La transplantation rénale est de nouveau possible à Maurice. Des chirurgiens locaux suivent en ce moment une formation dispensée par une équipe anglaise. Si l’intervention peut se faire au pays, le souci qui émerge désormais est la difficulté des patients de trouver un donneur.
Depuis la promulgation partielle de la Human Tissue (Removal, Preservation and Transplant) Act, la transplantation rénale est de nouveau possible à Maurice. En revanche, la difficulté de trouver un donneur est toujours présente pour les patients qui sont sous dialyse. Le donneur doit être un membre de la famille et être compatible avec le receveur, entre autres critères.
Mais des patients se heurtent à la réticence de certains de leurs proches qui étaient pourtant d’accord au départ. Des désistements sont intervenus à la dernière minute dans certains cas, comme cela s’est produit en octobre lors de la réintroduction de la transplantation rénale à Maurice. Sur les quatre interventions qui avaient été programmées, seulement trois ont pu être pratiquées avec succès.
Des patients se heurtent à la réticence de certains de leurs proches qui étaient pourtant d’accord au départ
« Pour les dons d’organes de donneurs vivants, les receveurs doivent chercher parmi les membres de leur famille mais aussi parmi les proches dont les liens datent de nombreuses années », explique le Dr Davy Ip, consultant en néphrologie. Faire don d’un organe de son vivant comporte de nombreuses variations, selon lui.
Il ajoute que dans certains cas, les donneurs potentiels hésitent à sauter le pas. Dans d’autres, les patients n’osent pas faire la demande pour trouver un rein. « Il arrive aussi que le groupe sanguin du donneur ne corresponde pas à celui du receveur ou qu’il souffre de comorbidités, telles que le diabète, par exemple. Ce qui rend la transplantation impossible », explique-t-il.
Mais le problème des personnes en quête d’un rein ne s’arrête pas là, selon Bose Soonarane, secrétaire de la Renal Disease Patient Association. Selon lui, des donneurs subissent la pression de certains de leurs proches. « Il y a une patiente qui devait recevoir un rein de son époux. Mais à la dernière minute, les proches de ce dernier n’ont pas voulu qu’il subisse cette intervention. Ce qui a causé une grosse déception pour sa femme », affirme-t-il.
Un néphrologue indique, sous le couvert de l’anonymat, qu’il y a encore beaucoup de frayeur par rapport au don d’organes. « Nombreux se demandent ce qui leur arrivera après ou s’ils pourront réellement vivre en bonne santé et reprendre toutes leurs activités après avoir fait don d’un de leurs reins », dit-il.
Il précise qu’il y a toute une éducation et une sensibilisation à faire à ce niveau afin d’encourager le don d’organes en attendant qu’il soit possible de faire des prélèvements cadavériques, c’est-à-dire récupérer des organes de personnes décédées si elles ont signifié une intention en ce sens avant leur mort. « Sur les quelque 1 500 patients sous dialyse actuellement, un tiers peut bénéficier d’une transplantation rénale. Mais ce n’est qu’une dizaine voire une vingtaine seulement qui arriveront à trouver un rein. »
Formation des chirurgiens mauriciens
Le Dr Nizam Fatehmamode, chirurgien spécialisé dans les greffes au Guy’s and St Thomas’ NHS Foundation Trust en Angleterre, est à Maurice en ce moment avec une équipe de trois chirurgiens. Ils sont là pour pratiquer une transplantation rénale sur quelques patients mais aussi pour former des chirurgiens mauriciens. Deux interventions ont été réalisées avec succès à l’hôpital Victoria de Candos le lundi 21 novembre 2022. Le Dr Fatehmamode sera à Maurice pour une période de six mois dans le cadre de la formation de trois chirurgiens locaux.
Interventions réussies
La transplantation rénale a repris à Maurice le 20 octobre 2022 grâce au Dr Perumalla Rajasekhar, chirurgien indien, qui est venu avec une petite équipe pour s’occuper de la transplantation rénale de trois patients. Un mois après, les donneurs et les receveurs se portent bien. Ils bénéficient d’un suivi médical comme l’exige le protocole. Ces interventions ont pu être réalisées grâce à la collaboration de Maheswarsingh Chackoor, directeur administratif du Club Rotary de Beau-Bassin/Rose-Hill. C’est lui qui est l’initiateur du projet. Les opérations se sont déroulées en présence des chirurgiens mauriciens également.
Prélèvements cadavériques
Le problème pour trouver des organes sera résolu quand le prélèvement pourra se faire sur des personnes décédées. C’est ce qu’estime le néphrologue qui a requis l’anonymat. « Il y a toute une préparation à faire au préalable et une banque d’organes à constituer », explique-t-il. Il souligne que Maurice n’est pas le seul pays à être touché par le problème de trouver un organe.
Le Dr Ip indique que le prélèvement d’organes sur les personnes décédées est complexe. « Il faut organiser la structure physique et assurer la formation du personnel. Il y a aussi tout le volet diagnostic qui est très important. »
Dans certains cas, les greffes ne sont pas tout à fait compatibles, mais il est possible de procéder à la transplantation en adaptant les médicaments à prendre par la suite et en ayant recours à la plasmaphérèse. « Pour des greffes plus compliquées, il faut plus d’analyses car ce ne sont pas tous les patients qui peuvent subir une transplantation. Il faut des moyens thérapeutiques pour enlever les anticorps », explique le Dr Ip.
Selon lui, il y a des chirurgiens, des néphrologues ainsi que des techniciens de laboratoire qui sont en formation actuellement. « Pour augmenter les chances de faire des transplantations, on doit pouvoir faire celles qui ne sont pas tout à fait compatibles. Mais il y a toujours des contre-indications absolues. Nous poussons les barrières afin d’avoir un maximum de donneurs et d’offrir la chance à encore plus de patients dialysés de recevoir un nouveau rein », fait-il ressortir.
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