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CSG, PRGF et lois du travail : la contre-attaque du gouvernement

Concertation entre le Grand Argentier et le ministre du Travail.

Après l’action en cour de Business Mauritius contre la Contribution Sociale Généralisée, c’est au tour du gouvernement de donner la réplique au secteur privé. À coup de critiques et de piques, les ministres Renganaden Padayachy et Soodesh Callichurn s’en sont pris aux lobbies exercés par « certains » pour leurs « propres intérêts ». Gros plan sur les thématiques et problématiques qu’ils ont abordées lors d’une conférence de presse au Bâtiment du Trésor, le mercredi 11 novembre 2020.

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Pressions et autres lobbys 

Renganaden Padayachy a mis avant les pressions auxquelles font face le gouvernement de même que des lobbys. « Nous avons subi beaucoup, beaucoup, beaucoup de pressions et (fait face) à de nombreux lobbies. Il y a eu des pressions pour rouvrir les frontières du pays sans hésitation de même que changer les protocoles (sanitaires). Nous avons résisté. Le Premier ministre a considéré la sécurité de la population en priorité. Nous constatons ce qui se passe dans le monde, dans les pays qui n’ont pas adopté des mesures très strictes. Aujourd’hui, l’Europe est en reconfinement. Imaginons, le temps d’une seconde, qu’il nous faut rentrer en confinement, refermer le pays et tout le monde reste chez soi. Imaginez la catastrophe économique qui s’en serait suivie », avance-t-il. En tant que décideurs publics, ajoute le Grand argentier, « il nous incombe de prendre des décisions qui tiennent compte de la vie de nos citoyens ». « Notre philosophie s’appuie sur l’humain, la ressource principale dans notre pays, qui permet de créer l’activité économique et ;a richesse. C’est le salaire minimum, l’augmentation de la pension, c’est un rééquilibrage de la richesse que nous faisons w».

Pour le ministre des Finances, le gouvernement fait maintenant face à un « nouveau type de pression  ». « Or, la pression est qu’une partie nous demande de continuer à payer les salaires dans les secteurs affectés, mais tout leur donnant l’autorisation de licencier. Ce n’est nullement pas la philosophie du gouvernement. (…) Pa pou ena sa. Mo dir li aster lamem. Pa bizin vinn fer lobi. Pa bizin vinn koze. C’est simple. Dès le début, nous l’avions dit. Nous paierons les salaires à condition qu’on ne licencie pas. Telle est notre philosophie. Telle est notre vision », martèle-t-il. Nanye, an tou ka pa serten lavwa, pa bann dimounn ki pa mank nanye ki pou anpes nou met an plas nou politik ekonomik ». Et d’ajouter que c’est le gouvernement qui est en train de soutenir l’économie à travers des investissements publics et des aides, ce alors que cela aurait être « le rôle du secteur privé ».

D’un ton ferme, Soodesh Callichurn, le ministre du Travail, précise qu’il n’est pas question de céder à la pression. « Il y a eu des lobbies pour que le gouvernement n’aille pas de l’avant avec le Portable Retirement Gratuity Fund (PRGF). Cela démontre que certains ne sont pas pour le partage des richesses et pensent uniquement à faire des profits », argue-t-il. Par ailleurs, il assure qu’il n’y a « pas de confrontation entre le gouvernement et le secteur privé ». Toutefois, dit-il, « il ne faut pas utiliser des prétextes non fondés pour faire des affaires sur la classe ouvrière. Nous n’avons aucun problème avec qui que ce soit et il n’y a pas de confrontation directe ».

L’indétrônable Workers Rights Act

Lors de la 47e Assemblée Générale qui s’est tenue le 5 novembre dernier, l’Association des hôteliers et des restaurateurs (Ahrim) avait, par l’intermédiaire de son président, demandé une révision de la loi du Travail. Toutefois, le ministre Callichurn se veut catégorique. « Nous ne toucherons pas à la loi du Travail si c’est au détriment des travailleurs », a-t-il martelé.  

Contestation de la CSG, une « aberration totale »

Sidéré par la décision de Business Mauritius de contester la Contribution Sociale Généralisée (CSG) en Cour suprême, Soodesh Callichurn qualifie cette action « d’aberration totale ». Il n’y aurait pas eu de consultations avant de porter l’affaire en cour, selon le ministre. « Nous n’avons pas eu de lettre officielle de demande pour une table ronde », avance-t-il. Pour lui, cela démontre que certaines personnes ne veulent pas que les travailleurs gravissent les échelons. Et d’ajouter que « le gouvernement maintiendra sa philosophie jusqu’à la fin de son mandat ».   

Sur le volet de la CSG, le Grand argentier a, lui, affirmé que, dans l’immédiat, il ne donnera pas beaucoup de détails sur le sujet. En temps et lieu, il viendra de l’avant avec des réponses. Des clarifications s’ajouteront à celles déjà communiquées. À la question concernant le reproche du secteur privé sur l’absence de consultations sur la CSG, le ministre des Finances réplique : « cet argument à l’effet qu’il n’y a pas de consultations est infondées. Les consultations ont lieu en permanence. Le Wage Assistance Scheme a été préparé pendant le confinement au ministère des Finances (…) Nous avons travaillé avec toutes les associations, » a-t-il dit. « Il y a des lobbys pour autre chose. » 


« Démagogie » sur le PRGF

Le manque de consultations du gouvernement concernant des sujets d’intérêt public est souvent décrié par le patronat. Or, le ministre du Travail assure que des échanges ont eu lieu concernant le Portable Retirement Gratuity Fund (PRGF) par l’entremise d’un comité technique. Une étude, commanditée par le gouvernement, a également été effectuée par des actuaires. « Business Mauritius est contre le PRGF et l’introduction d’un Redundancy Board depuis le début. Nous savons qui est la tierce personne qui se cache derrière la décision de mener des actions en cour. Il est clair et net que certains font de la démagogie », souligne le ministre du Travail.


Une attitude décriée : le ministre des Finances a analysé l’approche de « certains »

  • Philosophie : « Ils sont contre tout, contre la marche progressiste. Des prix Nobel en économie l’évoquent. La marche progressiste est qu’on doit améliorer la vie de tous les citoyens, car cela a un impact positif sur l’économie. »
  • Compensation salariale :  « Prochainement, on aura des représentations (pour la compensation salariale). Avant qu’on ne démarre, on dira qu’il ne faudra pas augmenter les salaires. Nous le savons. En tant que gouvernement responsable qui a une philosophie, nous travaillons pour la population, pour que l’économie continue à progresser. »
  • Vision globale : « La crise demande davantage de solidarité. Nous, l’État, nous payons les salaires dans le secteur privé afin que les grandes entreprises (…) En retour, ils disent qu’il faut leur donner l’autorisation de licencier. Telles sont les demandes qui nous parviennent. Ce sont des demandes qui n’ont aucune justification, ni sens économique. Plus les gens perdront leur emploi, plus on entrera davantage dans une crise financière. Nous devons avoir une vision globale au lieu du court terme. »
  • Solidité : « Les bases sont là. Nous devons travailler et cesser d’être égoïstes. (…) Nous devons penser à nos prochaines, anciennes et futures générations. »
  • Pension à Rs 7 000 : « Dans la préparation du Budget, nous avons beaucoup de représentations. Certains nous ont dit de baisser la pension. Nous venions de l’augmenter à Rs 9 000. Quand nous déboursions sous le Wage Assistance Scheme, ils ont dit de baisser la pension à Rs 7 000. Ce serait une économie de Rs 6 Md à Rs 7 Md. Économiquement, ce n’est pas fiable non plus. Ils ne s’en rendent pas compte de l’impact futur sur l’économie. La consommation et l’investissement seront impactés. »

Chômage, l’importance de ne pas créer la psychose 

Le gouvernement vise à sauvegarder les emplois en cette période de crise. C’est dans cette optique que l’État a déboursé Rs 13 Md pour préserver l’emploi de 476 382 salariés. Évoquant l’importance de précisions au niveau des chiffres du chômage, Soodesh Callichurn fait ressortir qu’il « ne faut pas créer une psychose qui risque d’instaurer un climat d’insécurité ». Un programme de formation sera d’ailleurs mis en place pour aider les chômeurs, cela dans les plus brefs délais. Le gouvernement travaille en collaboration avec le HRDC pour élaborer une série de formations pour 9 000 personnes. Un montant de Rs 550 M sera alloué à ce projet. Plusieurs institutions, dont Landscope Mauritius, l’Institut Océanographique de Maurice et le Centre de Recherche d’Albion, participeront à cet élan de solidarité. Au total, 23 000 personnes bénéficieront de ces mesures à la rentrée de 2021.

Date Nombre de chômeurs enregistrés Ceux en attente d’un meilleur emploi
Février 2020 23 193  
Août 2020 31 494 23 110

 


Le boni de fin d’année, une obligation légale

La provision du boni de fin d’année dans la loi est restée inchangée et ne changera pas. C’est ce qu’a affirmé le ministre du Travail à l’heure des questions. Ainsi, tout employeur est dans l’obligation légale de payer le boni de fin d’année. Une des nouvelles conditions de la loi précise que les entreprises ayant recours à l’aide financière du gouvernement ne peuvent licencier leurs employés. « Certaines entreprises qui n’ont pas sollicité l’aide de l’État sont dans un mood d’attentiste jusqu’au 3 décembre. Or, le gouvernement ne prévoit pas de divulguer sa stratégie », soutient Soodesh Callichurn.


MIC, financement gratuit

Sur le volet que la Mauritius Investment Corporation est exigeante dans ses conditions avant le déboursement, Renganaden Padayachy a dit qu’ils (les grandes compagnies) « ont voulu avoir ce financement public gratuitement. »

  • Rs 6 Md pour les travaux communautaires

Une somme de Rs 6 Md est sur table pour soutenir l’investissement global. L’argent est consacré aux petits travaux communautaires : des drains qui demandent un travail urgent ou la réfection des routes. Le but est de revoir tous les problèmes auxquels nous faisons face dans la vie de tous les jours. « Nous avons enclenché les procédures. Très vite, on verra les résultats sur le terrain, » a dit le ministre des Finances.

  • Le maximum pour maintenir l’emploi

Le second point de la stratégie de l’État en ces moments de pandémie et de contraction économique de 14,2 % est le maintien de l’emploi. Dans le monde, il est question de fermeture et de chômage en hausse. Ici, l’État fait de son mieux pour en préserver et en créer. « Pour nous, l’économie est une science sociale. Ce n’est pas trois ou quatre personnes, c’est la population en general. C’est le bien-être de la population. La variable la plus importante pour le bien-être d’une personne est son travail. C’est pour cette raison que nous faisons tout pour maintenir l’emploi, » a dit Renganaden Padayachy.

  • Les mesures rapporteront leurs fruits

Selon le ministre des Finances, le Fonds monétaire international valide les mesures. Le gouvernement s’appuie sur des rapports et chiffres des institutions internationales. En 2021, les richesses seront en croissance après une année difficile où l’Etat fait de son mieux pour l’emploi et le maintien des investissements.

  • Liberté et bonne décisions

D’une part, l’analyse du gouvernement soulignant que Maurice va de mieux en mieux comparé à ce qui se passe à l’international. Et d’autre part, « beaucoup » affirmant que tel n’est pas le cas. Selon le ministre des Finances, il y a le problème que les touristes ne viennent plus au pays. Le secteur du tourisme représente 8 % de nos richesses et 90 % de l’activité économique se poursuivent. 

« Telle est notre priorité : de faire attention, procéder par phases, voir ce qui se passe autour de nous et prendre les bonnes décisions. À ce jour, nous avons pris les bonnes décisions. Toutes (ces décisions) nous permettent de vivre librement. Et c’est ce qui est le plus important : la confiance qu’on a en allant travailler, déposer ses enfants, faire ses achats. On a confiance que le virus n’est pas présent au sein de la communauté. C’est important pour l’activité économique, » a souligné Renganaden Padayachy.

  • Accident à Pailles : les blessés percevront leurs salaires

Triste fin pour quatre travailleurs bangladeshis qui ont péri dans un accident de la route le jeudi 5 novembre dernier à Pailles. Un des travailleurs, qui se trouvait dans un état critique après l‘accident, commence à rétablir, selon le ministre du Travail. Cependant, les quatre corps des Bangladeshis se trouvent toujours à la morgue à Maurice. « Il devrait y avoir un vol le 22 novembre pour les rapatrier », précise Soodesh Callichurn. Le ministère du Travail a également négocié auprès de l’entreprise concernée pour que la compensation soit payée. L’assurance de l’entreprise couvre à hauteur de Rs 1 million en cas de décès. Quant aux autres blessés, ils ont pu regagner leurs dortoirs, mais ils ne travaillent pas. « Ils percevront leurs salaires », indique-t-il.

  • Un appel lancé aux journalistes pour plus de représentation

Les journalistes sont appelés à faire des représentations auprès du National Remuneration Board (NRB). Ceci, en vue d’améliorer leurs salaires et leurs conditions de travail, avance Soodesh Callichurn. 

Kamlesh Bhuckory et Fabrice Larétif 

 

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