Live News

Khalil Elahee, Prof. de la faculté d’ingénierie de l’UoM : «L’incendie à Mare-Chicose prouve qu’on n’a pas de ‘preparedness plan’»

Les émissions de gaz de Mare-Chicose dans l’air sont-elles toxiques ? 
Voyons les faits. Il existe des normes pour l’air que nous respirons. Mais les tests aléatoires (spot tests) que conduit le ministère à l’aide d’un appareil portatif ne vérifient nullement les taux de pollution à la lueur de ces normes. 

Publicité

Nous ne comparons pas la pollution avec les normes que nous avons adoptées, même si elles datent de 1998. Il n’y a pas de « monitoring » continu pour les particules fines (PM10 et surtout PM2.5 qui sont associées au cancer du poumon), pour les Total Suspended Solids ou encore pour l’ozone. De même, les dioxines et les furanes, qui sont hautement cancérigènes, ne sont nullement mentionnés dans les rapports rendus publics. 

Mais les autorités ont assuré que les émanations ne sont pas toxiques… 
D’abord, le ministère fait référence au « Lowest Observed Adverse Effect Level » (LOAEL) à la lueur des « spot tests » souvent effectués au moment où les émissions diminuent en intensité. Ce n’est pas suffisant. Il faut des tests continus, pratiqués selon les normes et surtout tôt le matin et le soir. Mais ce qui doit nous interpeller c’est est le « No Observed Adverse Effect Level » (NOAEL), qui peut être 10 fois moins élevé que le LOAEL. C’est le principe de précaution qui doit prévaloir. 

Un exemple ?
Pour mieux comprendre le LOAEL, prenons l’exemple d’une voiture. Si la vitesse minimale à laquelle je vais me tuer au volant d’une voiture est de 400 km/h, je ne prends pas le risque de rouler à cette vitesse. Il faut une vitesse inférieure comparable au NOAEL où le danger n’existe pas. 

Il faut aussi noter que les rapports du ministère contiennent un « disclamer » sur le fait que des polluants ne sont pas compris dans les analyses. Il y a même une « recommendation » du communiqué en date du 15 novembre qui dit ceci : « It is advisable that vulnerable groups such as the children, the elderly or people with pre-existing respiratory conditions consider reducing outdoor physical activities. »  

Le centre d’enfouissement est saturé, même si la sonnette d’alarme a été tirée depuis des lustres. Vos explications ? 
Je pense que, dans l’immédiat, il faut se concentrer sur l’incendie et ses conséquences. Ensuite, dans les jours qui suivent, il faut penser à des solutions à court et moyen termes. La priorité urgente est bien la santé publique, car les émissions parviennent jusqu’aux Plaines-Wilhems. 

Faut-il trouver d’autres solutions alternatives, comme le tri des déchets à long terme ? 
Certainement, mais cela tout le monde le sait. Cela fait des décennies que nous parlons de la gestion intégrée des déchets, mais les actions ne suivent pas. Nos enfants apprennent l’importance du tri des déchets à l’école, mais lorsqu’ils viennent à la maison, aucun dispositif n’existe vraiment. 

Avec Joël de Rosnay, une approche holistique avait été proposée, non seulement pour réduire, réutiliser et recycler les déchets, mais aussi pour transformer en énergie, dans le respect de l’environnement, une certaine quantité de ces déchets. Il faut revenir au concept systémique que prônait le projet de société de Maurice île Durable en 2008 déjà. 

Pour en revenir à Mare-Chicose, faut-il une aide étrangère pour stopper l’incendie ou un cyclone peut-il être une bonne nouvelle s’il apporte une forte pluviosité ? 
Je pense qu’il faut poser la question aux spécialistes de ces domaines. Mais ce qui est clair, c’est que nous n’avons pas de « preparedness plan ». Cela reflète la fragilité de nos institutions, exacerbée par le feu qui a éclaté à Mare-Chicose durant la campagne électorale et le fait qu’il n’y ait pas encore de ministre en poste. Il est temps d’adopter une rigueur scientifique.

 

Notre service WhatsApp. Vous êtes témoins d`un événement d`actualité ou d`une scène insolite? Envoyez-nous vos photos ou vidéos sur le 5 259 82 00 !