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Interdiction de licencier pour raisons économiques : un prolongement réclamé

Une source gouvernementale estime qu’il y a une reprise économique en ce moment et que cette mesure ne devrait pas être étendue.

A partir du 31 décembre, l’interdiction de licencier pour des raisons économiques prend fin, à moins que le gouvernement décide d’étendre cette mesure. C’est du moins ce qu’espèrent les syndicats qui redoutent la récession de 2023 dont parle la Banque mondiale et le sort qui sera réservé aux salariés. Les employeurs, eux, trouvent tout à fait normal que cette interdiction disparaisse. 

L’interdiction de licencier des employés pour des raisons économiques prend fin le 31 décembre 2022. Pour l’instant, nul ne sait si cette mesure, prise dans le contexte de la pandémie de COVID-19 pour protéger les salariés, sera renouvelée en 2023. C’est en tout cas ce qu’espèrent les syndicats. 

La Confédération des travailleurs du secteur privé, Reaz Chuttoo, dit avoir déjà demandé au gouvernement de prolonger cette mesure. « Nous sommes encore en pleine reprise économique. Nous n’avons pas encore sorti la tête de l’eau. La Banque mondiale a annoncé qu’en 2023, il y aura une récession économique à travers la planète. Si on permet aux employeurs de mettre à la porte les employés, toutes les protections dont ont bénéficié ceux-ci ces deux dernières années tomberont à l’eau », indique le syndicaliste. 

Il dit en avoir informé le gouvernement. Selon lui, la CTSP attend une réponse du ministère du Travail sur ce dossier. Reaz Chuttoo explique que grâce à cette mesure, aucune entreprise n’a fermé ses portes, ce qui signifie qu’elles se portent à merveille. « Nous maintenons que les trois quarts des licenciements ont lieu car les employeurs veulent augmenter la profitabilité de leur entreprise. Certaines firmes auront tendance à licencier et à recruter des employés en leur offrant le salaire minimal », prévient-il. 

Redundancy Board 

Ivor Tan Yan, spécialiste en loi industrielle, soutient que si le gouvernement ne renouvelle pas cette mesure, plusieurs entreprises auront tendance à licencier. « Les travailleurs risquent de se retrouver sans emploi », dit-il. Il rappelle à ceux qui se sentent lésés qu’il y a le Redundancy Board. « Si des employés estiment avoir été injustement licenciés pour une raison économique, ils peuvent toujours se tourner vers cette instance. » 

Atma Shanto, président de la Fédération des travailleurs unis, a lui aussi des appréhensions. Il raconte avoir, dans le passé, été témoin de plusieurs licenciements ayant plongé des gens dans la misère. Puis, dit-il, le gouvernement est venu avec le Redundancy Board afin d’éviter des licenciements pendant la période de COVID-19. « Il n’y a pas eu de licenciements injustifiés comme auparavant. En revanche, si cette mesure n’est pas étendue, nul ne sait quel sera le sort des employés », soupire-t-il. 

Il demande au gouvernement de prendre le taureau par les cornes. « L’octroi de la compensation salariale de Rs 1 000 l’année prochaine ne signifie pas pour autant que les entreprises pourront faire ce qu’elles veulent. » Il s’appuie sur le fait que le ministre des Finances et le Premier ministre ont, à maintes reprises, affirmé que les activités économiques ont repris. « Le gouvernement doit donc renouveler l’interdiction faite aux employeurs de licencier leurs employés pour des raisons économiques », fait-il comprendre. 

Réels motifs 

Selon Atma Shanto, très souvent, l’employeur brosse un sombre tableau de la situation économique de l’entreprise. Il se demande s’il y a réellement une enquête pour savoir les vraies raisons des licenciements au sein des sociétés. Il demande aussi au gouvernement de continuer à donner les Rs 1 000 aux employés qui touchent un salaire de moins de Rs 50 000 car cela les soulage grandement. 

L’interdiction sera-t-elle étendue ? Rien n’est sûr car à l’hôtel du gouvernement, on indique qu’avec la reprise économique, cette mesure ne devrait pas être étendue. « Dans le dernier Budget, le patronat avait fait des lobbies pour faire lever cette interdiction, mais le ministre des Finances l’avait étendue jusqu’au 31 décembre 2022 », fait-on comprendre. 

Au sein de Business Mauritius, on indique que l’interdiction avait été introduite dans un contexte particulier, soit quand la COVID-19 faisait rage, qu’il y avait des confinements, que plusieurs entreprises n’avaient pas de visibilité et que le spectre du licenciement massif planait. L’État était venu à la rescousse des familles en accordant le Government Wage Assistance Scheme à des employés. Ce qui, selon Business Mauritius, a permis à la majorité des entreprises de survivre. 

«Cost-ineffective»

Au sein de cette instance, on estime que cette interdiction doit disparaître, tout comme l’ont été les autres mesures prises pendant la pandémie de COVID-19. Pradeep Dursun, Chief Operating Officer de Business Mauritius, avance que le « business model » ne peut rester le même. « Une entreprise doit revoir son modèle économique. Il faut privilégier la diversification. Au cas contraire, une entreprise court le risque de devenir ‘cost-ineffective’. »

Il affirme qu’ils sont plusieurs à dire qu’il y aura des licenciements massifs. « Mais il ne faut pas oublier qu’il y a le Portable Retirement Gratuity Fund. Toutes les années de service sont reconnues. Du coup, la Mauritius Revenue Authority va envoyer les ‘return’ à ceux concernés. Les engagements devront être honorés », fait-il comprendre.

Autre point mis en exergue par Pradeep Dursun : les entreprises sont confrontées à un manque de main-d’œuvre en ce moment. « Quand il y a une restructuration, une personne licenciée sera employée par d’autres entreprises. Il y a un flot dans le marché du travail. Si on ne laisse pas une entreprise se restructurer, elle ne sera pas compétitive, elle accumulera des dettes et elle sera en faillite. » Il souligne que de toute manière, lorsque le montant de la compensation salariale a été décidé, le gouvernement a donné l’assurance aux entreprises qu’il y aurait des mesures de soutien. 

De son côté, Maya Sewnath, présidente de SME Chambers, fait comprendre que cette mesure n’affecte pas les petites et moyennes entreprises (PME). Elle souligne que chacune doit prendre ses responsabilités. Au contraire, poursuit-elle, le secteur manufacturier est confronté à une pénurie de main-d’œuvre. 

« Qui licencier alors que nous sommes déjà en manque d’effectif ? » demande-t-elle. Elle précise que ce sont surtout les étrangers employés par des PME qui sont concernés. « Quand le chiffre d’affaires est correct, les contrats de ces employés sont renouvelés. Sinon, on les renvoie dans leur pays. »

Selon Maya Sewnath, les PME sont confrontées à plusieurs difficultés. Sans compter le fait qu’elles devront débourser Rs 1 000 par salarié pour payer la compensation l’année prochaine. « Cela aurait été mieux que le gouvernement octroie lui-même ces Rs 1 000. »

Rashid Hossen reconduit à la présidence du Redundancy Board 

L’ancien magistrat Rashid Hossen sera à nouveau à la tête du Redundancy Board. Son contrat vient d’être renouvelé. Cette instance a été créée par le gouvernement pour sanctionner les licenciements abusifs. Cette instance étudie 233 cas au sein de la société Building & Civil Engineering qui est en liquidation. Les différentes parties essaient de trouver un accord. 

 

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