D’une production de 570 000 tonnes en 2004 à 355 000 tonnes en 2017, l’industrie sucrière continue à connaître un déclin qui affecte principalement les petits planteurs. Les revenus étant insuffisants pour couvrir les coûts, des planteurs sont contraints à abandonner leurs récoltes. Mais l’espoir d’un lendemain meilleur demeure, surtout avec l’émergence de nouveaux marchés du sucre, à l’instar de la Chine.
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L’abolition des quotas européens et la libéralisation du marché, le Brexit, la baisse continue du prix du sucre sur le marché mondial, les coûts de production en hausse à Maurice, le vieillissement de la main-d’œuvre, une faible mécanisation, autant de maux qui rognent notre industrie sucrière. Mais il y a aussi l’espoir. La demande de Maurice de pouvoir exporter 50 000 tonnes de sucres spéciaux en Chine a été acceptée. Cela améliorera-t-il le sort de nos petits planteurs ?
La récolte sera affectée par les fluctuations climatiques ressenties à Maurice au début de l'année.
Bien que tout n’est pas rose au sein de l’industrie sucrière, jadis l’épine dorsale de notre économie, le secteur a encore de beaux jours devant lui, car, malgré la baisse du prix du sucre et l’érosion des marchés traditionnels, des nouveaux marchés s’ouvrent. Après la Chine, les autorités comptent contempler d’autres horizons. Mais comment stabiliser notre production, qui ne cesse de diminuer ? La surface de terre sous culture de la canne à sucre est passée de 71 580 hectares en 2005 à environ 56 000 hectares en 2016. Cela est dû principalement à la conversion des terres agricoles en masse à usage résidentiel, commercial ou industriel. Par contre, l’estimation de la production sucrière pour l’année 2018 a été revue à la baisse par la Chambre d’Agriculture, de 350 000 tonnes à 330 000 tonnes. La récolte sera affectée par les fluctuations climatiques ressenties à Maurice au début de l’année, mais aussi à cause d’une énorme perte causée par les incendies de champs de cannes. Il est estimé qu’environ 82 000 tonnes de cannes ont été brulées cette année. Une baisse de la production cannière a aussi un impact négatif sur le volume de bagasse disponible qui, à son tour, affecte le secteur énergie. Pour pallier le manque de bagasse, les centrales thermiques doivent avoir recours à davantage de charbon.
À noter que le secteur sucrier contribue 0,5 % au Produit Intérieur Brut (l’ensemble du secteur agricole contribue environ 3,3 %). Maurice exporte
120 000 tonnes de sucres spéciaux vers 40 pays, dont 20 au sein de l’Union Européenne. Parmi les autres pays, on compte les États-Unis, le Canada, le Moyen-Orient, l’Australie et l’Europe de l’Est.
2016 | 2017 | |||
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Surface sous culture (hectares) | Production de cannes (tonnes) | Production de sucre (tonnes) | Surface sous culture (hectares) | Production de cannes (tonnes) |
51,476 | 3, 798,448 | 386,277 | 49,973 | 3, 713,331 |
Kreepalloo Sunghoon : «Une hausse de nos revenus réglera tous les autres problèmes»
Kreepalloo Sunghoon, secrétaire de la Small Planters' Association, nous relate les problèmes majeurs auxquels font face les petits planteurs. Selon lui, le plus gros problème du secteur est le revenu dérisoire par tonne de cannes. « Les revenus excèdent les coûts de production. Si on arrive à augmenter les revenus, on aura résolu tous les autres problèmes », dit Kreepalloo Sunghoon. Il explique que les petits planteurs arrivent difficilement à payer la main-d’œuvre et à encourir les autres frais.
Face à cette situation, certains planteurs sont obligés d’abandonner la récolte. « L’argent que recevra le planteur ne suffira pas pour payer les ouvriers et le transport. Autant abandonner le champ. » Et comment résoudre le problème ? Kreepalloo Sunghoon est d’avis que l’industrie sucrière a la capacité de mieux payer les planteurs. « Il suffit que le gouvernement assume ses responsabilités et prenne la décision qui s’impose. » Il indique qu’à La Réunion, les planteurs obtiennent environ Rs 3 500 par tonne de cannes, alors qu’à Maurice on touche à peine Rs 1 100. Les coûts reviennent à Rs 1 900. L’association a déjà soumis un mémorandum au gouvernement pour expliquer la situation.
« Nous ne demandons que ce qu’on mérite », ajoute le secrétaire de l’association. Les planteurs ne peuvent continuer à perdre Rs 800 par tonne de cannes, ce qui explique pourquoi près de 28 000 arpents cultivables ont été abandonnés. Au niveau de la main-d’œuvre, il dit que les ouvriers ne veulent pas travailler pour des miettes, mais si on les paye un salaire raisonnable, ils vont travailler. « Il n’y a pas vraiment de pénurie de main-d’œuvre, mais plutôt une incapacité à payer. » L’association fait une tournée des villages pour rencontrer tous les planteurs de l’île et les inviter à se regrouper pour une cause commune, afin de se battre pour leurs intérêts. Ils verront, aussi, comment intégrer d’autres secteurs, car on ne peut laisser les champs à l’abandon.
Salil Roy : «On connaît déjà les problèmes, on attend les solutions»
Le président de la Planters’ Reform Association, Salil Roy, abonde dans le même sens que Kreepalloo Sunghoon, c’est-à-dire le prix obtenu par tonne de cannes est nettement insuffisant pour couvrir les frais de la main-d’œuvre et le transport. « Les petits planteurs sont obligés d’abandonner la culture de la canne à sucre. Beaucoup de planteurs ne peuvent récolter, faute de moyens, car les coûts sont trop élevés. » Son association a déjà soumis un document au gouvernement pour demander des mesures correctives, afin d’améliorer la situation, mais Salil Roy déplore la lenteur des autorités à venir de l’avant avec des solutions.
« Les planteurs ont un calendrier de travail à respecter. Il y a un moment pour la semence, un autre pour l’application des fertilisants. Les planteurs doivent suivre les étapes jusqu’à la récolte. Les autorités doivent comprendre cela. On ne peut prendre autant de temps pour analyser la situation et venir avec des solutions. » Il soutient qu’il faut aussi revoir le prix payé pour la bagasse. Salil Roy conclut que tout le monde connaît déjà quels sont les problèmes, il n’y a qu’à travailler les solutions.
Bon à savoir
Les 15 pays plus gros importateurs de sucre en 2017
1. Indonésie : US$ 2,3 milliards
2. États-Unis : $ 1,7 milliard
3. Bangladesh : $ 1,10 milliard
4. Chine : $ 1,08 milliard
5. Émirats Arabes Unis : $ 1 milliard
6. Algérie : $ 988,4 millions
7. Malaisie : $ 917,8 millions
8. Italie : $ 903,6 millions
9. Corée du Sud : $ 850,1 millions
10. Égypte : $ 799,8 millions
11. Inde : $ 774,5 millions
12. Espagne : $ 654,7 millions
13. Arabie Saoudite : $ 604,5 millions
14. Kenya : $ 575,3 millions
15. Irak : $ 557 millions
Les 15 pays plus gros exportateurs de sucre en 2017
1. Brésil : US$ 11,4 milliards
2. Thaïlande : $ 2,6 milliards
3. France : $ 1,3 milliard
4. Guatemala : $ 826,2 millions
5. Allemagne : $ 743,3 millions
6. Mexico : $ 664,8 millions
7. Inde : $ 661,8 millions
8. Cuba : $ 554,7 millions
9. Belgique : $ 461,4 millions
10. Pays Bas : $ 394,2 millions
11. Émirats Arabes Unis : $ 393 millions
12. Colombie : $ 378,2 millions
13. Pologne : $ 361,7 millions
14. Pakistan : $ 344, 6 millions
15. Swaziland : $ 312,4 millions
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