Selon Statistics Mauritius, 42 % des chômeurs étaient âgés de moins de 25 ans en 2019. Un des objectifs du Premier ministre, Pravind Jugnauth, en 2020 est de s’assurer que les jeunes aient plus d’occasions sur le marché du travail. Mais pourquoi les jeunes Mauriciens peinent-ils à trouver du travail et que faut-il faire pour remédier à la situation ? Nous leur avons posé la question.
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Le chômage a touché plus de 16 000 jeunes âgés de moins de 25 ans en 2019. Selon Statistics Mauritius, le taux de chômage au troisième trimestre 2019 était estimé à 6,7 % contre 6,9 % au troisième trimestre 2018. Et ce sont les jeunes qui sont les plus affectés par ce problème de société. Toujours selon Statistics Mauritius, le taux de chômage des jeunes a augmenté, passant de 21,3 % au second trimestre 2019 à 23,4 % au troisième trimestre 2019.
Dans son message pour le Nouvel An, le Premier ministre, Pravind Jugnauth, s’est adressé à la jeune génération. Il a soutenu que son objectif est de développer plus de proximité avec la jeunesse. Le chef du gouvernement a aussi, dans son message, affirmé que son objectif est de s’assurer que les jeunes aient plus d’opportunités sur le marché du travail.
Les jeunes âgés de 16 à 24 ans sont en effet les plus touchés par le chômage à Maurice. Au troisième trimestre 2019, les jeunes chômeurs étaient au nombre de 16 400. Pour Nabiil Bhankarally, 26 ans, et consultant en recrutement dans un groupe international, un bon nombre de jeunes peinent à trouver du travail. « Les jeunes ont des difficultés à décrocher un emploi après avoir obtenu un diplôme, car il y a une disparité entre l’offre et la demande sur le marché de l’emploi, c’est-à-dire que le cursus scolaire ne correspond pas aux besoins réels du monde professionnel », soutient-il.
Pourquoi avons-nous autant de jeunes au chômage ? « Beaucoup de jeunes ne possèdent pas suffisamment d’expérience quand ils intègrent le monde du travail. D’autres décident de rester sans emploi, car le salaire proposé pour des postes juniors ne les motive pas. Ou tout simplement parce que leur diplôme ne colle pas à la demande des employeurs », explique-t-il. Il estime qu’il est important de combattre cette disparité entre offre et demande.
« Tout d’abord, il doit y avoir une meilleure communication sur ce que les entreprises recherchent en termes de compétences auprès des jeunes, c’est-à-dire à travers des visites dans des institutions secondaires et tertiaires, des salons de l’emploi et des journées d’orientation, entre autres. De plus, pendant leur cursus universitaire, les jeunes devraient avoir la possibilité d’augmenter leur expérience à travers des stages d’une durée de six mois minimum. » Le jeune consultant dit avoir constaté que « le marché de l’emploi à Maurice se tourne considérablement vers le secteur des services tels que la vente, la restauration et l’hébergement, entre autres, alors que les boulots dans les secteurs primaire et secondaire ont connu une baisse importante ».
Réactions
Badir Korumtollee : « On sous-estime les jeunes »
L’étudiant en troisième année en gestion de la logistique et des transports pense que trop peu d’importance est accordé à certaines filières d’études à Maurice. « Ceux qui optent pour ces filières doivent faire face à de multiples défis pour pouvoir émerger sur le marché du travail. Je pense que nous avons besoin d’un changement de mentalité et avoir encore plus de programmes d’études supérieures. L’implication des jeunes à différents niveaux apporte l’innovation, mais à Maurice les jeunes sont sous-estimés. Les entreprises privées et publiques doivent recruter des jeunes, afin d’assurer le progrès à travers de nouvelles voies et idées. » « Vous devez avoir plus de qualifications, de préférence d’universités étrangères, pour pouvoir réussir », disent certains.
Keshvin Balloo : « Offrez des stages appropriés aux étudiants »
Pour Keshvin Balloo, étudiant en troisième année en droit, le chômage est une source d’inquiétude chez les jeunes. « À l’école, on nous a toujours dit que l’éducation est un ticket pour l’emploi alors qu’en réalité, cela ressemble plus à des directions vagues vers une destination quasi-inconnue. Selon moi, les universités devraient collaborer avec les secteurs public et privé pour offrir des stages appropriés aux étudiants indépendamment de leurs cours. En outre, le Citizens Advice Bureau (CAB) pourrait également travailler main dans la main avec plusieurs institutions publiques et privées pour répondre aux besoins des chômeurs et les placer rapidement dans des entreprises. Par conséquent, cela pourrait encourager les gens à s’inscrire comme chômeurs, sachant que le CAB deviendrait un intermédiaire efficace entre les chômeurs et les employeurs. »
Radha Sumaruth : « La stigmatisation sur les emplois non-conventionnels doit être supprimée »
Radha Sumaruth est une étudiante de 19 ans. « Je pense que la racine de ce problème se trouve dans notre système éducatif. Nos matières sont très conventionnelles et n’ont pas changé depuis des années, que ce soit au niveau secondaire et au niveau supérieur. Les étudiants ont donc presque les mêmes qualifications qu’il y a dix ans. Nous devons aller de l’avant avec de nouvelles matières d’étude, afin d’avoir une main-d’œuvre diversifiée et de nouveaux emplois adaptés à l’ère numérique du 21e siècle. Il est aussi temps que nous nous ouvrions à l’entrepreneuriat et que nous changions notre approche dans des domaines tels que le divertissement, la couture et la cuisine ainsi que l’économie des océans. La stigmatisation sur les emplois non-conventionnels doit être supprimée. » La question est de savoir combien d’efforts sont déployés pour rendre l’emploi disponible pour les jeunes.
Chelvin Ramsamy : « Le recrutement ne se fait pas par rapport au mérite »
Chelvin Ramsamy, 25 ans, consultant en fiscalité, pense que le chômage chez les jeunes reste un défi de taille qui empire d’année en année. « La dure réalité du marché du travail, c’est qu’après avoir postulé sans succès pour un emploi, les jeunes se voient contraints de prendre n’importe quel emploi qui leur est présenté, même si celui-ci n’a absolument rien à voir avec ce qu’ils ont appris à l’université. La chagrinante, frustrante, démotivante et désolante réalité, c’est qu’à Maurice, le recrutement ne se fait nullement par rapport aux compétences et au mérite. Par ailleurs, les filières d’études ne mènent pas toutes nécessairement à un boulot. Le gouvernement doit impérativement travailler d’arrache-pied pour créer suffisamment d’emplois, afin d’éviter à tout prix que les jeunes ne perçoivent pas leurs diplômes comme une perte d’argent et de temps. »
Vanni Vyapoory : « Sanctionnez le népotisme, le favoritisme et le backing »
Étudiante diplômée en droit, Vanni Vyapoory confie son stress. « L’université nous a formés à passer nos examens, mais quant aux rouages du métier, aux astuces pour obtenir du travail et réussir professionnellement, nous sommes livrés à nous-mêmes. Je sais que je veux poursuivre une carrière juridique, mais le métier est saturé. Cela comme dans beaucoup d’autres filières. Notre île a un nombre de postes vacants limité, mais la quantité de gradués augmente. L’appréhension que mes pairs et moi ressentons est normale. Sanctionnez le népotisme, le favoritisme et le backing. Cela assurerait que tout le monde ait une chance. Aux jeunes qui ressentent cette angoisse : travaillez dur, dénoncez les injustices et gardez espoir. »
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