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Covid-19 : ces fossoyeurs fidèles au poste

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La pandémie, ils n’en font pas grand cas. Covid-19 ou pas, ils sont là pour faire un boulot : enterrer les morts. Ils creusent la terre pour y déposer les cercueils, même ceux des défunts emportés par le virus. Leur tâche accomplie, ils se retirent... 

La Covid-19 donne des sueurs froides. On a peur de nos proches, de nos voisins ou encore des passagers dans le bus. Si bien qu’on garde ses distances. Mais, les fossoyeurs répondent, eux, présent. Qu’il vente ou qu’il pleuve… Covid-19 ou pas… 

Ces gars-là sont des costauds dans la tête. Pioche et pique à la main, des bottes jusqu’aux genoux, casquette vissée au crâne, t-shirt sali par la terre rouge de…Terre-Rouge et de Riche-Terre, jogging troué, ils accompagnent les défunts à leur dernière demeure. Respectueux. Solidaires presque. La mort, ils n’en ont cure, mais ils respectent les rituels, les cérémonies, les prières, les incantations… Ils se mettent en retrait et respectent le deuil, le recueillement… 

L’inhumation du défunt de 76 ans se fait en petit comité.
L’inhumation du défunt de 76 ans se fait en petit comité.

Osman, 32 ans, est de ceux qui pointent au cimetière, soit au Riche-Terre Muslim Cemetry. Il vaque à ses occupations entre les tombes. Sa tranquillité, il la trouve en ce lieu sacré. « Je me sens bien ici. On n’a pas de problèmes avec les gens qui viennent rendre hommage à leurs disparus », dit-il.

Cela ne le dérange-t-il pas de devoir fouiller des « kabah » et de mettre en terre des hommes et des femmes ? « C’est un travail noble, épuisant certes, mais je le fais avec passion pour pas grand-chose, mais je fais vivre ma famille sans devoir un sou à quiconque », répond-il.

Cet homme recouvert de poussière, qui porte des savates usées par le dur labeur, un t-shirt délabré, une barbe de quelques semaines, est fier d’être ce qu’il est. La Covid, Omar n’en a pas peur. « Ces dernières semaines, j’ai dû fouiller pas moins de 50 ‘kabah’ à cause de la Covid. C’est triste, mais c’est la vie », dit-il.

Le trentenaire commence le travail à 6 heures. Il quitte son village de Triolet tôt et prend son vieux vélo et roule jusqu’au cimetière et l’après-midi rebelote pour le chemin du retour. « En une année, je fouille quelque 450 ‘kabah’ », nous dit Osman, père de deux enfants.

Direction cette fois au « plus grand cimetière de l’océan Indien », selon un préposé. Là, une petite équipe de quatre est en poste. Il est presque 11 heures en ce lundi matin et il fait une chaleur torride. Dans quelques minutes, ce sera la pause-déjeuner. Mais, l’arrivée un petit groupe troublera cet instant. Ces personnes viennent pour une demande d’inhumation. Elles ont perdu un proche. Il s’agit d’un homme de 76 ans. Il va falloir délaisser cuillères et « catora » pour la pioche, la pique et le panier et enfiler les bottes et visser la casquette. L’enterrement est prévu à 14 heures.

Cela fait 25 ans que Rajesh arpente les allées du cimetière.
Cela fait 25 ans que Rajesh arpente les allées du cimetière. 

Rajesh, 53 ans, est un vieux de la vieille. Un quart de siècle qu’il arpente ce cimetière. Il a mis en terre des centaines de cadavres. « Je fais ce métier depuis 25 ans. Au départ, c’était dur, mais avec le temps on s’y habitue », dit-il.

Le quinquagénaire est marié et père de deux enfants. Son fils travaille au ministère de la Santé et sa fille est en Grade 11. Il est employé par le ministère des Collectivités locales. Rajesh raconte ses journées ces derniers temps : « Depuis la Covid, on n’arrête pas d’enterrer des cadavres. »

Quand nous sommes arrivés au cimetière de Bois-Marchand, il n’y avait qu’un enterrement de prévu, mais une heure après, ce nombre est passé à cinq. 

Salim, 52 ans, un collègue de Rajesh, lâche : « Dezene pa pou kapav la, bizin al fouy tom. Sink ena, de mizilman, de indou ek enn katolik. Pou fini bien tar zordi. Mo bryani pou gate tou. Pa pou gagn letan manze. »

Tailleur de formation, Salim a pu obtenir ce travail de fossoyeur il y a six ans. « C’est différent, mais un travail sûr avec un salaire fixe », affirme le quinquagénaire. Il a ainsi choisi de délaisser ciseaux et machines à coudre pour la pioche et la pique.

L’autre fossoyeur présent vient lui aussi d’un domaine bien différent. Après 25 ans passés à bord d’un forklift, Sanjeev a dû se reconvertir pour gagner sa vie à la fermeture de la compagnie qui l’employait. 

« Quand j’ai su qu’il y avait des postes vacants au cimetière, j’ai tenté ma chance. Cela même si dans la communauté hindoue, on a tendance à craindre les tombes et les morts », indique-t-il.

À 14 heures, un cortège funèbre s’arrête au portail du cimetière. C’est celui de l’homme de 76 ans. Rajesh et ses collègues sont fin prêts, la fosse aussi. Les proches du défunt, en petit comité, fait une dernière prière avant que le cercueil ne soit mis en terre. Puis, c’est au tour des fossoyeurs d’entrer en jeu. Ils s’attellent à bien caler la bière avant de la recouvrir à coups de pioche de cette terre poussiéreuse et rougeâtre. Sa tâche accomplie, la petite équipe s’en va se reposer en attendant quatre autres enterrements en fin d’après-midi.
 

 

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