enquête judiciaire est enclenchée, nous espérons que justice sera enfin rendue”, affirme Bose Soonarane.
Contexte et circonstances des décès
En 2021, au plus fort de la pandémie de Covid-19, 11 patients dialysés sont décédés à l’hôpital de Souillac et au centre de quarantaine de l’hôtel Tamassa, à Maurice.
Le 26 mars 2021, les patients dialysés ont été transférés de l’hôpital de Souillac vers le centre de quarantaine de l’hôtel Tamassa. Le transport s’est effectué dans un véhicule surchargé, sans respect des mesures sanitaires telles que la distanciation sociale et une ventilation adéquate, augmentant ainsi le risque de contamination.
À leur arrivée, les patients ont dû attendre de longues heures avant d’être pris en charge, certains n’étant installés dans leurs chambres qu’en fin de journée. Des repas inadaptés à leur régime alimentaire leur ont été servis, et les visites médicales étaient sporadiques. De plus, des séances de dialyse ont été écourtées sans explication, et une coordination déficiente entre les différentes parties impliquées a été constatée.
Face à ces événements, un Fact-Finding Committee (FFC), présidé par l’ex-juge Deviyanee Beesoondoyal, a été mis en place. Le rapport du FFC a mis en évidence des manquements graves, notamment un manque de planification et d’organisation de la part des autorités sanitaires, un déficit en ressources humaines et matérielles, et une mauvaise coordination des soins.
Parallèlement, le Medical Negligence Standing Committee (MNSC) a examiné les cas et identifié des négligences médicales dans plusieurs d’entre eux, mettant aussi en cause le manque d’effectifs et l’absence de supervision adéquate.
Le rapport du Fact-Finding Committee sur le décès des onze patients dialysés en 2021 a été déposé à l’Assemblée nationale ce vendredi 20 décembre dernier. Idem pour le rapport du Medical Negligence Standing Committee.
Les familles des victimes, soutenues par la Renal Disease Patients’ Association (RDPA), ont exprimé leur colère et leur incompréhension face aux conclusions des rapports. Elles dénoncent une “négligence criminelle” et réclament justice pour leurs proches décédés dans des conditions qu’elles jugent inacceptable

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