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Enjeu scolaire - maîtriser l’orthographe : un atout incontournable pour les élèves

L’orthographe, importante pour la réussite des élèves.
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L'orthographe, souvent perçue comme un détail technique, joue un rôle crucial dans l'éducation des élèves. Maillon essentiel de la communication écrite, elle influence non seulement la clarté des idées, mais aussi la confiance en soi des apprenants. Ci-dessous, des pédagogues mettent en exergue pourquoi une maîtrise solide de l'orthographe est indispensable à l'école, tant pour le développement personnel que pour l’avenir académique et professionnel des élèves.

« Des élèves du secondaire ne savent pas distinguer un verbe d’un nom… » C’est malheureusement le constat du professeur de français, Fabian Goerens, lors d’une émission de QR-RTBF, il y a quelques jours. Il affirme qu’au fil des années, la situation est devenue inquiétante. En tant que prof de français, il avance qu’il faut insister sur l’orthographe et sur les règles de grammaire. 

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La Head of Department (HOD) de français au Curepipe College, Hemlata Bawanypeck.

À Maurice, la Head of Department (HOD) de français au Curepipe College, Hemlata Bawanypeck, explique que : « le souci de la bonne orthographe, du bien-dire et du bien-écrire, n’est pas forcément la marque des besogneux, des puristes, des perfectionnistes, des maniaques du détail. C’est le souci de tout le monde, parce que chacun se rend compte que le flou dans la parole, dans l’écriture, rend la communication bien plus laborieuse, imprécise. L’orthographe permet donc de transmettre des idées de manière claire et précise. Une faute d'orthographe peut parfois changer le sens d'un mot ou d'une phrase, créant des malentendus. En respectant les règles orthographiques, on évite les malentendus ou les confusions, surtout dans des contextes où les mots peuvent se ressembler phonétiquement mais avoir des significations différentes ».

Selon l’enseignante, dans le système éducatif, la bonne orthographe est souvent un critère d’évaluation majeur, que ce soit à l’écrit ou dans les dictées. Une bonne maîtrise de l’orthographe est valorisée dans les examens. Elle permet aux élèves de gagner des points et d'améliorer leurs résultats globaux. 

Au secondaire, les examens de la CIE évaluent la maîtrise orthographique, et des fautes peuvent être lourdement pénalisées. « L'orthographe est intimement liée à la grammaire, la conjugaison et la syntaxe en français. La bonne maîtrise des règles orthographiques permet de structurer les phrases correctement et de respecter les accords en genre, en nombre ou en temps. Elle aide à comprendre les relations entre la prononciation et l’écriture, ce qui renforce la maîtrise globale de la langue. Cela permet également aux apprenants de saisir les subtilités de la morphologie française ».

Hemlata Bawanypeck insiste qu’une mauvaise orthographe peut être associée à un manque de soin ou à une maîtrise insuffisante de la langue. « Une bonne maîtrise de l’orthographe est souvent exigée dans de nombreux secteurs professionnels, notamment dans les métiers liés à la communication, à l’éducation, à la rédaction ou encore à l’administration. Des fautes répétées peuvent nuire à la crédibilité et aux perspectives d’embauche ou de promotion », indique-t-elle.

En tant que prof de français, elle a remarqué que les élèves ont des soucis avec l'orthographe. « Ces difficultés sont liées à divers facteurs linguistiques, culturels et sociaux. L'île Maurice est un pays multilingue où le créole mauricien, l'anglais et le français cohabitent avec plusieurs autres langues. Cette diversité linguistique, bien qu'enrichissante, peut poser des défis dans l'apprentissage de l'orthographe du français. Bien que le français soit une langue officielle et enseignée à l'école, les élèves ne le pratiquent souvent pas en dehors du cadre scolaire. À la maison et entre amis, le créole et parfois l'anglais sont privilégiés. Le manque d'exposition et de pratique quotidienne du français limite donc leur maîtrise de la langue, particulièrement à l'oral », indique-t-elle.

Elle affirme que la langue française possède des règles d'orthographe souvent complexes et parfois irrégulières, qui déroutent les élèves. « Les accords de genre et de nombre ainsi que les homophones grammaticaux sont souvent un défi lourd à relever ainsi que l'usage des accents et des liaisons muettes. Nous ne pouvons pas non plus oublier ceux qui ont des troubles spécifiques de l’apprentissage, comme la dyslexie ou la dysorthographie, qui affectent directement leur capacité à maîtriser l'orthographe », fait-elle ressortir.

L’enseignante souligne également que l'usage des SMS, des réseaux sociaux et des plateformes numériques a largement encouragé des formes d'écriture abrégées et phonétiques. Cette situation nuit à leur orthographe formelle. 

L’orthographe en anglais : un enjeu essentiel dans l'éducation

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Dr Tejshree Auckle Ramkalawan, Senior Lecturer à l’Université de Maurice (UoM).

La Dr Tejshree Auckle Ramkalawan, Senior Lecturer à l’Université de Maurice (UoM), s’est exprimée sur l’importance de l’orthographe en anglais, soulignant les défis auxquels font face les étudiants dans ce domaine. Selon ses dires, l’orthographe ne se résume pas uniquement à la bonne utilisation des lettres, mais inclut également la ponctuation, un aspect souvent négligé par les apprenants.

L’orthographe en anglais, indique-t-elle, est influencée par le système étymologique, contrairement à des langues comme l’hindi qui sont phonémiques. Cela signifie que la manière dont les mots sont écrits en anglais reflète souvent l’histoire de la langue, rendant parfois l’apprentissage plus difficile pour les étudiants. Cette particularité explique les nombreuses irrégularités qui surprennent les apprenants, comme le souligne l’exemple célèbre de George Bernard Shaw avec son mot inventé « ghoti » pour écrire « fish ».

Les homophones – des mots ayant une prononciation identique, mais une orthographe différente – représentent également un obstacle majeur pour les élèves. Confondre « their » et « there », ou « your » et « you’re », est une erreur courante dans les examens écrits. Selon notre interlocutrice, ces erreurs découlent souvent de la manière dont les étudiants entendent les mots, et non de leur maîtrise des règles d’orthographe. Au fil des années, elle a observé que l’orthographe reste un défi constant pour les étudiants, bien que la situation n'ait ni empiré ni amélioré de manière significative. Malgré l’introduction des correcteurs orthographiques dans les travaux dactylographiés, les erreurs d’orthographe persistent dans les examens manuscrits. En outre, la ponctuation est une autre pierre d’achoppement, avec des étudiants qui, souvent, rédigent des paragraphes entiers sans utiliser correctement les points, les virgules ou les tirets.

Le recul du nombre d’étudiants excellant en anglais est également préoccupant. Le nombre d'élèves obtenant des A ou A+ en littérature anglaise au niveau HSC reste faible, tandis que plus de 50 % des étudiants finissent avec des notes comprises entre D et U. Pour la professeure, la clé réside dans la motivation et l’engagement, tant des enseignants que des étudiants.

L’impact des textos et des réseaux sociaux

La Dr Auckle Ramkalawan note que l'écriture SMS influence également la manière dont les élèves rédigent leurs devoirs. Bien que les étudiants distinguent généralement les deux types d’écriture, certains éléments de la communication rapide sur téléphone se glissent dans leurs essais, notamment l’absence de structure et l’utilisation d’abréviations. De plus, le manque de pratique en rédaction est un problème récurrent. Les élèves écrivent peu, et cela se reflète dans leurs performances académiques.

L'orthographe est plus qu'une simple formalité. Elle influence la perception que les autres ont de nous, et des études montrent que des fautes d’orthographe peuvent nuire à la crédibilité d’un individu, même lorsque ses idées sont innovantes. Que ce soit dans le cadre universitaire ou professionnel, une orthographe soignée est un atout majeur.

La Dr Auckle Ramkalawan rappelle que bien écrire ne se limite pas à éviter les fautes. C’est un travail de rigueur et de discipline qui exige une pratique régulière et une grande attention aux détails.


Questions à

Jacques Malié : «nous assistons à une baisse de niveau à tous les échelons»

Le pédagogue Jacques Malié est très critique du niveau de l’orthographe. Il souligne également que « les manuels scolaires ne répondent plus au besoin de s’approprier une bonne maîtrise de l’orthographe ».

Est-ce que l’orthographe est un problème en milieu scolaire ?

Définitivement, l’orthographe représente un réel problème. Nous assistons à une baisse de niveau et ceci à tous les échelons. Il semblerait que l’ensemble des partenaires dans le domaine éducatif accorde peu d’importance à l’orthographe que ce soit pour l’anglais ou pour le français qui est une langue encore plus difficile de par sa complexité grammaticale. 

Quelles sont les causes de la dégradation ?

Il faudrait citer plusieurs facteurs tels que le changement de programme scolaire : le niveau requis pour la réussite à des examens de fin de cycle a été revu à la baisse : beaucoup de questions sont des (« multiple choice questions ») ou des « matching/pairing type » qui ne font pas appel à un bon usage de l’orthographe. Les manuels scolaires ne répondent plus au besoin de s’approprier une bonne maîtrise de l’orthographe. On ne fait plus de dictées, de la lecture à haute voix et on néglige les compositions qui requièrent plus de temps d’enseignement. Ajouté à cela l’usage abusif de la technologie : plus besoin d’écriture, les messages codés (SMS) les images etc. sont préférés. Les jeunes ont tout simplement négligé l’écriture. 

Quel est l’impact sur les performances des élèves ? 

Je dirai tout simplement considérable. L’écriture laisse beaucoup à désirer et ceci depuis le primaire. Il y va aussi du peu de considération accordée par les profs et les parents. Quand en Grade 12 et 13 (HSC), le questionnaire de compréhension évalue le niveau de grammaire basique dans une question, on se rend compte que les élèves n’ont que très peu de connaissance en grammaire et en orthographe qui vont de pair. 

Il y a aussi des élèves qui ont un souci de dyslexie qui peut être corrigé dès le plus jeune âge, si on s’y prend à temps avec des visites chez l’orthophoniste. Or, dans bien des situations, ce problème est détecté bien après et le retard et par conséquent, le rattrapage devient plus difficile. 

Les manuels scolaires ne répondent plus au besoin de s’approprier une bonne maîtrise de l’orthographe"

Comment renforcer la maîtrise de l’orthographe ?

Au risque de paraître rétrograde, je ne vois pas d’autres solutions que d’avoir recours aux méthodes dites « anciennes ». Plus d’importance à l’écrit aux dictées, à des manuels qui ont fait leur preuve (e.g Bled, les livres de grammaire, etc). Il est aussi important de revoir le medium d’enseignement : on ne peut pas enseigner une langue en ayant à chaque fois un souci de traduction dans une autre langue : le français ne peut être enseigné que par une maîtrise complète du français. Il faudrait aussi se demander pourquoi par exemple, les examens de l’Alliance Française n’ont plus le même cachet et suscitent moins d’engouement, il y a définitivement un manque d’intérêt de la part des institutions scolaires et très peu de parents y attachent une attention particulière.

Il est aussi important de revenir aux bonnes vieilles méthodes en privilégiant la lecture et la maîtrise des langues par des exercices tels que les dictées, la grammaire et les compositions à intervalles réguliers.

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