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Délits de fuite : appel à une réforme pour ne pas rester sur le pavé

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Alors que les cas de fuite après accident continuent de susciter l’indignation, l’avocate Gayle Yerriah propose une refonte des lois existantes. Elle plaide pour des sanctions plus sévères, une meilleure prévention et une justice plus rapide pour mieux protéger les victimes et responsabiliser les conducteurs. 

Deux cas récents de délits de fuite ont relancé le débat sur l’effet dissuasif de la législation mauricienne face à ce délit. Le 8 juin 2025, à Quatre-Bornes, un garçonnet de 4 ans a été grièvement blessé après avoir été percuté par un véhicule devant sa maison. Le conducteur a pris la fuite, mais a été arrêté quelques jours plus tard.

Le 12 juillet 2025, à Saint-Martin, Emmanuel Marcellino Goder, 66 ans, a été retrouvé mort en bordure de route. L’enquête pointe vers un 4x4 impliqué dans un délit de fuite. Un suspect a reconnu son implication, tout en niant avoir causé l’impact fatal. Ces affaires soulèvent une question essentielle : les lois actuelles sont-elles réellement dissuasives ?

« La loi mauricienne encadre déjà les délits de fuite, mais des réformes sont nécessaires pour rendre les sanctions plus efficaces », répond Me Gayle Yerriah.

Amende et prison

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Me Gayle Yerriah plaide pour un encadrement juridique renforcé face aux délits de fuite. 

Selon l’avocate, l’article 140 de la Road Traffic Act 1962 impose des obligations précises à tout conducteur impliqué dans un accident de la route causant des blessures ou des dommages matériels.

Elle explique que  « le conducteur doit s’arrêter immédiatement, porter assistance aux blessés, fournir ses coordonnées, déclarer l’accident à la police dans un délai de 4 heures et à son assureur dans les 24 heures suivant le prochain jour ouvrable ». Elle insiste aussi sur l’interdiction de déplacer le véhicule sauf en cas d’obstruction totale, après marquage clair de la position.

Le non-respect de ces obligations constitue un délit punissable d’une amende n’excédant pas Rs 5 000 et ou d’un emprisonnement maximal de 6 mois.

« En cas de marquage frauduleux de la position du véhicule, la peine peut aller jusqu’à deux ans de prison », souligne Me Gayle Yerriah.

À ces dispositions s’ajoute l’article 39A du Code pénal, relatif à l’« omission coupable », c’est-à-dire le fait de ne pas porter secours à une personne en danger. La peine prévue est une amende ne dépassant pas Rs 10 000 et ou un emprisonnement de deux ans.

Me Gayle Yerriah attire l’attention sur les circonstances aggravantes, qui alourdissent les sanctions. Elle souligne : « Lorsqu’un accident entraîne des blessures graves ou la mort, ou que le conducteur est sous l’emprise d’alcool ou sans permis, les peines sont plus lourdes. » L’article 239 du Code pénal punit l’homicide involontaire d’une peine de prison et d’une amende pouvant atteindre Rs 150 000. En cas de blessures involontaires, l’amende peut aller jusqu’à Rs 100 000, avec un risque d’un an de prison.

En matière de conduite sous influence, l’article 123D de la Road Traffic Act prévoit une amende entre Rs 25 000 et Rs 50 000 et jusqu’à trois ans de prison. La suspension du permis est obligatoire. « Il existe même une exclusion du recours à la déclaration simplifiée d’accident dans ces cas-là », précise Me Gayle Yerriah.

Efficacité des sanctions

L’efficacité des sanctions actuelles est mitigée, évoque Me Gayle Yerriah : « Les amendes sont parfois trop faibles et l’application des sanctions reste inégale. » Elle mentionne aussi les retards judiciaires qui diminuent l’effet dissuasif des poursuites.

Comparant avec d’autres juridictions, elle ajoute : « En France ou en Australie, les sanctions sont plus sévères, avec des peines de prison ferme et des amendes proportionnelles aux revenus. Cela renforce la prévention. » 

Pour améliorer la situation à Maurice, Me Gayle Yerriah propose plusieurs pistes : renforcer les contrôles routiers, lancer des campagnes de sensibilisation, instaurer une suspension immédiate du permis en cas d’alcoolémie, et rendre les sanctions progressives, selon la gravité des faits.

Réformes souhaitées

Caméras intelligentes et une justice plus rapide

L’avocate estime que des réformes profondes sont nécessaires. Elle recommande, notamment, l’alourdissement des peines. « Il faut introduire une présomption aggravée, si le conducteur fuit pour éviter un test d’alcoolémie ou de drogue », soutient l’avocate.

Elle se dit pour l’amélioration des enquêtes. Notamment en utilisant des caméras de surveillance intelligentes, du style ANPR (Automatic Number Plate Recognition), capables de lire automatiquement les plaques d’immatriculation.

Elle propose aussi la création d’une unité spécialisée dans les délits de fuite. Elle réclame aussi une justice plus rapide : « Il faudrait des tribunaux spécialisés pour éviter les retards et permettre des témoignages anonymes », dit-elle.

L’avocate opte également pour une meilleure indemnisation des victimes. « Même si le conducteur n’est pas identifié, les assurances devraient être obligées d’indemniser », suggère celle-ci. Pour finir, elle préconise des sanctions complémentaires, comme le retrait définitif du permis en cas de récidive, des travaux d’intérêt général en lien avec la sécurité routière...

 

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