Faits Divers

La descente aux enfers d’Anusha: «Mon époux, mon proxénète»

Elle vit un véritable enfer. Entre la drogue, la prostitution et le VIH/Sida, cette mère de deux enfants, dont le cadet a contracté le virus, dit regretter ses choix. L’un d’eux a été un amour d’adolescence qui s’est transformé aujourd’hui en peine immense… Les larmes ruisselant sur le visage, Anusha (prénom modifié), 32 ans, nous ouvre son cœur meurtri. La douce brise de bonheur qui soufflait au début de sa relation avec son époux, dit-elle, s’est vite transformée en tempête. Aux violences conjugales, dont elle est régulièrement sujette, s’est invité l’enfer de la drogue avec tout ce que cela implique. Voici son histoire poignante… Son enfance est marquée par la violence domestique. « Mon père était alcoolique et ma mère l’a quitté parce qu’il était violent. J’avais dix ans lorsque ma mère est retournée vivre chez ma grand-mère », relate l’unique enfant du couple. Sa mère refait sa vie et deux autres filles naîtront de ce mariage, indique Anusha. Elle n’a que 16 ans quand elle rencontre son futur époux – âgé de 39 ans aujourd’hui – qui, à l’époque, exerce le métier de receveur d’autobus. Les deux, originaires de la même localité dans le Sud, tombent immédiatement amoureux. Anusha confie avoir, à maintes reprises, fait l’école buissonnière pour rencontre son prince charmant. Elle est alors en Form IV. Deux mois après leur rencontre, elle abandonne ses études pour vivre en concubinage avec le receveur d’autobus. Durant les premières années, Anusha est aux anges. Elle savoure chaque seconde de bonheur. Deux ans plus tard, alors qu’elle est fraîchement majeure, elle se marie avec son amoureux à l’état civil.

Les premiers « coups » durs

Les années passent. Anusha, qui n’a que 22 ans, donne naissance à leur premier enfant. Entre-temps, son époux tombe dans l’enfer de la drogue. La jeune femme est, quant à elle, projetée dans celui de la violence domestique. En témoignent les multiples cicatrices qu’elle porte sur les bras, dont l’un sur la joue gauche qu’elle décrit comme un souvenir : « Enn ti kado mo mari sa. » Elle avoue s’être également essayée au gandia avec son époux, avant de passer à l’héroïne. Très rapidement, Anusha en devient dépendante. « Mo mari inn gagn travay dan Porlwi. Nounn demenaze lerla. Isi gagn ladrog pli fasilma. Nounn kit mo garson avec mo granmer letan nounn vinn res Porlwi. » Tantôt maçon, tantôt enflé de camion, l’époux fait bouillir la marmite avec des petits boulots. Mais l’argent est loin d’être suffisant pour leur dope quotidienne. Pour en avoir plus facilement, poursuit Anusha, son époux lui demande alors de vendre son corps. « Koumansman, li amenn bann kamarad ki kas yen ansam ek ti pe vann mwa ar zot. Apre linn amenn bann kliyan taywane ek osi dan enn baz dan Grand-Baie. Li mem negosye pri ek asir mo sekirite ek bann kliyan », relate-t-elle. La nuit, c’est à la route Nicolay ou au jardin de la Compagnie que la jeune mère de famille fait le trottoir. Mais là-bas, dit-elle, la compétition est féroce et il y a trop de rivalité entre les prostituées. Anusha préfère donc de se rendre à Grand-Baie le soir. Son époux, lui, fait le va-et-vient en prison pour des délits de drogue. D’ailleurs, cela fait huit mois qu’il est au trou, lance-t-elle, car il a écopé d’une peine de trois ans de prison.

Insultes et violences physiques

À chaque séjour qu’il effectue derrière les barreaux, Anusha se retrouve seule. Mais elle continue à se prostituer. « A sak fwa li sorti, li rod kas ar mwa. » La violence physique, les insultes et la peur font partie de son quotidien. « Li pran tou kas ki monn ramase, li al bwar ek droke. Pa kapav dir li nanie. Kout kuter gagne ar li. Kan linn koup mo figir, mo ti al dormi lopital de semenn », poursuit-elle. Il y a cinq ans, un nouveau coup dur l’assaille. Anusha se fait faire une prise de sang, lors d’une campagne de dépistage du VIH/Sida menée par une Ong, au jardin de la Compagnie. Le test est positif. « Mo ti kone ki enn zour mo pou atrap sida. Mo sagrin me mo pa kapav fer nanie aster. Dan sa mem period-la, monn tom ansint ek mo zanfan osi finn ne ek sa. Me li fer tou so tretma medikal ek mwa osi », explique Anusha. Elle confie que son époux, qui est également séropositif, lui a caché sa maladie. Pour la jeune prostituée, sa vie est un échec. « Si mo ti kapav revinn an aryer, mo pa ti pou fer sa erer la. Mo regret boukou pou mwa ek mo zanfan. Mo finn fer enn move swa dan mo lavi. Mo dir bann fam reflesi byen avan zot fer enn swa dan zot lavi », conclut Anusha.

Un travailleur social : « Certaines monnayent leurs charmes pour faire bouillir la marmite »

Bien souvent, la prostitution est associée à la drogue, confie un travailleur social qui opère sur le terrain depuis des années. « Elles le font pour des raisons diverses. Mais pour la plupart, il s’agit d’un moyen leur permettant de se payer leur dose de drogue quotidienne. Dans plusieurs cas, les maris ou les concubins sont les proxénètes. Beaucoup d’entre elles vivent un enfer. Ce sont des mères de famille qui monnayent leurs charmes pour faire bouillir la marmite et se payer leur dope », explique-t-il. Certaines sont atteintes de maladies sexuellement transmissibles et n’ont aucun but dans la vie, poursuit le travailleur social. Il dit connaître des prostituées, âgées de moins de 21 ans, qui ont une dizaine de clients à satisfaire par jour. « Les nouvelles attirent davantage de clients. Ce qui crée une rivalité avec les anciennes. Leur quotidien est rythmé par la violence, la drogue et l’alcool », conclut-il.

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